27.06.2013 Views

clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

suppliante, le roi ne put lui disputer plus longtemps <strong>la</strong> vie <strong><strong>de</strong>s</strong> malheureux pour<br />

qui elle l’implorait1.<br />

Et toutefois c<strong>et</strong> homme si puissant, c<strong>et</strong> arbitre <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong>tinées <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule, ce chef<br />

d’armée dont les victoires eurent pour théâtre Orléans <strong>et</strong> Angers, disparaît<br />

brusquement <strong>de</strong> <strong>la</strong> scène à partir <strong>de</strong> 468, <strong>et</strong> le silence gardé sur lui par les<br />

annalistes n’est plus une seille fois interrompu. Il revient terminer obscurément<br />

sa carrière à Tournai, dans c<strong>et</strong>te ville qui fut <strong>la</strong> première conquête <strong>de</strong> son grandpère<br />

Clodion, comme si une <strong><strong>de</strong>s</strong>tinée ironique lui avait fait refaire, en sens<br />

inverse, toutes les bril<strong>la</strong>ntes étapes qui l’avaient mené, par le chemin <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

gloire, <strong><strong>de</strong>s</strong> bords <strong>de</strong> l’Escaut à ceux <strong>de</strong> <strong>la</strong> Seine, puis à ceux <strong>de</strong> <strong>la</strong> Loire ! Que<br />

s’est-il donc passé pour qu’il ait tout reperdu, <strong>et</strong> que Clovis soit obligé <strong>de</strong><br />

reconquérir pied à pied le domaine où avait gouverné son père ? Sur ce point<br />

comme sur tant d’autres, l’historiographie n’a rien à répondre, mais <strong>la</strong> conjecture<br />

n’est pas interdite. Si l’on se souvient que Childéric n’avait en Gaule qu’une<br />

autorité <strong>de</strong> fait, <strong>et</strong> que <strong>la</strong> famille d’Ægidius y était entourée d’une gran<strong>de</strong><br />

popu<strong>la</strong>rité, on se figurera facilement comment les choses ont pu se passer.<br />

Ægidius <strong>la</strong>issait un fils, qui était peut-être en bas âge au moment <strong>de</strong> sa mort,<br />

mais à qui le père léguait l’héritage <strong>de</strong> sa gloire <strong>et</strong> <strong>de</strong> son influence. Après être<br />

resté dans l’ombre pendant les premières années, Syagrius aura profité <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

mort du comte Paul pour dresser en face du général barbare l’autorité d’un<br />

civilisé, d’un Romain, d’un fils d’Ægidius. Nous ne savons pas s’il y eut une lutte<br />

formelle entre les <strong>de</strong>ux rivaux, mais on serait porté à le croire. En eff<strong>et</strong>, lorsque<br />

les premières années du règne <strong>de</strong> Clovis nous montreront <strong>de</strong> nouveau le roi <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

Francs <strong>et</strong> le roi <strong><strong>de</strong>s</strong> Romains en présence, l’un apparaîtra refoulé jusqu’aux<br />

extrémités <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule franque, l’autre, installé en face <strong>de</strong> lui, à Soissons,<br />

semblera vouloir observer <strong>de</strong> là son redoutable adversaire. On dirait les positions<br />

stratégiques <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong>ux armées ennemies au len<strong>de</strong>main d’une bataille inégale,<br />

mais non décisive. Et l’on est tenté <strong>de</strong> croire que <strong>la</strong> lutte <strong>de</strong>vait avoir <strong>la</strong>issé <strong>de</strong><br />

singulières animosités du côté <strong><strong>de</strong>s</strong> vaincus, puisque Clovis, après avoir remporté<br />

un éc<strong>la</strong>tant triomphe sur le vieil ennemi, se fait livrer le malheureux fugitif au<br />

mépris <strong><strong>de</strong>s</strong> droits <strong>de</strong> l’hospitalité, <strong>et</strong> n’est satisfait que lorsqu’il a vu rouler sa tête<br />

sous <strong>la</strong> hache du bourreau.<br />

S’il en est ainsi, <strong>la</strong> tradition qui fait fuir Childéric <strong>de</strong>vant un rival romain ne serait<br />

pas tout à fait dénuée <strong>de</strong> vraisemb<strong>la</strong>nce : il suffirait d’y remp<strong>la</strong>cer le nom<br />

d’Ægidius par celui <strong>de</strong> son fils. Les treize années qui s’écoulent <strong>de</strong> 468 à 481<br />

offrent un espace <strong>de</strong> temps assez long pour embrasser tous les revirement<br />

racontés par <strong>la</strong> légen<strong>de</strong>. Les historiens qui tiennent à raconter quelque chose <strong>de</strong><br />

celle-ci seraient donc bien inspirés s’ils en cherchaient l’origine dans les re<strong>la</strong>tions<br />

hostiles que Childéric doit avoir eues avec le comte Syagrius. Mais nous<br />

n’insisterons pas sur ces hypothèses, qui peuvent être considérées tout au plus<br />

comme <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong>mi-probabilités. Lorsque Childéric <strong><strong>de</strong>s</strong>cendit dans <strong>la</strong> tombe, il y<br />

avait longtemps que ces combats avaient pris fin, <strong>et</strong> que le peuple <strong><strong>de</strong>s</strong> Francs<br />

jouissait <strong><strong>de</strong>s</strong> bienfaits <strong>de</strong> <strong>la</strong> paix2.<br />

Rentré au <strong>pays</strong> natal, dans son pa<strong>la</strong>is près <strong><strong>de</strong>s</strong> flots tranquilles <strong>de</strong> l’Escaut,<br />

Childéric n’eut pas <strong>la</strong> satisfaction <strong>de</strong> vieillir auprès <strong>de</strong> sa famille. Basine lui avait<br />

1 Vita sanctæ Genovefæ, VI, 24 (Kohler).<br />

2 Gentem Francorum prisca ætate resi<strong>de</strong>m feliciter in nova prælia concitastis, écrit<br />

Théodoric à Clovis dans Cassiodore, Variar., II, 41. Mandamus ut gentes quæ sub<br />

parentibus vestris longa pace floruerunt, subita non <strong>de</strong>beant concussione vastari. Le<br />

même au même, ibid., III, 4.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!