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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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pour l’historien <strong>de</strong> pouvoir se figurer ce roi au repos dans une <strong>de</strong> ses vastes<br />

exploitations agricoles, <strong>et</strong> menant, loin <strong><strong>de</strong>s</strong> étroites <strong>et</strong> sombres enceintes <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

villes romaines, c<strong>et</strong>te existence <strong>de</strong> grand propriétaire rural, qui, jusqu’à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> dynastie, resta celle <strong>de</strong> ses <strong><strong>de</strong>s</strong>cendants.<br />

Le conquérant ne s’attarda pas, d’ailleurs, dans les jouissances du repos, <strong>et</strong> il<br />

continua le cours <strong>de</strong> ses succès aussitôt après <strong>la</strong> prise <strong>de</strong> Soissons. Il ne paraît<br />

pas qu’il ait rencontré beaucoup <strong>de</strong> résistance dans le reste du <strong>pays</strong>. Syagrius<br />

vaincu, il n’y avait plus <strong>de</strong> force capable <strong>de</strong> lui tenir tête. Les villes gauloises qui<br />

n’avaient pas reconnu l’autorité du fils d’Ægidius ne pouvaient guère, même si<br />

elles l’avaient voulu, fermer leurs portes à son vainqueur : dans c<strong>et</strong>te lutte<br />

inégale, elles étaient condamnées à succomber. Au surplus, comme nous l’avons<br />

déjà dit, l’autorité <strong><strong>de</strong>s</strong> évêques y était gran<strong>de</strong>, <strong>et</strong> l’on a pu <strong>de</strong>viner, par l’attitu<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> saint Remi vis-à-vis <strong><strong>de</strong>s</strong> Francs, les dispositions <strong>de</strong> tous ses frères dans<br />

l’épiscopat. Tout perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> croire qu’en général les évêques <strong>de</strong> <strong>la</strong> secon<strong>de</strong><br />

Belgique, à l’exemple <strong>de</strong> leur métropolitain, reconnurent dans Clovis le légitime<br />

souverain <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te province abandonnée. Ils pouvaient beaucoup pour faciliter sa<br />

prise <strong>de</strong> possession <strong>et</strong> pour diminuer les souffrances qui étaient, en ce temps, le<br />

résultat ordinaire d’un changement <strong>de</strong> domination. D’un côté, ils empêchèrent les<br />

résistances inutiles, qui n’auraient servi qu’à exaspérer le vainqueur ; <strong>de</strong> l’autre,<br />

ils déterminèrent ce <strong>de</strong>rnier à se présenter aux popu<strong>la</strong>tions plutôt comme un ami<br />

que comme un conquérant. C<strong>et</strong>te intervention <strong>de</strong> l’épiscopat, qui n’est pas<br />

explicitement attestée par l’histoire, est c<strong>la</strong>irement indiquée par toute <strong>la</strong> situation<br />

qui résulta <strong>de</strong> <strong>la</strong> conquête : on peut y remonter comme <strong>de</strong> l’eff<strong>et</strong> à <strong>la</strong> cause, <strong>et</strong><br />

l’induire avec une espèce <strong>de</strong> certitu<strong>de</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> résultats qu’elle seule a pu produire.<br />

Ce<strong>la</strong> ne veut pas dire que l’occupation du <strong>pays</strong> eut lieu sans aucune violence.<br />

Toute expédition militaire, tout dép<strong>la</strong>cement <strong>de</strong> force armée était, à c<strong>et</strong>te époque<br />

; un r<strong>et</strong>our momentané à <strong>la</strong> barbarie <strong>la</strong> plus atroce. Les guerriers, à l’heure du<br />

combat <strong>et</strong> du pil<strong>la</strong>ge, n’étaient plus dans <strong>la</strong> main <strong>de</strong> leurs chefs ; il fal<strong>la</strong>it, si je<br />

puis ainsi parler, leur lâcher <strong>la</strong> bri<strong>de</strong> pour rester maître d’eux. Longtemps après<br />

<strong>la</strong> conquête, les armées franques gardèrent ce caractère primitif : elles ne<br />

pouvaient pas traverser leur propre <strong>pays</strong> sans le piller cruellement, <strong>et</strong> ne<br />

faisaient aucune différence entre les provinces qu’elles <strong>de</strong>vaient défendre <strong>et</strong><br />

celles qu’elles al<strong>la</strong>ient attaquer1.<br />

On peut donc juger <strong>de</strong> quelle manière <strong>de</strong>vait se comporter l’armée <strong>de</strong> Clovis,<br />

lorsqu’elle traversait en triomphe les contrées qui s’humiliaient <strong>de</strong>vant le roi son<br />

maître. Pour elle, les distinctions que l’adroite diplomatie <strong><strong>de</strong>s</strong> évêques <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> rois<br />

faisait entre <strong>pays</strong> conquis <strong>et</strong> <strong>pays</strong>, rallié n’existaient pas : dans son<br />

outrecuidance barbare, elle se déchaînait avec une espèce d’ivresse contre tout<br />

ce qui ne pouvait pas résister, chaque fois qu’elle ne se heurtait pas à une<br />

défense expresse ou à une intervention personnelle <strong>de</strong> son roi. Et celui-ci ne<br />

pouvait intervenir à tout propos, au risque d’user bien vite un pouvoir qui<br />

reposait surtout sur sa popu<strong>la</strong>rité. Il <strong>de</strong>vait fermer les yeux sur beaucoup<br />

d’excès, s’il vou<strong>la</strong>it être en état d’empêcher les plus criants.<br />

Si l’on tient compte <strong>de</strong> ce qui vient d’être dit, on ne sera nullement étonné <strong>de</strong><br />

l’épiso<strong>de</strong> que nous allons raconter : il apparaîtra plutôt comme l’indice<br />

caractéristique <strong>de</strong> <strong>la</strong> situation complexe qui fut celle <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule romaine à c<strong>et</strong>te<br />

1 Grégoire <strong>de</strong> Tours, IV, 47-50 ; id., VIII, 30 ; Vita sancti Galli, dans M. G. H. Scriptores,<br />

II, p. 18 ; Vita sancti Medardi, c. 21, dans M. G. H. Auctor. Antiquiss. t. IV, II, p. 70 ;<br />

Procope, De bello gothico, II, 25 ; Marculf, Formul., I, 33.

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