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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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énorme ligne <strong>de</strong> défense1. Son père s’était montré satisfait <strong>de</strong> lui <strong>et</strong> lui avait<br />

décerné le titre <strong>de</strong> Germanique. Mais bientôt il se montra sous son vrai jour. Non<br />

dépourvu <strong>de</strong> talent, Gallien était une nature absolument énervée par <strong>la</strong><br />

déca<strong>de</strong>nce, incapable <strong>de</strong> prendre rien au sérieux, même sa mission <strong>de</strong> chef du<br />

genre humain. Viveur spirituel <strong>et</strong> dénué <strong>de</strong> sens moral, il se conso<strong>la</strong>it par <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

bons mots <strong>de</strong> <strong>la</strong> perte <strong><strong>de</strong>s</strong> provinces, <strong>et</strong> il menait en riant le mon<strong>de</strong> à sa ruine.<br />

Les Francs avaient beau jeu contre un pareil adversaire. Ils se répandirent <strong>de</strong><br />

nouveau à travers les provinces <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule, comme à l’époque d’Aurélien ; ils <strong>la</strong><br />

traversèrent d’un bout à l’autre, pil<strong>la</strong>nt <strong>et</strong> saccageant tout, pénétrèrent <strong>de</strong> là en<br />

Espagne, saccagèrent <strong>la</strong> gran<strong>de</strong> ville <strong>de</strong> Tarragone, s’emparèrent ensuite d’une<br />

flotte <strong>et</strong> allèrent continuer <strong>la</strong> série <strong>de</strong> leurs dévastations sur les côtes <strong>de</strong><br />

l’Afrique2. Les popu<strong>la</strong>tions gauloises eurent alors l’avant-goût <strong>de</strong> toutes les<br />

horreurs <strong>de</strong> l’invasion ; elles se rendirent compte que l’Empire ne les protégeait<br />

plus, <strong>et</strong>, abandonnées <strong>de</strong> leur protecteur naturel, elles éprouvèrent le besoin <strong>de</strong><br />

veiller elles-mêmes à leur défense. Telle fut l’origine du mouvement séparatiste<br />

qui se produisit dans leur sein. Il était dirigé moins contre <strong>la</strong> civilisation romaine<br />

que contre l’Empire, moins contre l’Empire que contre l’empereur. On vou<strong>la</strong>it un<br />

empereur gaulois pour remp<strong>la</strong>cer le César <strong>de</strong> Rome, qui ne remplissait plus sa<br />

tâche ; on vou<strong>la</strong>it un défenseur qui pût se porter immédiatement sur le théâtre<br />

du danger, au lieu d’être rappelé en Orient quand le Rhin était forcé par les<br />

ban<strong><strong>de</strong>s</strong> germaniques. En d’autres termes, ce qu’on a appelé l’Empire gaulois était<br />

l’ébauche d’un système nouveau réc<strong>la</strong>mé par les circonstances, <strong>et</strong> auquel<br />

Dioclétien <strong>de</strong>vait plus tard attacher son nom par <strong>la</strong> fondation <strong>de</strong> <strong>la</strong> tétrarchie.<br />

L’homme qui se mit à <strong>la</strong> tête <strong>de</strong> <strong>la</strong> sécession gauloise avait jusque là mérité au<br />

plus haut point <strong>la</strong> confiance <strong><strong>de</strong>s</strong> empereurs. Postumus, duc du Limes d’outre<br />

Rhin, était un homme <strong>de</strong> basse naissance, dont tout le mon<strong>de</strong> s’accordait à<br />

reconnaître le mérite. Valérien l’avait comblé <strong><strong>de</strong>s</strong> plus grands éloges, l’avait<br />

même comparé aux héros <strong>de</strong> l’ancienne république, aux Corvinus <strong>et</strong> aux<br />

Scipions, <strong>et</strong> déc<strong>la</strong>ré digne <strong>de</strong> <strong>la</strong> pourpre impériale. Bien plus, il lui avait confié <strong>la</strong><br />

direction <strong>de</strong> son fils Gallien, <strong>et</strong> celui-ci, <strong>de</strong>venu empereur à son tour <strong>et</strong> obligé <strong>de</strong><br />

partir pour l’Orient, n’avait pas cru pouvoir rem<strong>et</strong>tre en <strong><strong>de</strong>s</strong> mains plus sûres <strong>la</strong><br />

tutelle <strong>de</strong> son jeune fils Saloninus.<br />

Mais il est <strong><strong>de</strong>s</strong> circonstances qui m<strong>et</strong>tent en défaut les dévouements les plus<br />

éprouvés. Postumus se crut-il pré<strong><strong>de</strong>s</strong>tiné à sauver sa patrie, ou <strong>la</strong> vision <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

pourpre mise à sa portée lui troub<strong>la</strong>-t-elle le sens moral ? on ne sait. Il fit périr<br />

l’enfant dont il avait <strong>la</strong> gar<strong>de</strong>, se <strong>la</strong>issa proc<strong>la</strong>mer empereur <strong><strong>de</strong>s</strong> Gaules, <strong>et</strong><br />

s’établit à Cologne, dans <strong>la</strong> gran<strong>de</strong> ville du Rhin, qui <strong>de</strong>vint pour quelques années<br />

<strong>la</strong> capitale d’un empire, <strong>et</strong> <strong>la</strong> Rome du Nord avant Trèves. Il y avait quelque<br />

gran<strong>de</strong>ur, pour le nouveau souverain, à prendre possession d’un poste si<br />

dangereux, à l’extrémité <strong>de</strong> <strong>la</strong> civilisation <strong>et</strong> vis-à-vis <strong>de</strong> l’ennemi. Postumus, en<br />

ce<strong>la</strong>, justifiait l’appréciation <strong>de</strong> Valérien, <strong>et</strong> montrait qu’il avait l’âme d’un Romain<br />

d’autrefois.<br />

La nouvelle monarchie, qui comprenait avec <strong>la</strong> Gaule l’Espagne <strong>et</strong> <strong>la</strong> Br<strong>et</strong>agne,<br />

dura treize ans (260-273), <strong>et</strong> l’on peut même s’étonner <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te longévité<br />

re<strong>la</strong>tive. En somme, <strong>la</strong> proc<strong>la</strong>mation d’un empire gaulois semb<strong>la</strong>it un attentat à<br />

l’unité sacrée du mon<strong>de</strong> romain ; c’était presque un schisme religieux, <strong>et</strong> elle<br />

froissait quelque chose dans <strong>la</strong> conscience <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>hommes</strong> civilisés. Cependant ses<br />

1 Zosime, I, 30.<br />

2 Aurelius Victor, Cæsar, 53 ; Eutrope, IX, 17 ; Paul Orose, VII, 22.

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