clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée
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Frédégaire va plus loin : il déc<strong>la</strong>re formellement que Théo<strong>de</strong>mir fut le père <strong>de</strong><br />
Clodion, <strong>et</strong> il ajoute qu’il fut fait prisonnier par le comte Castinus, dans<br />
l’expédition <strong>de</strong> ce gouverneur romain contre les Francs, au cours <strong><strong>de</strong>s</strong> premières<br />
années du cinquième siècle1. Il se peut que les assertions <strong>de</strong> Frédégaire ne<br />
soient que <strong><strong>de</strong>s</strong> conjectures plus ou moins vraisemb<strong>la</strong>bles sur le texte <strong>de</strong> Grégoire<br />
<strong>de</strong> Tours2 ; mais il est certain que Théo<strong>de</strong>mir <strong>et</strong> son père Richimir sont les plus<br />
anciens princes connus que l’on puisse, avec quelque vraisemb<strong>la</strong>nce, rattacher à<br />
<strong>la</strong> famille <strong>de</strong> Clovis. Donc, en adm<strong>et</strong>tant même qu’Ascaric <strong>et</strong> Ragaise<br />
appartiennent à une autre famille, c’est toujours sous <strong>la</strong> hache du bourreau<br />
romain qu’a roulé <strong>la</strong> tête du plus ancien membre <strong>de</strong> <strong>la</strong> dynastie mérovingienne.<br />
Peut-être Clovis se souvenait-il <strong>de</strong> ce même grief le jour où, dans les prisons <strong>de</strong><br />
Soissons, il faisait monter sur l’échafaud celui qui fut pour <strong>la</strong> tradition franque le<br />
<strong>de</strong>rnier roi <strong><strong>de</strong>s</strong> Romains3.<br />
Les Mérovingiens avaient, comme toutes les familles royales en Germanie, leur<br />
légen<strong>de</strong> généalogique, qui les reliait à leurs dieux eux-mêmes par une série<br />
ininterrompue d’ancêtres glorieux. Les chroniqueurs n’ont pas daigné s’informer<br />
<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te légen<strong>de</strong> païenne, <strong>et</strong> peut-être était-elle oubliée déjà au sixième siècle ;<br />
le seul qui en ait gardé un vague souvenir nous <strong>la</strong> présente sous une forme<br />
rajeunie <strong>et</strong> <strong>la</strong> rattache au nom d’un roi re<strong>la</strong>tivement récent4. Ce<strong>la</strong> s’explique en<br />
bonne partie par <strong>la</strong> conversion <strong><strong>de</strong>s</strong> Francs au christianisme, qui fit tomber dans le<br />
discrédit les traditions incompatibles avec <strong>la</strong> foi chrétienne : nous n’essayerons<br />
donc pas <strong>de</strong> les r<strong>et</strong>rouver, mais nous gardons le droit, d’en affirmer l’existence.<br />
Les Francs voyaient dans leurs rois les <strong><strong>de</strong>s</strong>cendants <strong>de</strong> leurs dieux : le secr<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
leur inaltérable fidélité à leur dynastie se trouve dans c<strong>et</strong>te croyance religieuse.<br />
Seuls les dieux <strong>et</strong> leurs enfants avaient le droit <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>r aux peuples ; <strong>la</strong><br />
royauté était une qualité <strong>de</strong> naissance, <strong>et</strong> le titre <strong>de</strong> roi était l’apanage naturel <strong>de</strong><br />
Francos) <strong>de</strong> Pannonia fuisse <strong>de</strong>gressus, <strong>et</strong> primum qui<strong>de</strong>m litora Rheni omnes incoluisse,<br />
<strong>de</strong>hinc transacto Rheno, Thoringiam transmeasse, ibique juxta pagus vel civitates regis<br />
crinitos super se creavisse <strong>de</strong> prima <strong>et</strong> ut ita dicam nobiliore suorum familia. Quod postes<br />
probatum Chlodovechi victuriæ tradi<strong>de</strong>runt, itaque in sequenti digerimus. Nam <strong>et</strong> in<br />
conso<strong>la</strong>ribus legimus, Theudomerem regem Francorum, filium Richimeris quondam, <strong>et</strong><br />
Ascy<strong>la</strong>m matrem ejus g<strong>la</strong>dio interfectos. Ferunt <strong>et</strong>iam tunc Chlogionem utilem ac<br />
nobilissimum in gente sua regem fuisse Francorum, qui apud Dispargum castrum<br />
habitabat, quod est in terminum Thoringorum. Grégoire <strong>de</strong> Tours, II, 9.<br />
1 Frédégaire, III, 8 <strong>et</strong> 9.<br />
2 Je crois avoir mis en pleine lumière le travail conjectural auquel Frédégaire se livre sur<br />
le texte <strong>de</strong> Grégoire <strong>de</strong> Tours, dans mon étu<strong>de</strong> intitulée : l’Histoire <strong>de</strong> Clovis dans<br />
Frédégaire (Revue <strong><strong>de</strong>s</strong> questions historiques, t. XLVII, 1890).<br />
3 Quant à Faramond, qui a si longtemps figuré en tête <strong>de</strong> <strong>la</strong> dynastie mérovingienne,<br />
c’est tout bonnement un apocryphe. Le seul écrivain qui en parle, c’est, au huitième<br />
siècle, l’auteur du Liber historiæ, qui en fait le fils Marcomir <strong>et</strong> le p<strong>et</strong>it fils <strong>de</strong> Priam !<br />
Marcomir ayant persuadé aux Francs <strong>de</strong> se donner un roi, comme les autres peuples, ils<br />
auraient choisi son fils Faramond : Elegerunt Faramundo, ipsius filio, <strong>et</strong> elevaverunt eum<br />
regem super se crinitum. Voilà, on en conviendra, une bien fâcheuse généalogie ! On a<br />
cru longtemps pouvoir sauver au moins l’existence <strong>de</strong> Faramond, parce qu’on le trouvait<br />
mentionné dans <strong>la</strong> chronique <strong>de</strong> Prosper d’Aquitaine en ces termes : Faramundus regnat<br />
in Francia. Mais c<strong>et</strong>te notice est une interpo<strong>la</strong>tion récente, <strong>de</strong> même que celle-ci :<br />
Priamus quidam regnat in Francia quanto altius colligere potuimus, <strong>et</strong> que : Meroveus<br />
regnat in Francia ; toutes les trois sont postérieures au Liber historiæ, dont elles<br />
reproduisent les données fabuleuses. Faramond reste donc définitivement biffé <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />
série <strong><strong>de</strong>s</strong> rois <strong>de</strong> France. V. <strong>la</strong> démonstration <strong>de</strong> Pétigny, Étu<strong><strong>de</strong>s</strong>, II, pp. 362-378.<br />
4 Frédégaire, III, 9.