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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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officielle <strong>de</strong> l’Empire. Mais il était dans <strong>la</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong>tinée du <strong>de</strong>rnier tenant <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

civilisation romaine <strong>de</strong> n’arriver à <strong>la</strong> postérité que dans les traditions nationales<br />

<strong>de</strong> ses vainqueurs.<br />

Le centre du <strong>pays</strong> qui reconnaissait alors <strong>la</strong> domination <strong>de</strong> Syagrius, c’était le<br />

Soissonnais, qui avait déjà appartenu, s’il en faut croire le chroniqueur, à son<br />

père Ægidius1. Ce renseignement, qui ne semble pas puisé dans une source<br />

écrite, doit être accepté sous bénéfice d’inventaire. Évi<strong>de</strong>mment, dans <strong>la</strong> pensée<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> barbares auxquels il est emprunté, Soissons était un héritage que Syagrius<br />

tenait <strong>de</strong> son père en toute propriété, <strong>et</strong> il n’y avait aucune différence juridique,<br />

à leurs yeux, entre <strong>la</strong> royauté <strong>de</strong> Soissons <strong>et</strong> celle <strong>de</strong> Tournai. En réalité, toute<br />

l’autorité d’Ægidius en Gaule ultérieure reposait sur son mandat <strong>de</strong> maître <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

milices, <strong>et</strong> son fils n’avait pu en recueillir que ce que lui aurait attribué, soit un<br />

mandat nouveau, soit encore <strong>la</strong> confiance <strong><strong>de</strong>s</strong> popu<strong>la</strong>tions. Si donc nous le<br />

voyons établi à Soissons aux abords <strong>de</strong> l’année 486, c’est qu’il s’était emparé <strong>de</strong><br />

c<strong>et</strong>te ville ou qu’elle s’était donnée à lui.<br />

Bâtie au somm<strong>et</strong> d’une colline qui comman<strong>de</strong> <strong>la</strong> rivière <strong>de</strong> l’Aisne, Soissons était<br />

une <strong><strong>de</strong>s</strong> cités les plus riches <strong>et</strong> les plus animées <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule Belgique2. L’Empire<br />

y avait eu d’importants ateliers militaires, où l’on façonnait <strong><strong>de</strong>s</strong> boucliers <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

cuirasses, ainsi qu’une fabrique <strong>de</strong> balistes. Plusieurs édifices considérables<br />

surgissaient dans l’enceinte rectangu<strong>la</strong>ire, <strong>et</strong> les fouilles attestent <strong>la</strong> richesse <strong>et</strong><br />

<strong>la</strong> beauté <strong><strong>de</strong>s</strong> constructions privées. L’on croit r<strong>et</strong>rouver, dans les ruines d’un<br />

vaste monument situé au nord <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville, <strong>et</strong> que <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue popu<strong>la</strong>ire appe<strong>la</strong>it le<br />

château d’albâtre, les traces du pa<strong>la</strong>is <strong><strong>de</strong>s</strong> gouverneurs romains <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

rési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> Syagrius. A l’ombre <strong>de</strong> tant d’opulentes constructions, le<br />

christianisme avait élevé ses mo<strong><strong>de</strong>s</strong>tes sanctuaires, tout parfumés <strong><strong>de</strong>s</strong> souvenirs<br />

<strong>de</strong> ses premiers combats pour le Christ. Crépin <strong>et</strong> Crépinien, les <strong>de</strong>ux<br />

cordonniers martyrs, avaient un oratoire dans <strong>la</strong> ville, sur les fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

chaumière qui avait abrité leurs restes sacrés ; hors les murs, <strong>de</strong>ux autres<br />

églises leur étaient dédiées, l’une à l’endroit où ils avaient été emprisonnés,<br />

l’autre au-<strong><strong>de</strong>s</strong>sus <strong>de</strong> leur tombeau. Enfin, au quatrième siècle, une belle basilique<br />

sous l’invocation <strong>de</strong> <strong>la</strong> sainte Vierge, ainsi que <strong><strong>de</strong>s</strong> saints Gervais <strong>et</strong> Protais, avait<br />

surgi sur les ruines, dit-on, d’un temple d’Isis. Tous ces monuments étaient<br />

<strong>de</strong>bout encore, les humbles comme les superbes ; car, au dire <strong><strong>de</strong>s</strong> historiens,<br />

Soissons avait échappé non seulement à <strong>la</strong> gran<strong>de</strong> invasion <strong>de</strong> 406, mais aussi à<br />

celle d’Atti<strong>la</strong>, en 451. Si l’on peut ajouter foi à ces informations, on s’expliquera<br />

sans peine le choix que Syagrius fit, pour y rési<strong>de</strong>r, <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te ville si<br />

heureusement épargnée. L’œil eût pu s’y croire encore en plein Empire.<br />

L’étendard romain, dit un écrivain, flottait encore sur les murs <strong>de</strong> Soissons dix<br />

ans après que l’épée <strong><strong>de</strong>s</strong> barbares l’avait renversé <strong><strong>de</strong>s</strong> murs du Capitole3. Mais<br />

c<strong>et</strong> étendard n’était plus celui <strong>de</strong> l’Empire : c’était tout au plus celui d’un soldat<br />

<strong>de</strong> fortune, qui n’avait pas plus <strong>de</strong> titre que Clovis à gouverner <strong>la</strong> Gaule. Le sort<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> armes al<strong>la</strong>it seul déci<strong>de</strong>r entre les <strong>de</strong>ux rivaux.<br />

Ce fut le roi <strong><strong>de</strong>s</strong> Francs qui ouvrit les hostilités. Il avait vingt ans, il était à <strong>la</strong> tête<br />

d’un peuple belliqueux <strong>et</strong> entreprenant, il s’inspirait <strong>de</strong> <strong>la</strong> tradition héroïque <strong>de</strong><br />

Clodion, <strong>et</strong> peut-être aussi du souvenir <strong>de</strong> quelque grave injure à venger. Il dut<br />

1 Siacrius Romanorum rex Egidii filius, apud civitatem Sexonas quam quondam supra<br />

memoratus Egidius tenuerat, se<strong>de</strong>m habebat. Grégoire <strong>de</strong> Tours, II, 27.<br />

2 Voir sur Soissons les histoires <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te ville par Leroux <strong>et</strong> par Henri Martin <strong>et</strong> Jacob,<br />

auxquelles sont empruntés les renseignements contenus dans le texte.<br />

3 Leroux, Histoire <strong>de</strong> Soissons, t. I, p. 166.

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