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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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donner un gouverneur indigène <strong>et</strong> catholique1, partageait, au reste, les passions<br />

religieuses <strong>de</strong> son peuple. Le nom <strong>de</strong> catholique lui faisait horreur ; par contre, il<br />

professait un grand attachement pour le culte arien, auquel il attribuait sa<br />

prospérité. On eût pu, dit un contemporain, le prendre pour un chef <strong>de</strong> secte<br />

plutôt que pour un chef <strong>de</strong> peuple2. La persécution cependant n’eut pas sous lui<br />

le caractère <strong>de</strong> brutalité féroce qui marqua celle <strong><strong>de</strong>s</strong> Vandales d’Afrique. On dirait<br />

plutôt qu’il chercha, dès les premiers jours, à donner le change sur ses vrais<br />

mobiles, <strong>et</strong> qu’il voulut avoir l’air <strong>de</strong> ne frapper que lorsqu’il était provoqué. Ce<br />

n’est pas qu’il reculât <strong>de</strong>vant l’effusion du sang : nous savons qu’il a immolé<br />

plusieurs évêques3, <strong>et</strong> une ancienne tradition locale nous apprend que saint<br />

Vidien <strong>de</strong> Riez périt pour <strong>la</strong> foi sous les coups <strong><strong>de</strong>s</strong> Goths4. D’autres furent<br />

envoyés en exil, comme Sidoine Apollinaire, comme Faustus <strong>de</strong> Riez, comme<br />

Crocus <strong>de</strong> Nîmes, comme Simplicius, dont on ignore le siège. Mais c’étaient là<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> mesures isolées. Ce qui est plus grave, c’est qu’Euric imagina <strong>de</strong> faire périr<br />

le culte catholique par l’extinction graduelle <strong>de</strong> <strong>la</strong> hiérarchie. Il défendit <strong>de</strong><br />

pourvoir aux sièges épiscopaux <strong>de</strong>venus vacants, <strong>et</strong> c’est ainsi qu’en peu<br />

d’années <strong>la</strong> tradition du sacerdoce fut interrompue à Bor<strong>de</strong>aux, à Périgueux, à<br />

Ro<strong>de</strong>z, à Limoges, à Javoulz, à Eauze, à Comminges, à Auch, <strong>et</strong> dans d’autres<br />

villes encore. A ceux qui restaient, toute communication fut interdite avec le<br />

<strong>de</strong>hors ; éternelle <strong>et</strong> illusoire précaution <strong>de</strong> tous les persécuteurs contre <strong>la</strong><br />

puissance <strong>de</strong> <strong>la</strong> solidarité catholique5 ! Les rangs du clergé inférieur<br />

s’éc<strong>la</strong>ircissaient rapi<strong>de</strong>ment, <strong>et</strong>, comme là aussi le recrutement était à peu près<br />

impossible, l’exercice du culte catholique fut arrêté dans une multitu<strong>de</strong><br />

d’endroits. Les églises abandonnées tombaient en ruinés, les toits s’effondraient,<br />

les épines envahissaient les sanctuaires ouverts à tous les vents, les troupeaux<br />

couchaient dans les vestibules <strong><strong>de</strong>s</strong> lieux saints, ou venaient brouter l’herbe au<br />

f<strong>la</strong>nc <strong><strong>de</strong>s</strong> autels profanés. Déjà les villes elles-mêmes se voyaient envahies par<br />

ces vi<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> mort, <strong>et</strong> les popu<strong>la</strong>tions, privées <strong>de</strong> leurs pasteurs <strong>et</strong> <strong>de</strong> leur<br />

culte, s’abandonnaient au désespoir6.<br />

1 G. Kurth, Les comtes d’Auvergne au sixième siècle (Bull. <strong>de</strong> l’Acad. Roy. <strong>de</strong> Belgique,<br />

1899, 11e livraison).<br />

2 Sidoine Apollinaire, Epist., VII, 6.<br />

3 Grégoire <strong>de</strong> Tours, II, 25.<br />

4 V. sur saint Vidien les Bol<strong>la</strong>ndistes du 8 septembre, t. III, p. 261.<br />

5 Sidoine Apollinaire, IV, 10.<br />

6 Le principal document pour l’histoire <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te persécution est <strong>la</strong> l<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> Sidoine<br />

Apollinaire, VII, 6, reproduite, avec quelques inexactitu<strong><strong>de</strong>s</strong>, par Grégoire <strong>de</strong> Tours, II, 25.<br />

Le persécuteur a eu plus d’un apologiste qui a trouvé p<strong>la</strong>isant, comme fait encore Dahn,<br />

Kœnige <strong>de</strong>r Germanen, V, p.101, <strong>de</strong> voir dans l’oppression <strong><strong>de</strong>s</strong> consciences catholiques<br />

une mesure <strong>de</strong> légitime défense contre l’opposition tenace <strong>et</strong> dangereuse que lei évêques<br />

catholiques faisaient partout au gouvernement. Est-il besoin d’ajouter que Dahn ne<br />

fournit pas <strong>la</strong> moindre preuve <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te opposition tenace <strong>et</strong> dangereuse ? Kaufmann,<br />

Deutsche Geschichte bis auf Karl <strong>de</strong>n Grossen, Leipzig 1881, t. II, p. 53, se gêne encore<br />

moins. Après un hymne en l’honneur <strong>de</strong> <strong>la</strong> modération <strong><strong>de</strong>s</strong> rois wisigoths, il dit que si<br />

Euric <strong>et</strong> A<strong>la</strong>ric ont exilé ou emprisonné plusieurs évêques <strong>et</strong> <strong>la</strong>issé leurs sièges vacants,<br />

ce fut parce que ces évêques conspiraient avec l’ennemi, ou du moins qu’ils en étaient<br />

soupçonnés. La légen<strong>de</strong> a fait <strong>de</strong> ces évêques <strong><strong>de</strong>s</strong> martyrs, mais il n’y a pas <strong>de</strong> doute<br />

qu’ils aient été <strong><strong>de</strong>s</strong> criminels politiques. Ni <strong>la</strong> bonté ni <strong>la</strong> sévérité ne parvenaient à<br />

dompter ces audacieux conspirateurs, <strong>et</strong>c. Et, encore une fois, pour étayer <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

accusations si graves <strong>et</strong> si précises, par l’ombre d’un texte 1 Il faut protester hautement<br />

contre <strong><strong>de</strong>s</strong> procédés <strong>de</strong> ce genre, qui auraient bientôt fait <strong>de</strong> transformer l’histoire en<br />

roman. Cf. Malnory, Saint Césaire, p. 46, qui, tout en se montrant d’une certaine timidité

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