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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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occasion pour le frapper : voilà tout1. Mais l’épiso<strong>de</strong> nous révèle aussi les<br />

ménagements dont Clovis usait vis-à-vis <strong>de</strong> l’épiscopat au cours <strong>de</strong> sa conquête,<br />

<strong>et</strong> les difficultés que c<strong>et</strong>te politique pru<strong>de</strong>nte <strong>et</strong> circonspecte rencontrait dans<br />

l’humeur brutale <strong><strong>de</strong>s</strong> siens. Ceux-ci vou<strong>la</strong>ient du butin <strong>et</strong> ne rêvaient que pil<strong>la</strong>ge<br />

: leur donner toute satisfaction, c’était s’exposer à voir se lever <strong>la</strong> contrée<br />

entière, <strong>et</strong> les évêques se faire l’âme <strong>de</strong> <strong>la</strong> résistance. D’autre part, avoir trop<br />

d’égards envers les indigènes, c’était risquer <strong>de</strong> mécontenter l’armée. Il fal<strong>la</strong>it<br />

manœuvrer entre ces <strong>de</strong>ux dangers opposés, <strong>et</strong> <strong>la</strong>isser passer les violences qu’on<br />

ne pouvait empêcher, tout en s’évertuant à réparer aussitôt le mal qui avait été<br />

fait. Ainsi, <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion irritée contre les soldats s’apercevait qu’elle était<br />

protégée par leur chef, <strong>et</strong> elle se persuadait peu à peu qu’elle avait tout à gagner<br />

en reconnaissant l’autorité <strong>de</strong> ce protecteur.<br />

Le nom <strong>de</strong> l’évêque qui fut le héros <strong>de</strong> c<strong>et</strong> épiso<strong>de</strong> célèbre nous est resté<br />

inconnu, Grégoire <strong>de</strong> Tours n’a pas cru <strong>de</strong>voir nous le dire ; mais, <strong>de</strong> bonne<br />

heure après lui, on s’est persuadé que c’était saint Remi <strong>de</strong> Reims, <strong>et</strong> <strong>la</strong><br />

conjecture n’a rien d’invraisemb<strong>la</strong>ble2. L’archevêque Hincmar, se faisant<br />

l’interprète d’une vieille tradition locale, voit même un souvenir du passage <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

Francs dans le nom du chemin <strong>de</strong> <strong>la</strong> barbarie, que l’on montre encore aujourd’hui<br />

dans <strong>la</strong> campagne <strong>de</strong> Reims, <strong>et</strong> qui fut suivi, dit-il, par l’armée <strong>de</strong> Clovis3.<br />

Somme toute, il nous importe assez peu <strong>de</strong> connaître le nom resté dans <strong>la</strong> plume<br />

<strong>de</strong> Grégoire <strong>de</strong> Tours. L’anecdote n’a <strong>de</strong> valeur que par son côté général, en ce<br />

sens que tout autre évêque <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule romaine eût pu en être le héros.<br />

La bataille <strong>de</strong> Soissons avait ouvert <strong>la</strong> campagne <strong>de</strong> 486 ; le partage du butin qui<br />

a eu lieu dans <strong>la</strong> même vil<strong>la</strong> en a été l’acte final. Mais, dès le r<strong>et</strong>our du printemps<br />

<strong>de</strong> l’année suivante, L’armée se réunissait <strong>de</strong> nouveau pour d’autres conquêtes.<br />

Nos sources sont malheureusement mu<strong>et</strong>tes sur <strong>la</strong> pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> dix années qui<br />

s’écoule <strong>de</strong>puis <strong>la</strong> bataille <strong>de</strong> Soissons, en 486, jusqu’à <strong>la</strong> guerre contre les<br />

A<strong>la</strong>mans, en 496. Une seule ligne <strong>de</strong> Grégoire <strong>de</strong> Tours disant que Clovis fit<br />

beaucoup d’expéditions <strong>et</strong> qu’il remporta beaucoup <strong>de</strong> victoires, voilà, avec <strong>la</strong><br />

<strong>la</strong>conique mention d’une lutte contre les Thuringiens, dont nous parlerons tout à<br />

1 Sigebert, p<strong>et</strong>it-fils <strong>de</strong> Clovis, se trouvant dans une situation analogue, s’en tira <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

même manière. Son armée avait murmuré contre lui, parce qu’il avait interdit certains<br />

pil<strong>la</strong>ges ; il monta à cheval <strong>et</strong> parvint à l’apaiser par <strong>de</strong> bonnes paroles ; seulement plus<br />

tard, quand on fut rentré dans le <strong>pays</strong>, il fit <strong>la</strong>pi<strong>de</strong>r les principaux mutins. (Grégoire <strong>de</strong><br />

Tours, IV, 49.)<br />

2 Grégoire <strong>de</strong> Tours, II, 27, suivi par le Liber historiæ, c. 10, <strong>et</strong> par Roricon, II, p. 6, ne<br />

nomme personne. Frédégaire, III, 16 ; Hincmar, Script. Rer. Merov., t. III, p. 292, <strong>et</strong><br />

Aimoin, I, XII, p. 36, nomment saint Remi. Hincmar est extrêmement instructif à lire ici :<br />

il fait <strong><strong>de</strong>s</strong> prodiges pour que saint Remi n’ait pas eu l’affront <strong>de</strong> se voir enlever le vase,<br />

mais aussi pour qu’il gar<strong>de</strong> l’honneur <strong>de</strong> se le faire restituer, <strong>et</strong> il a trouvé <strong>de</strong><br />

comp<strong>la</strong>isants échos dans Dubos, II, p. 32, <strong>et</strong> surtout dans Pétigny, II, p. 386. Sur c<strong>et</strong>te<br />

question controversée, voir G. Kurth, les Sources <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong> Clovis dans Grégoire <strong>de</strong><br />

Tours, p. 412, <strong>et</strong> Histoire poétique <strong><strong>de</strong>s</strong> Mérovingiens, pp. 223 <strong>et</strong> 224.<br />

3 Transitum autem rex faciens secus civitatem Remis per viam quæ usque hodie propter<br />

barbarorum per eam iter barbarica nuncupatur. Hincmar, l. c. Le chemin <strong>de</strong> <strong>la</strong> barbarie<br />

existe encore aujourd’hui sous ce nom ; c’est une ancienne voie romaine courant dans <strong>la</strong><br />

campagne <strong>de</strong> Reims, du sud-est au nord-ouest, sur un parcours d’une quarantaine <strong>de</strong><br />

kilomètres, <strong>et</strong> se reliant à Ambonnay à <strong>la</strong> chaussée romaine qui va <strong>de</strong> Reims à Soissons.<br />

Il n’y a rien <strong>de</strong> commun entre le chemin <strong>de</strong> <strong>la</strong> barbarie <strong>et</strong> <strong>la</strong> rue du Barbastre, à Reims,<br />

comme l’a déjà montré Dubos, III, p. 28.

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