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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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aux armes dès les premières explications. C’est par voie d’arbitrage qu’il faut<br />

trancher vos débats avec vos proches. Votre querelle serait un opprobre pour<br />

moi-même. Je ne veux pas d’une lutte d’où l’un <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>ux peut sortir écrasé ;<br />

j<strong>et</strong>ez ces armes que vous tournez en réalité contre moi. Je vous parle comme un<br />

père <strong>et</strong> comme un ami : celui <strong>de</strong> vous qui mépriserait mes exhortations doit<br />

savoir qu’il aura à compter avec moi <strong>et</strong> avec tous mes alliés. Je vous exhorte<br />

donc comme j’ai exhorté A<strong>la</strong>ric : Ne <strong>la</strong>issez pas <strong>la</strong> malignité d’autrui semer <strong>la</strong><br />

zizanie entre vous <strong>et</strong> lui ; perm<strong>et</strong>tez à vos amis communs <strong>de</strong> régler à l’amiable<br />

vos différends, <strong>et</strong> rapportez-vous-en à eux <strong>de</strong> vos intérêts. Celui-là n’est certes<br />

pas un bon conseiller qui vent entraîner l’un ou l’autre <strong>de</strong> vous dans <strong>la</strong> ruine1.<br />

Ces <strong>de</strong>rnières paroles, <strong>et</strong> les autres que nous avons soulignées, ne <strong>la</strong>issent pas<br />

<strong>de</strong> doute sur <strong>la</strong> personnalité visée par Théodoric : c’est, à ne pas s’y tromper,<br />

l’empereur dont il s’agit2. La démarche du roi d’Italie, complétée <strong>et</strong> précisée par<br />

les instructions verbales <strong>de</strong> ses ambassa<strong>de</strong>urs, était une lutte ouverte <strong>et</strong><br />

acharnée contre l’influence byzantine auprès <strong>de</strong> Clovis. On m<strong>et</strong>tait ce <strong>de</strong>rnier en<br />

<strong>de</strong>meure <strong>de</strong> se prononcer entre Ravenne <strong>et</strong> Constantinople, entre le mon<strong>de</strong><br />

barbare où il avait ses voisins, ses parents, ses amis, <strong>et</strong> le mon<strong>de</strong> romain où il ne<br />

rencontrait qu’un empereur perfi<strong>de</strong> <strong>et</strong> intrigant. Toute l’éloquence <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

ambassa<strong>de</strong>urs dut tendre à rompre les liens qui se nouaient, à persua<strong>de</strong>r à<br />

Clovis que ses intérêts <strong>et</strong> sa gloire le détournaient également d’une pareille<br />

alliance.<br />

Ce fut en vain. L’ambassa<strong>de</strong> venait trop tard, <strong>et</strong> elle ne servit qu’à précipiter les<br />

événements. Peut-être n’était-elle pas encore rentrée au pa<strong>la</strong>is <strong>de</strong> Ravenne que<br />

l’armée franque <strong>et</strong> l’armée burgon<strong>de</strong> s’ébran<strong>la</strong>ient chacune <strong>de</strong> son côté. Quand<br />

saint Avitus revint dans sa ville épiscopale, qu’il avait quittée pour aller célébrer<br />

une fête religieuse dans son diocèse, l’héritier <strong>de</strong> <strong>la</strong> couronne burgon<strong>de</strong>, à son<br />

grand étonnement, était déjà parti avec ses soldats3. C<strong>et</strong>te précipitation était<br />

commandée par les circonstances : une fois <strong>la</strong> lutte décidée, il importait <strong>de</strong><br />

fondre ensemble sur l’ennemi commun avant que Théodoric eût le temps <strong>de</strong><br />

venir à son secours.<br />

L’explosion <strong><strong>de</strong>s</strong> hostilités prit les Visigoths au dépourvu. Ce peuple, déshabitué<br />

par une longue paix <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>la</strong>beurs <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> périls <strong>de</strong> <strong>la</strong> guerre, avait perdu, comme le<br />

craignait Théodoric, <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te valeur qui le rendait si redoutable aux Romains <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

générations précé<strong>de</strong>ntes. Il souffrait aussi d’une gêne financière à <strong>la</strong>quelle il<br />

avait cru porter remè<strong>de</strong> en ém<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> <strong>la</strong> monnaie altérée4. L’arrivée <strong><strong>de</strong>s</strong> Francs<br />

causa une espèce d’affolement. Pendant qu’on dépêchait en toute hâte un<br />

message à Théodoric pour le prévenir du danger <strong>et</strong> le supplier d’accourir sans<br />

r<strong>et</strong>ard5, les agents fiscaux battaient tout le royaume pour faire rentrer dans les<br />

caisses <strong>de</strong> l’État le plus d’argent possible, <strong>et</strong> les recruteurs officiels faisaient<br />

prendre les armes à tout ce qui était en état <strong>de</strong> les porter. Même <strong><strong>de</strong>s</strong> religieux<br />

1 Cassiodore, Variar., III, 4.<br />

2 Il faut se gar<strong>de</strong>r <strong>de</strong> supposer, avec Junghans, p. 84, <strong>et</strong> avec W. Schultze, Das<br />

Merovingische Frankenreich, p. 72, que Théodoric a voulu faire allusion aux menées du<br />

clergé catholique. C’est d’abord, nous l’avons vu, faire une hypothèse téméraire que<br />

d’adm<strong>et</strong>tre sans preuve les prétendues menées <strong>de</strong> l’épiscopat <strong><strong>de</strong>s</strong> Gaules ; c’est ensuite<br />

supposer Théodoric très ma<strong>la</strong>droit que <strong>de</strong> lui attribuer <strong><strong>de</strong>s</strong> attaques aussi âpres contre les<br />

conseillers <strong>de</strong> Clovis au moment où il s’agissait <strong>de</strong> le gagner.<br />

3 S. Avitus, Epist., 45 (40).<br />

4 S. Avitus, Epist., 87 (78).<br />

5 Procope, De Bello gothico, I, 12.

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