clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée
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admis plus tard à partager l’héritage paternel au même titre que les trois fils <strong>de</strong><br />
Clotil<strong>de</strong>, <strong>et</strong> sa part ne fut inférieure à aucune autre. L’histoire a gardé son<br />
souvenir ; mais c’est <strong>la</strong> poésie popu<strong>la</strong>ire surtout qui s’est montrée généreuse<br />
envers lui, car elle a tissé autour <strong>de</strong> son nom toute une couronne <strong>de</strong> fictions<br />
épiques. Sous le nom <strong>de</strong> Théodoric le Franc1, qui lui a été donné pour le<br />
distinguer <strong>de</strong> Théodoric <strong>de</strong> Vérone, il est resté un <strong><strong>de</strong>s</strong> héros favoris <strong>de</strong> l’épopée<br />
alleman<strong>de</strong>, <strong>et</strong> tout le moyen âge s’est passionné pour ses dramatiques<br />
aventures.<br />
Devenu, par ses conquêtes, l’un <strong><strong>de</strong>s</strong> arbitres <strong>de</strong> l’Europe, Clovis voulut avoir pour<br />
épouse une personne <strong>de</strong> sang royal. Étant <strong>de</strong>puis quelque temps, à ce qu’il<br />
parait, en re<strong>la</strong>tions assez suivies avec les Burgon<strong><strong>de</strong>s</strong>, <strong>et</strong> rêvant peut-être dès lors<br />
<strong>de</strong> se faire <strong>de</strong> ce peuple un allié contre les Visigoths, il arrêta son choix sur une<br />
jeune princesse <strong>de</strong> <strong>la</strong> cour <strong>de</strong> Genève, dont ses ambassa<strong>de</strong>urs lui avaient plus<br />
d’une fois vanté les charmes. Comme le mariage du roi franc avec Clotil<strong>de</strong> a pris,<br />
par ses conséquences, une p<strong>la</strong>ce capitale dans <strong>la</strong> vie <strong>de</strong> Clovis <strong>et</strong> dans l’histoire<br />
<strong><strong>de</strong>s</strong> Francs, il importe d’en bien connaître les circonstances, d’autant plus que nul<br />
autre épiso<strong>de</strong> <strong>de</strong> sa vie n’a été plus défiguré par <strong>la</strong> légen<strong>de</strong> popu<strong>la</strong>ire.<br />
Les Burgon<strong><strong>de</strong>s</strong> étaient alors partagés en <strong>de</strong>ux royaumes sous l’autorité <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />
frères, seuls survivants <strong><strong>de</strong>s</strong> quatre fils du roi Gundioch. L’aîné s’appe<strong>la</strong>it<br />
Gon<strong>de</strong>baud <strong>et</strong> régnait à Vienne ; l’autre, Go<strong>de</strong>gisil, avait pour rési<strong>de</strong>nce<br />
Genève2. Un troisième frère, du nom <strong>de</strong> Godomar, était mort sans postérité ; un<br />
quatrième, Chilpéric, qui avait été roi <strong>de</strong> Lyon, avait également disparu <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />
scène au moment où s’ouvre c<strong>et</strong>te histoire. C’est ce <strong>de</strong>rnier, père <strong>de</strong> <strong>la</strong> femme<br />
<strong>de</strong> Clovis, qui doit nous arrêter quelques instants.<br />
Chilpéric, roi <strong>de</strong> Lyon, <strong>et</strong> revêtu par l’Empire du vain <strong>et</strong> fastueux titre <strong>de</strong> maître<br />
<strong><strong>de</strong>s</strong> milices3, n’a guère <strong>la</strong>issé <strong>de</strong> trace dans l’histoire <strong>de</strong> ces temps obscurs. Il<br />
sert <strong>de</strong> peu d’entendre <strong><strong>de</strong>s</strong> rhéteurs proc<strong>la</strong>mer sa puissance <strong>et</strong> sa bonté4, mais il<br />
est plus intéressant <strong>de</strong> voir l’ascendant qu’a sur lui sa femme Carétène5. C<strong>et</strong>te<br />
chrétienne accomplie, épouse catholique d’un monarque arien6, donnait sur le<br />
trône l’exemple <strong>de</strong> toutes les vertus7, <strong>et</strong> était auprès <strong>de</strong> son mari <strong>la</strong> patronne<br />
<strong><strong>de</strong>s</strong> opprimés8. Chilpéric lui permit d’élever selon le rite catholique les <strong>de</strong>ux filles<br />
nées <strong>de</strong> leur alliance : Clotil<strong>de</strong> <strong>et</strong> Sæ<strong>de</strong>leuba9, qui porte aussi le nom <strong>de</strong><br />
Chrona10. Lui-même, à partir <strong>de</strong> 480, on ne le voit plus participer à aucun acte<br />
public, ce qui perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> croire qu’il sera mort vers c<strong>et</strong>te date11.<br />
1 Hugdi<strong>et</strong>rich. Sur le nom <strong>de</strong> Hug, porté par les Francs dans les chants popu<strong>la</strong>ires <strong>de</strong><br />
leurs voisins, voir l’Histoire poétique <strong><strong>de</strong>s</strong> Mérovingiens, p. 528.<br />
2 Dès 494 nous trouvons Go<strong>de</strong>gisil à Genève : Genovæ ubi Godigisclus germanus regis<br />
<strong>la</strong>rem statuerat, dit le Vita Epiphanii d’Ennodius. Dom Bouqu<strong>et</strong>, III, p. 371.<br />
3 Sidoine Apollinaire, Epist., V, 6.<br />
4 Virum non minus bonitate, quam potestate præstantem. Id., ibid., VII, 7.<br />
5 Fauriel, I, 318, l’appelle Agrippine, par une distraction pardonnable pour qui connaît le<br />
<strong>la</strong>ngage prétentieux <strong>et</strong> tourmenté <strong>de</strong> sa source, qui est Sidoine Apollinaire, Epist., V, 7,<br />
où <strong>la</strong> femme <strong>de</strong> Chilpéric est tour à tour <strong>la</strong> Tanaquil <strong>de</strong> ce Lucumon, l’Agrippine <strong>de</strong> ce<br />
Germanicus.<br />
6 Leb<strong>la</strong>nt, Inscriptions chrétiennes <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule, n° 31, t. I, p. 69.<br />
7 Sidoine Apollinaire, Epist., VI, 12, <strong>et</strong> Leb<strong>la</strong>nt, l. c.<br />
8 Sidoine Apollinaire, ibid., V, 7.<br />
9 Frédégaire, III, 17.<br />
10 Grégoire <strong>de</strong> Tours, II, 28.<br />
11 Binding, p. 114.