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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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amifié <strong>de</strong> <strong>la</strong> manière qu’on vient <strong>de</strong> voir. Le peuple possè<strong>de</strong> maintenant une<br />

explication satisfaisante <strong>de</strong> l’avènement <strong>de</strong> Clovis au trône <strong><strong>de</strong>s</strong> Ripuaires. Certes,<br />

l’épopée aurait pu s’arrêter ici. Mais, une fois en voie d’explication, elle va<br />

jusqu’au bout. Elle a entrevu une possibilité, c’est que l’artificieux Clovis, en vue<br />

d’amener le dénouement dont il <strong>de</strong>vait profiter, ait lui-même provoqué le crime<br />

<strong>de</strong> Chlodéric. Et voilà l’histoire qui entre dans une nouvelle phase, racontant<br />

comment le roi <strong><strong>de</strong>s</strong> Saliens arme un fils contre son père, <strong>et</strong> les pousse tous les<br />

<strong>de</strong>ux dans <strong>la</strong> tombe pour hériter <strong>de</strong> l’un <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’autre. Que Clovis soit <strong>de</strong> <strong>la</strong> sorte<br />

transformé en un perfi<strong>de</strong> <strong>et</strong> sanguinaire intrigant, ce<strong>la</strong> importe peu. Les milieux<br />

où se sont é<strong>la</strong>borées ces légen<strong><strong>de</strong>s</strong> étaient trop barbares pour se rendre compte<br />

qu’ils le diminuaient en le peignant sous <strong>de</strong> telles couleurs ; ils admiraient <strong>la</strong> ruse<br />

quand elle avait réussi, <strong>et</strong> estimaient doublement le héros qui joignait au<br />

courage intrépi<strong>de</strong> les ressources d’un esprit ingénieux <strong>et</strong> délié. Ne nous étonnons<br />

donc pas <strong>de</strong> <strong>la</strong> physionomie atroce que nous trouvons à Clovis chaque fois que<br />

nous le rencontrons dans les récits popu<strong>la</strong>ires : ses admirateurs barbares l’ont<br />

fait à leur image.<br />

Si maintenant on veut bien accor<strong>de</strong>r à <strong>la</strong> critique le droit qu’on a <strong>la</strong>issé pendant<br />

quatorze siècles à <strong>la</strong> poésie, <strong>et</strong> lui perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> reconstituer à son tour l’histoire<br />

telle qu’elle a dû se passer, nous formulerons nos conclusions comme suit. Le fait<br />

historique j<strong>et</strong>é en pâture aux imaginations <strong><strong>de</strong>s</strong> barbares du sixième siècle, c’est<br />

l’assassinat mystérieux du roi Sigebert dans <strong>la</strong> forêt <strong>de</strong> Buchonie, qui eut lieu<br />

vraisemb<strong>la</strong>blement dans l’automne <strong>de</strong> 507. A <strong>la</strong> nouvelle <strong>de</strong> sa mort, son fils<br />

Chlodéric, qui, peut-être, était encore occupé au fond <strong>de</strong> l’Aquitaine à combattre<br />

les Visigoths, accourut à <strong>la</strong> hâte ; mais il périt lui-même au milieu <strong><strong>de</strong>s</strong> troubles<br />

qu’avait provoqués <strong>la</strong> mort <strong>de</strong> son père. Ce double meurtre rendait vacant le<br />

trône <strong><strong>de</strong>s</strong> Ripuaires, <strong>et</strong> Clovis se présenta pour recueillir <strong>la</strong> succession <strong>de</strong> ses<br />

<strong>de</strong>ux parents. Comme il était le plus proche, peut-être le seul héritier légitime,<br />

qu’il avait assez <strong>de</strong> puissance pour s’imposer, <strong>et</strong> que les Ripuaires étaient<br />

honorés <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre à leur tête un souverain si illustre, il fut acc<strong>la</strong>mé avec<br />

enthousiasme, <strong>et</strong> élevé sans r<strong>et</strong>ard sur le pavois. Le trône <strong>de</strong> Cologne sera<br />

<strong>de</strong>venu vacant vers 508, <strong>et</strong> <strong>la</strong> nouvelle que Clovis en aura reçue à Bor<strong>de</strong>aux ne<br />

doit pas avoir contribué pour peu à son brusque r<strong>et</strong>our vers le Nord.<br />

Qu’on ne s’étonne pas <strong>de</strong> <strong>la</strong> hardiesse <strong>de</strong> ces conjectures, <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’énormité <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

amputations qu’avec le scalpel <strong>de</strong> <strong>la</strong> critique nous venons <strong>de</strong> faire au récit<br />

traditionnel. Il faut s’être rendu compte, par une étu<strong>de</strong> assidue, <strong><strong>de</strong>s</strong> prodigieuses<br />

altérations que l’esprit épique fait subir à l’histoire, pour reconnaître que nous<br />

n’avons pas abusé <strong>de</strong> <strong>la</strong> liberté <strong>de</strong> l’hypothèse. Dans l’histoire poétique <strong>de</strong><br />

Gon<strong>de</strong>baud <strong>et</strong> <strong>de</strong> Clotil<strong>de</strong>, lé résidu historique représente vis-à-vis <strong>de</strong> <strong>la</strong> légen<strong>de</strong><br />

une proportion plus faible encore, <strong>et</strong> mil ne se serait avisé d’aller dans <strong>la</strong> voie<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> négations aussi loin que les faits constatés nous ont menés presque à notre<br />

insu.<br />

L’annexion du royaume <strong><strong>de</strong>s</strong> Ripuaires couronnait <strong>la</strong> carrière conquérante du fils<br />

<strong>de</strong> Childéric. Maintenant, tous les peuples <strong>de</strong> race franque se trouvaient réunis<br />

sous sa loi. Les bases étaient j<strong>et</strong>ées d’un vaste empire qui, ayant <strong>la</strong> Gaule pour<br />

centre, rayonnerait peu à peu sur le reste <strong>de</strong> l’Europe occi<strong>de</strong>ntale <strong>et</strong> centrale. En<br />

attendant, Clovis se trouvait être le roi le plus puissant <strong>de</strong> <strong>la</strong> chrétienté. Son<br />

autorité était reconnue <strong>de</strong>puis le Wahal jusqu’aux Pyrénées. Il était parvenu à<br />

faire ce que l’Empire avait en vain essayé à tant <strong>de</strong> reprises : imposer une même<br />

autorité à <strong>la</strong> Gaule <strong>et</strong> à <strong>la</strong> Germanie. Ce fut un résultat immense, car l’action <strong>et</strong><br />

<strong>la</strong> réaction <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux <strong>pays</strong> l’un sur l’autre, pendant les premiers siècles, c’est,<br />

en quelque sorte, le meilleur <strong>de</strong> leur histoire <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong> l’Europe. Leur

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