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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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<strong>de</strong> toute chose, se préoccupant moins <strong><strong>de</strong>s</strong> intérêts <strong>de</strong> l’Empire que <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

satisfaction <strong>de</strong> ses passions barbares.<br />

Pour une nature si hautaine, c’était une affaire d’honneur <strong>de</strong> réprimer les<br />

compatriotes qui avaient osé envahir l’Empire qu’il servait. Des haines <strong>de</strong> race <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong> famille1, les plus vivaces <strong>de</strong> toutes, étaient le seul souvenir qu’il gardât <strong>de</strong><br />

son ancienne patrie : il vou<strong>la</strong>it à tout prix humilier Marcomir <strong>et</strong> Sunno, <strong>et</strong> il se<br />

sentait assez fort pour l’entreprendre. Ainsi, <strong>de</strong> plus en plus, <strong>la</strong> lutte <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

civilisation contre <strong>la</strong> barbarie tendait à n’être plus qu’une lutte personnelle entre<br />

barbares, lés uns intéressés à maintenir l’Empire parce qu’ils le dominaient, les<br />

autres à le détruire pour s’emparer <strong>de</strong> son héritage. Arbogast passa le Rhin dès<br />

l’année suivante (389), <strong>et</strong> ne consentit à faire <strong>la</strong> paix avec les Francs qu’à <strong>la</strong><br />

condition qu’ils restitueraient le butin, <strong>et</strong> qu’ils livreraient à l’Empire les fauteurs<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> guerre. Il formu<strong>la</strong> ces conditions, à ce qu’il paraît, dans une entrevue qu’il<br />

eut avec Marcomir <strong>et</strong> Sunno, <strong>et</strong> à <strong>la</strong> suite <strong>de</strong> <strong>la</strong>quelle ces <strong>de</strong>ux chefs consentirent<br />

à lui livrer <strong><strong>de</strong>s</strong> otages. Selon l’habitu<strong>de</strong> barbare, un banqu<strong>et</strong> couronna les<br />

négociations, <strong>et</strong> l’on trinqua fraternellement2. La fortune <strong>de</strong> leur compatriote<br />

romanisé était pour les <strong>de</strong>ux princes l’obj<strong>et</strong> d’une admiration qui n’était pas sans<br />

quelque respect ; ils s’informèrent <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> choses ; ils lui parlèrent aussi<br />

<strong>de</strong> ce grand évêque <strong>de</strong> Mi<strong>la</strong>n nommé Ambroise, dont le nom était venu à eux sur<br />

les ailes <strong>de</strong> <strong>la</strong> légen<strong>de</strong>. Le connais-tu ? dirent-ils à Arbogast. — Oui répondit-il, je<br />

suis son ami, <strong>et</strong> je dîne fréquemment avec lui. — Alors nous savons, reprirent<br />

ses interlocuteurs, le secr<strong>et</strong> <strong>de</strong> tes victoires, puisque tu es l’ami <strong>de</strong> l’homme qui<br />

dit au soleil : Arrête-toi, <strong>et</strong> qui le fait s’arrêter3.<br />

Après sa victoire, Arbogast revint passer l’hiver à Trèves, d’où il pouvait<br />

surveiller <strong>de</strong> près les allures <strong><strong>de</strong>s</strong> Francs. Il faut croire qu’elles ne lui donnèrent<br />

aucun suj<strong>et</strong> d’inquiétu<strong>de</strong>, <strong>et</strong> qu’il se crut assez tranquille <strong>de</strong> leur côté pour<br />

exécuter enfin le criminel proj<strong>et</strong> qu’il nourrissait. En 392, il assassina son jeune<br />

maître Valentinien H à Vienne, <strong>et</strong> lui substitua le rhéteur Eugène, qui était son<br />

ami, <strong>et</strong> qui ne <strong>de</strong>vait être sur le trône que son docile instrument. Mais les Francs<br />

se considérèrent comme dégagés <strong><strong>de</strong>s</strong> traités qui les avaient liés à l’empereur<br />

défunt : ils prirent les armes, <strong>et</strong>, au moment où il se prémunissait contre <strong>la</strong><br />

vengeance <strong>de</strong> Théodose, Arbogast se vit obligé d’aller <strong>de</strong> nouveau m<strong>et</strong>tre à <strong>la</strong><br />

1 Gentilibus odiis insectans, dit Sulpice Alexandre dans Grégoire <strong>de</strong> Tours, II, 9. C’est<br />

mal comprendre ce passage que <strong>de</strong> dire, comme Pétigny, Étu<strong><strong>de</strong>s</strong>, <strong>et</strong>c., I, p.153,<br />

qu’Arbogast était parent <strong>de</strong> Marcomir <strong>et</strong> <strong>de</strong> Sunno.<br />

2 Paulin <strong>de</strong> Mi<strong>la</strong>n, Vita Ambrosii, dans Migne, Patrol. <strong>la</strong>t., t. XIV, 39. Ce passage<br />

remarquable vient compléter d’une manière fort heureuse les indications <strong>de</strong> Grégoire <strong>de</strong><br />

Tours, Il, 9, qui, par ses extraits <strong>de</strong> Sulpice Alexandre, nous force à adm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong>ux<br />

campagnes d’Arbogast tout en n’en racontant qu’une seule. Fauriel, Hist. <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule<br />

méridionale sous <strong>la</strong> domination <strong><strong>de</strong>s</strong> Romains, I, p. 173, avait déjà conclu à <strong>de</strong>ux<br />

campagnes, bien qu’il ne paraisse pas avoir connu le passage <strong>de</strong> Paulin <strong>de</strong> Mi<strong>la</strong>n.<br />

3 Paulin <strong>de</strong> Mi<strong>la</strong>n, l. l. Si j’ai bien compris M. Lot dans son compte rendu <strong>de</strong> l’Histoire<br />

poétique <strong><strong>de</strong>s</strong> Mérovingiens (Moyen âge, 1893, p. 130), c<strong>et</strong>te parole serait une invention<br />

du biographe. M. Lot n’a pas l’ombre d’une raison à alléguer en faveur <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te assertion.<br />

Paulin <strong>de</strong> Mi<strong>la</strong>n était le secrétaire <strong>de</strong> saint Ambroise ; <strong>la</strong> vie qu’il nous a <strong>la</strong>issée <strong>de</strong> ce<br />

saint est digne <strong>de</strong> toute confiance, <strong>et</strong> il a plis <strong>la</strong> peine <strong>de</strong> nous faire connaître <strong>la</strong> source à<br />

<strong>la</strong>quelle il a puisé ce détail : Nam <strong>et</strong> nos, referente juvene quodam Arbogastis admodum<br />

religioso cognovimus qui tunc interfuit ; erat enim in tempore quo hæc loquebantur vini<br />

minister. L’histoire serait vraiment trop facile à écrire si le procédé <strong>de</strong> M. Lot venait à se<br />

répandre. Nous en bifferions <strong>de</strong> part <strong>et</strong> d’autre tout ce qui répugne à notre tour d’esprit,<br />

<strong>et</strong> il resterait une série <strong>de</strong> pages b<strong>la</strong>nches.

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