27.06.2013 Views

clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

<strong>de</strong>ux ne fût obligé poser le pied sur le sol d’autrui, <strong>et</strong> que les négociations<br />

pussent avoir lieu en <strong>pays</strong> neutre, dans <strong><strong>de</strong>s</strong> conditions <strong>de</strong> sécurité <strong>et</strong> <strong>de</strong> dignité<br />

égales <strong>de</strong> part <strong>et</strong> d’autre1. On <strong>de</strong>vine quel fut l’obj<strong>et</strong> principal <strong>de</strong> l’entr<strong>et</strong>ien <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

<strong>de</strong>ux rois. Chacun désirait effacer le souvenir <strong><strong>de</strong>s</strong> dissentiments anciens ; il ne<br />

fut donc pas difficile <strong>de</strong> s’entendre. Mais un point plus délicat, <strong>et</strong> qui fut<br />

certainement abordé par Clovis, ce fut <strong>la</strong> question <strong>de</strong> l’alliance franco-burgon<strong>de</strong>2.<br />

Gon<strong>de</strong>baud n’ignorait pas qu’elle signifiait pour lui <strong>la</strong> rupture avec les Visigoths,<br />

ses alliés d’hier, <strong>et</strong> qu’elle l’entraînerait dans tous les hasards où voudrait<br />

s’aventurer <strong>la</strong> politique <strong>de</strong> son jeune <strong>et</strong> ambitieux parent. Il est possible qu’il<br />

n’ait pas cédé sur l’heure, <strong>et</strong> qu’il ait voulu prendre le temps <strong>de</strong> <strong>la</strong> réflexion ; ce<br />

qui est certain, c’est qu’en somme l’alliance fut conclue, <strong>et</strong> les Visigoths<br />

abandonnés par le roi <strong><strong>de</strong>s</strong> Burgon<strong><strong>de</strong>s</strong>. Vienne le jour où éc<strong>la</strong>tera l’inévitable<br />

conflit entre le jeune royaume catholique <strong>et</strong> <strong>la</strong> vieille monarchie <strong><strong>de</strong>s</strong> persécuteurs<br />

ariens, <strong>et</strong> le roi <strong><strong>de</strong>s</strong> Burgon<strong><strong>de</strong>s</strong> sera aux côtés <strong>de</strong> Clovis, comme un auxiliaire sûr<br />

<strong>et</strong> éprouvé.<br />

Un épiso<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’entrevue sur <strong>la</strong> Cure a été heureusement conservé par l’histoire.<br />

Il y avait alors, aux confins <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong>ux royaumes, un saint personnage du nom<br />

d’Eptadius, que Clovis désirait vivement attacher à <strong>la</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong>tinée <strong><strong>de</strong>s</strong> Francs. Il pria<br />

Gon<strong>de</strong>baud, dont c<strong>et</strong> homme était le suj<strong>et</strong>, d’abandonner ses droits sur lui, <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

perm<strong>et</strong>tre qu’il <strong>de</strong>vînt évêque d’Auxerre. Gon<strong>de</strong>baud, dit l’hagiographe, ne céda<br />

qu’à grand’peine, <strong>et</strong> comme quelqu’un à qui on <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> renoncer à un trésor<br />

; finalement, il ne put pas se dérober aux sollicitations <strong>de</strong> son nouvel allié, <strong>et</strong> il<br />

accorda l’autorisation <strong>de</strong>mandée. On eut plus <strong>de</strong> peine à vaincre <strong>la</strong> mo<strong><strong>de</strong>s</strong>tie du<br />

saint que <strong>la</strong> constance <strong>de</strong> son roi. Eptadius eut beau être élu à l’unanimité par le<br />

clergé <strong>et</strong> par le peuple, il ne voulut pas accepter le redoutable honneur qu’on lui<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong>tinait, <strong>et</strong> il s’enfuit dans les solitu<strong><strong>de</strong>s</strong> montagneuses du Morvan. Il fallut, pour<br />

le déci<strong>de</strong>r à revenir, que Clovis s’engageât à respecter ses scrupules <strong>et</strong> lui fournît<br />

les ressources pour rach<strong>et</strong>er les prisonniers qui avaient été faits pendant <strong>la</strong><br />

guerre. Alors le saint reparut, <strong>et</strong>, encouragé par le roi, reprit avec une énergie<br />

redoublée sa noble tâche <strong>de</strong> ré<strong>de</strong>mpteur <strong><strong>de</strong>s</strong> prisonniers. Il est bien probable que<br />

les <strong>de</strong>ux souverains secondèrent son action en se rendant spontanément l’un à<br />

l’autre les captifs qu’ils avaient faits : ainsi <strong>la</strong> religion fermait les p<strong>la</strong>ies qu’avait<br />

ouvertes <strong>la</strong> guerre, <strong>et</strong> effaçait <strong>la</strong> trace <strong><strong>de</strong>s</strong> dissentiments d’autrefois.<br />

C’est un chef-d’œuvre <strong>de</strong> <strong>la</strong> diplomatie <strong>de</strong> Clovis d’avoir gagné à son alliance <strong>la</strong><br />

Burgondie arienne, <strong>et</strong> toute frémissante encore <strong><strong>de</strong>s</strong> récentes humiliations qu’il<br />

venait <strong>de</strong> lui infliger. Peut-être, en <strong>la</strong> détachant <strong>de</strong> l’amitié <strong><strong>de</strong>s</strong> Visigoths, le roi<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> Francs pensait-il déjà à sa campagne d’Aquitaine, qu’il n’aurait pu<br />

entreprendre s’il avait eu sur ses f<strong>la</strong>ncs les Burgon<strong><strong>de</strong>s</strong> hostiles. Mais comment<br />

1 Le Vita Eptadii, par qui nous connaissons c<strong>et</strong>te entrevue, n’en marque pas <strong>la</strong> date ;<br />

mais d’aucune manière elle n’est postérieure à 507. Jahn, t. II, p. 109, qui ne cesse <strong>de</strong><br />

se distinguer par l’excessive faiblesse <strong>de</strong> sa critique, s’avise c<strong>et</strong>te fois <strong>de</strong> déployer une<br />

rigueur non moins excessive en contestant le témoignage du Vita Eptadii, mais ses<br />

raisons n’ont aucune valeur. Quant à <strong>la</strong> date, M. Levison (Zur Geschichte <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

Frankenkönigs, Clodowech) croit que le texte fait penser plutôt à 494, attendu que notre<br />

épiso<strong>de</strong> y est raconté avant un autre (ch. 11), qu’il croit <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te date. Mais, outre que ce<br />

<strong>de</strong>rnier point est fort discutable, le passage du Vita Eptadii nous montre que l’entrevue<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong>ux rois a lieu pacis mediante concordia, termes qui s’expliquent le mieux après une<br />

guerre.<br />

2 Eo<strong>de</strong>m tempore quo se ad fluvium. Quorandam, pacis mediante concordia, duorum<br />

regnum Burgundionum gentis <strong>et</strong> Francorum est conjuncta potentia. Vita Eptadii, dans<br />

Bouqu<strong>et</strong>, III, p. 380. Voir toutefois l’Appendice.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!