27.06.2013 Views

clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

Au dire du chroniqueur du huitième siècle, c’est en 457 que Childéric succéda à<br />

son père1. Adm<strong>et</strong>tons c<strong>et</strong>te date, bien que l’exactitu<strong>de</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> calculs<br />

chronologiques <strong>de</strong> c<strong>et</strong> écrivain soit loin d’être établie. Toutefois le nom <strong>de</strong><br />

Childéric n’est pas prononcé dans nos annales avant 463. Nous ignorons ce qu’il<br />

fit pendant les six premières années <strong>de</strong> son règne ; mais <strong>la</strong> légen<strong>de</strong> le sait, <strong>et</strong><br />

elle nous en trace un récit <strong><strong>de</strong>s</strong> plus animés. Laissons donc ici <strong>la</strong> parole aux<br />

poètes popu<strong>la</strong>ires ; le tour <strong><strong>de</strong>s</strong> annalistes viendra ensuite.<br />

A peine monté sur le trône, le jeune prince se livra à tout l’ar<strong>de</strong>ur d’un<br />

tempérament qui ne connaissait pas <strong>de</strong> frein. Indignés <strong>de</strong> lui voir débaucher<br />

leurs filles, les Francs le déposèrent <strong>et</strong> proj<strong>et</strong>èrent même <strong>de</strong> le tuer. Ce fut<br />

encore une fois le fidèle Wiomad qui vint au secours <strong>de</strong> son maître : il lui<br />

conseil<strong>la</strong> <strong>de</strong> fuir, <strong>et</strong> promit <strong>de</strong> s’employer pendant son absence à lui ramener les<br />

cœurs <strong>de</strong> ses guerriers. Emportez, lui dit-il, <strong>la</strong> moitié <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te pièce d’or que je<br />

viens <strong>de</strong> casser en <strong>de</strong>ux ; lorsque je vous enverrai celle que je gar<strong>de</strong>, ce sera le<br />

signe que vous pourrez revenir en toute sécurité. Childéric se r<strong>et</strong>ira en Thuringe,<br />

auprès du roi Basin <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> reine Basine2. Pendant ce temps, les Francs<br />

m<strong>et</strong>taient à leur tête le comte Ægidius, maître <strong><strong>de</strong>s</strong> milices <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule.<br />

La domination d’Ægidius sur les Francs <strong>et</strong> l’exil du roi Childéric durèrent huit<br />

années. Wiomad les employa, avec une rare ténacité, à aigrir les Francs contre le<br />

maître qu’ils s’étaient donné. Pour ce<strong>la</strong> il s’insinua dans sa confiance, <strong>et</strong> lorsqu’il<br />

s’en fut emparé complètement, il poussa le Romain à prendre <strong><strong>de</strong>s</strong> mesures qui<br />

<strong>de</strong>vaient bientôt le rendre impopu<strong>la</strong>ire. Un premier impôt d’un sou d’or par tête,<br />

qu’il leva sur eux, fut payé sans protestation. Alors, sur l’instigation <strong>de</strong> Wiomad,<br />

Ægidius trip<strong>la</strong> l’impôt. Les Francs s’exécutèrent encore <strong>et</strong> dirent entre eux :<br />

Mieux vaut payer trois sous d’or que <strong>de</strong> supporter les vexations <strong>de</strong> Childéric.<br />

Mais toujours poussé par l’homme qui s’était fait son mauvais génie, Ægidius al<strong>la</strong><br />

plus loin : il fit arrêter un certain nombre <strong>de</strong> Francs, <strong>et</strong> les fit m<strong>et</strong>tre à mort. Ne<br />

vous suffisait-il pas, dit alors Wiomad au peuple, <strong>de</strong> payer <strong><strong>de</strong>s</strong> impôts écrasants,<br />

<strong>et</strong> <strong>la</strong>isserez-vous maintenant égorger les vôtres comme <strong><strong>de</strong>s</strong> troupeaux ? — Non,<br />

lui répondirent-ils, <strong>et</strong> si nous savions où est Childéric, volontiers nous le<br />

rep<strong>la</strong>cerions à notre tête, car avec lui sans doute nous serions délivrés <strong>de</strong> ces<br />

tourments. Wiomad n’attendait que c<strong>et</strong>te parole : il renvoya aussitôt à Childéric<br />

<strong>la</strong> moitié <strong>de</strong> <strong>la</strong> pièce d’or qu’ils avaient partagée ensemble. Childéric comprit ce<br />

<strong>la</strong>ngage mu<strong>et</strong>, <strong>et</strong> rentra dans son <strong>pays</strong>, où il fut reçu comme un libérateur3.<br />

A peine avait-il repris possession du trône <strong>de</strong> ses pères, qu’il reçut une visite<br />

inattendue. Basine, <strong>la</strong> reine <strong>de</strong> Thuringe, n’était pas restée insensible aux<br />

charmes qui avaient rendu autrefois Childéric si redoutable aux ménages <strong>de</strong> ses<br />

guerriers : entraînée par l’amour, elle quitta son mari <strong>et</strong> vint rejoindre l’hôte<br />

aimé. Celui-ci lui ayant témoigné son étonnement du long voyage qu’elle s’était<br />

imposé : C’est, dit-elle, que je connais ta valeur. Sache que si j’en avais connu<br />

1 Liber historiæ, c. 9.<br />

2 Plusieurs savants, en <strong>de</strong>rnier lieu M. W. Schultze, o. c., p. 51, se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt si nos<br />

sources enten<strong>de</strong>nt parler ici <strong><strong>de</strong>s</strong> Thuringiens cisrhénans, c’est-à-dire <strong><strong>de</strong>s</strong> Tongres ou <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

Thuringiens d’Allemagne. Il n’est pas douteux qu’il s’agisse <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rniers, puisque ces<br />

mêmes sources nomment ici Basin ou Bisin, le roi historique <strong>et</strong> non légendaire <strong>de</strong> ce<br />

peuple.<br />

3 Grégoire <strong>de</strong> Tours, II, 12 ; Frédégaire, III, 11 ; Liber historiæ, 6-7. La combinaison que<br />

j’ai faite, dans le texte, du récit <strong>de</strong> ces trois auteurs, me semble représenter <strong>la</strong> version<br />

primitive <strong>de</strong> <strong>la</strong> légen<strong>de</strong>. Pour <strong>la</strong> justification <strong>de</strong> ce point <strong>de</strong> vue, je renvoie à l’Histoire<br />

poétique <strong><strong>de</strong>s</strong> Mérovingiens, pp. 179-187.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!