clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée
clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée
clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
Clovis, qui semble p<strong>la</strong>cer à Tours le baptême <strong>de</strong> ce monarque1. Ce texte<br />
mériterait d’être pris en sérieuse considération, si les termes en étaient assez<br />
précis pour autoriser c<strong>et</strong>te explication <strong>et</strong> <strong>la</strong> rendre décisive ; mais on en a donné<br />
d’autres interprétations qui nous paraissent aussi bien justifiées«, <strong>et</strong> perm<strong>et</strong>tent<br />
<strong>de</strong> le concilier avec l’opinion traditionnelle fixant à Reims le lieu du baptême <strong>de</strong><br />
Clovis2. C<strong>et</strong>te opinion, il est vrai, ne se manifeste pas d’une façon formelle<br />
antérieurement au septième siècle3 ; est-ce une raison pour en conclure qu’elle a<br />
été inventée seulement à c<strong>et</strong>te date, <strong>et</strong> qu’elle est dépourvue <strong>de</strong> toute valeur<br />
historique ? Si Grégoire <strong>de</strong> Tours ne désigne point <strong>la</strong> ville où fut baptisé Clovis <strong>et</strong><br />
ne fait pas mention <strong>de</strong> Reims dans son récit, toutes les circonstances qu’il<br />
indique concourent implicitement à faire attribuer à Reims c<strong>et</strong>te scène du<br />
baptême, dont il nous trace un si poétique tableau4. Et <strong>la</strong> chose est si vraie, que<br />
ceux-là mêmes qui veulent voir en c<strong>et</strong>te attribution une simple invention du<br />
septième siècle lui donnent pour origine une conjecture fondée sur le texte <strong>de</strong><br />
Grégoire <strong>de</strong> Tours5. Le silence <strong>de</strong> c<strong>et</strong> historien serait au contraire inexplicable,<br />
dans le cas où le baptême aurait eu lieu à Tours. Comment, en sa qualité<br />
d’évêque <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te ville, aurait-il pu l’ignorer, lui qui cherchait toujours, en<br />
écrivain consciencieux, à s’instruire <strong>de</strong> tous les faits <strong>et</strong> à recourir à toutes les<br />
sources d’informations6 ? Il pouvait encore interroger <strong><strong>de</strong>s</strong> témoins<br />
contemporains, <strong>et</strong> l’événement n’était pas assez ancien pour qu’on en ait perdu<br />
le souvenir. Et s’il en avait eu connaissance, s’il savait qu’il s’était passé dans sa<br />
ville épiscopale, comment comprendre qu’il n’ait point fait à c<strong>et</strong>te circonstance <strong>la</strong><br />
moindre allusion ?<br />
C’est à tort aussi que l’on refuse toute autorité à <strong>la</strong> Vie <strong>de</strong> saint Vaast, qui p<strong>la</strong>ce<br />
très n<strong>et</strong>tement le baptême à Reims, <strong>et</strong> dont le témoignage a été fréquemment<br />
invoqué à ce suj<strong>et</strong>. Sans doute c<strong>et</strong>te vie a été écrite vers 642, à une date<br />
notablement postérieure aux événements qu’elle re<strong>la</strong>te ; mais elle paraît<br />
s’appuyer en certains points sur d’<strong>antique</strong>s traditions locales. Il en est ainsi pour<br />
l’épiso<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> guérison d’un aveugle opérée par saint Vaast près du vil<strong>la</strong>ge <strong>de</strong><br />
Rilly, après qu’il eut franchi <strong>la</strong> rivière d’Aisne en compagnie <strong>de</strong> Clovis, in pago<br />
Vongise, ad locum qui dicitur Gran<strong>de</strong>ponte, juxta vil<strong>la</strong>m Reguliacam, super<br />
fluvium Axona. C’était bien une tradition du <strong>pays</strong> ; une église avait été élevée<br />
dans c<strong>et</strong> endroit, en souvenir du miracle, <strong>et</strong> elle existait encore au onzième<br />
1 Dans c<strong>et</strong>te l<strong>et</strong>tre adressée à Clodoswin<strong>de</strong>, reine <strong><strong>de</strong>s</strong> Lombards, pour l’exhorter à<br />
convertir, à l’exemple <strong>de</strong> Clotil<strong>de</strong>, son époux Alboin à <strong>la</strong> religion catholique, Nizier<br />
(évêque <strong>de</strong> Trêves <strong>de</strong>puis 525), dit en par<strong>la</strong>nt <strong>de</strong> Clovis : Cum ess<strong>et</strong> homo astutissimus,<br />
noluit adquiescere, antequam vera agnoscer<strong>et</strong>. Cum ista... probata cognovit, humilis ad<br />
domini Martini limina cecidit, <strong>et</strong> baptizare se sine mora promisit. Monumenta Germaniæ,<br />
Epistolæ, t. I, p. 122 ; Recueil <strong><strong>de</strong>s</strong> hist. <strong>de</strong> <strong>la</strong> France, t. IV, p. 77.<br />
2 Voy. l’explication proposée par Suysken, AA. SS. Boll., octobre, t. I, p. 83.<br />
3 Elle est formulée pour <strong>la</strong> première fois dans <strong>la</strong> Vie <strong>de</strong> saint Vaast <strong>et</strong> dans <strong>la</strong> Chronique<br />
dite <strong>de</strong> Frédégaire. Ces <strong>de</strong>ux ouvrages ont été composés vers 612 (Krusch, l. cit., p. 440<br />
; G. Kurth, L’histoire <strong>de</strong> Clovis, d’après Frédégaire, dans <strong>la</strong> Revue <strong><strong>de</strong>s</strong> questions<br />
historiques, t. XLVII (1890), p. 62.<br />
4 Historia Francorum, l. II, chap. XXXI.<br />
5 Krusch, l. cit., p. 442.<br />
6 Sur <strong>la</strong> valeur <strong>de</strong> Grégoire <strong>de</strong> Tours comme historien, voyez le savant travail <strong>de</strong> M.<br />
Kurth sur les Sources <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong> Clovis dans Grégoire <strong>de</strong> Tours, dans <strong>la</strong> Revue <strong><strong>de</strong>s</strong><br />
questions historiques, t. XLIV (1888), p. 386 ; cf. G. Monod, Étu<strong><strong>de</strong>s</strong> critiques sur les<br />
sources <strong>de</strong> l’histoire mérovingienne.