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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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suprêmes biens <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie sociale, <strong>et</strong> tout c<strong>et</strong> ensemble <strong>de</strong> jouissances morales <strong>et</strong><br />

intellectuelles qui semb<strong>la</strong>it compris sous le nom <strong>de</strong> civilisation romaine.<br />

On ne sait pas ce qu’étaient <strong>de</strong>venues ces popu<strong>la</strong>tions <strong>de</strong>puis <strong>la</strong> mort d’Ægidius<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> Paul. La <strong>la</strong>mpe <strong>de</strong> l’histoire s’éteint subitement après leur sortie <strong>de</strong> scène,<br />

plongeant dans <strong><strong>de</strong>s</strong> ténèbres opaques le point qu’il importerait le plus d’éc<strong>la</strong>irer<br />

pour connaître le secr<strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> origines <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule franque. Pendant les années<br />

crépuscu<strong>la</strong>ires qui s’écoulent <strong>de</strong> 468 à 486, <strong>la</strong> désorganisation politique dut être<br />

gran<strong>de</strong> dans ce <strong>pays</strong>. Ceux qui tournaient les yeux vers l’État, pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

<strong>de</strong> remplir sa mission <strong>de</strong> protecteur <strong>de</strong> l’ordre social, constatèrent qu’il avait<br />

disparu. Il n’y avait plus d’empereur, il n’y avait plus même <strong>de</strong> maître <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

milices. Seuls, les évêques étaient écoutés <strong>et</strong> obéis dans leurs cités, parce qu’au<br />

milieu du désarroi universel, ils représentaient une force qui n’avait jamais<br />

capitulé avec aucun ennemi, ni désespéré <strong>de</strong>vant aucune détresse. Chaque<br />

évêque était l’arbitre <strong>de</strong> <strong>la</strong> cité dont il était le pasteur, <strong>et</strong> son influence était en<br />

proportion du prestige que lui donnaient ses vertus <strong>et</strong> ses talents. Qui avait les<br />

évêques pour lui était le maître <strong>de</strong> l’avenir.<br />

Il y avait cependant un continuateur <strong>de</strong> <strong>la</strong> politique conservatrice d’Ægidius <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

Paul. Ægidius avait <strong>la</strong>issé un fils, du nom <strong>de</strong> Syagrius, que nous trouvons, vers<br />

486, en possession d’une partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule1. Il ne portait pas, comme son père,<br />

le titre <strong>de</strong> maître <strong><strong>de</strong>s</strong> milices, moins encore celui <strong>de</strong> duc ou <strong>de</strong> patrice, qui lui est<br />

donné par <strong><strong>de</strong>s</strong> documents peu dignes <strong>de</strong> foi2. Nulle part on ne voit qu’il ait tenu<br />

d’une délégation impériale le droit <strong>de</strong> diriger les <strong><strong>de</strong>s</strong>tinées <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule : <strong>et</strong> quelle<br />

eût d’ailleurs été l’autorité d’un mandat qui venait d’être brisé en 476 ? Nous ne<br />

pouvons donc regar<strong>de</strong>r le gouvernement <strong>de</strong> Syagrius que comme un pouvoir <strong>de</strong><br />

fait, reconnu exclusivement par les cités qui préféraient sa domination à celle<br />

d’un autre, ou encore aux dangereux hasards <strong>de</strong> <strong>la</strong> liberté. Quelles étaient ces<br />

cités ? Nous l’ignorons absolument, <strong>et</strong> il serait bien téméraire d’i<strong>de</strong>ntifier le<br />

domaine sur lequel s’étendait l’autorité du fils d’Ægidius avec <strong>la</strong> Gaule restée<br />

romaine. Celle-ci al<strong>la</strong>it <strong>de</strong> <strong>la</strong> Somme à <strong>la</strong> Loire <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> Manche à <strong>la</strong> Haute-Meuse,<br />

sans qu’il soit possible <strong>de</strong> délimiter d’une manière plus précise les frontières <strong>de</strong><br />

l’Est. Dans c<strong>et</strong>te vaste région, plus d’une cité indifférente aux <strong><strong>de</strong>s</strong>tinées <strong>de</strong><br />

Syagrius <strong>et</strong> sans sympathie pour sa politique, <strong>de</strong>vait possé<strong>de</strong>r un régime<br />

semb<strong>la</strong>ble à celui <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville <strong>de</strong> Rome au septième siècle, c’est-à-dire que<br />

l’autorité spirituelle <strong><strong>de</strong>s</strong> évêques y avait pris <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce du pouvoir civil absent.<br />

L’histoire s’est donc <strong>la</strong>issé éblouir par le titre <strong>de</strong> roi <strong><strong>de</strong>s</strong> Romains, que Syagrius<br />

porte dans les récits <strong>de</strong> Grégoire <strong>de</strong> Tours. Elle a supposé qu’à c<strong>et</strong>te royauté<br />

correspondait -un royaume, <strong>et</strong> que ce royaume comprenait toute <strong>la</strong> partie <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

Gaule qui n’était pas soumise pour lors à <strong><strong>de</strong>s</strong> rois germaniques. C’est une<br />

illusion. Le titre <strong>de</strong> roi que le chroniqueur attribue à Syagrius, il l’a emprunté aux<br />

traditions <strong><strong>de</strong>s</strong> barbares eux-mêmes, qui n’en connaissaient pas d’autre pour<br />

désigner un chef indépendant3. Sous l’influence <strong>de</strong> ces traditions, d’autres sont<br />

allés plus loin, <strong>et</strong> ils ont imaginé une dynastie <strong>de</strong> rois dès Romains <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule,<br />

dans <strong>la</strong>quelle se succè<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> père en fils A<strong>et</strong>ius, Ægidius, Paul <strong>et</strong> Syagrius4. Si<br />

Grégoire avait connu celui-ci par d’autres sources que les légen<strong><strong>de</strong>s</strong> franques, il se<br />

serait gardé <strong>de</strong> lui donner un titre si peu en harmonie avec <strong>la</strong> nomenc<strong>la</strong>ture<br />

1 Grégoire <strong>de</strong> Tours, II, 18 <strong>et</strong> 27.<br />

2 Frédégaire, III, 15 ; Hincmar, Vita Remigii dans Script. Rer. Merov., t. III, p. 129.<br />

3 V. l’article déjà cité <strong>de</strong> Tamassia, p. 228, <strong>et</strong> G. Kurth, Histoire poétique <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

Mérovingiens, pp. 213 <strong>et</strong> suivantes.<br />

4 G. Kurth, o. c., pp. 96 <strong>et</strong> 214.

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