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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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La veuve <strong>et</strong> les enfants <strong>de</strong> Chilpéric semblent avoir été recueillis par Go<strong>de</strong>gisil à<br />

Genève. Du moins c’est là que nous r<strong>et</strong>rouvons les <strong>de</strong>ux princesses an moment<br />

du mariage <strong>de</strong> Clotil<strong>de</strong>. Sæ<strong>de</strong>leuba prit le voile1, <strong>et</strong> on ne sait rien d’elle, sinon<br />

qu’elle a fondé l’église Saint-Victor2 dans un faubourg <strong>de</strong> <strong>la</strong> même ville. Quant à<br />

Clotil<strong>de</strong>, dont on célébrait <strong>la</strong> beauté <strong>et</strong> les vertus, elle ne quittait pas sa mère,<br />

adonnée comme elle aux pratiques pieuses qui ont rempli l’existence <strong>de</strong> toutes<br />

les <strong>de</strong>ux. La mère vécut jusqu’en 506, sanctifiant son veuvage par un<br />

redoublement d’austérités <strong>et</strong> d’œuvres charitables, <strong>et</strong> ne dédaignant pas, dit le<br />

poète qui a fait son épitaphe, <strong>de</strong> porter le joug du Christ après le diadème<br />

royal3. Elle eut le bonheur <strong>de</strong> voir ses p<strong>et</strong>its-enfants grandir dans <strong>la</strong> foi<br />

catholique, ajoute le poète, <strong>et</strong> ce fut sans contredit <strong>la</strong> plus gran<strong>de</strong> joie que c<strong>et</strong>te<br />

âme sainte éprouva ici-bas.<br />

Les re<strong>la</strong>tions avaient toujours été bonnes entre les membres <strong>de</strong> <strong>la</strong> famille royale<br />

<strong>de</strong> Burgondie. Des légen<strong><strong>de</strong>s</strong> franques, inspirées par l’antipathie nationale <strong>et</strong> nées<br />

sur les lèvres <strong><strong>de</strong>s</strong> poètes popu<strong>la</strong>ires, ont représenté Gon<strong>de</strong>baud comme le<br />

meurtrier <strong>de</strong> son frère Chilpéric, dont il aurait encore fait périr <strong>la</strong> veuve <strong>et</strong> les fils,<br />

en même temps qu’il reléguait ses filles à Genève. L’histoire donne un éc<strong>la</strong>tant<br />

démenti à ces traditions, si anciennes qu’elles soient. Chilpéric n’eut pas <strong>de</strong> fils,<br />

<strong>et</strong> ses filles ne furent pas reléguées en exil. Sa veuve, Carétène, on vient <strong>de</strong> le<br />

voir, mourut dans une heureuse vieillesse en 506. Loin d’être le meurtrier <strong>de</strong> son<br />

frère, Gon<strong>de</strong>baud l’avait, regr<strong>et</strong>té sincèrement, <strong>et</strong> saint Avitus, le grand évêque<br />

<strong>de</strong> Vienne, atteste lui-même <strong>la</strong> piété fraternelle <strong>de</strong> ce prince hérétique mais<br />

digne <strong>de</strong> sympathie4. Ses re<strong>la</strong>tions avec son frère Go<strong>de</strong>gisil paraissent avoir été<br />

satisfaisantes aussi ; plus tard, il est vrai, elles furent troublées ; mais ce fut<br />

Go<strong>de</strong>gisil <strong>et</strong> non lui qui ouvrit <strong>la</strong> guerre fratrici<strong>de</strong>, <strong>et</strong> l’on peut croire que c’est <strong>la</strong><br />

,jalousie qui en fut le principal mobile.<br />

Gon<strong>de</strong>baud, en eff<strong>et</strong>, avait sur son frère une supériorité qui n’était pas<br />

seulement due à l’aînesse. Longtemps avant que les événements eussent fait <strong>de</strong><br />

lui le seul souverain <strong>de</strong> tous les Burgon<strong><strong>de</strong>s</strong>, il semble avoir déjà tenu c<strong>et</strong>te p<strong>la</strong>ce<br />

dans l’estime <strong>de</strong> ses voisins5.<br />

Étant donnée c<strong>et</strong>te espèce d’hégémonie <strong>de</strong> Gon<strong>de</strong>baud, il n’est pas impossible<br />

que, comme le disent les légen<strong><strong>de</strong>s</strong>, Clovis ait eu à négocier avec lui à l’occasion<br />

<strong>de</strong> son mariage : ce<strong>la</strong> n’empêche aucunement qu’il ait dû <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>la</strong> main <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

jeune princesse à son tuteur, le roi <strong>de</strong> Genève. Tout perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> croire que <strong>la</strong><br />

famille royale <strong>de</strong> Burgondie fut f<strong>la</strong>ttée d’une alliance qui <strong>la</strong> rattachait à un prince<br />

désormais puissant, <strong>et</strong> en qui elle trouvait un allié éventuel contre les Goths<br />

d’Italie <strong>et</strong> d’Espagne. Les seuls scrupules vinrent <strong>de</strong> <strong>la</strong> jeune fille, qui était<br />

catholique fervente, <strong>et</strong> qui tremb<strong>la</strong>it <strong>de</strong>vant les hasards d’un mariage avec un<br />

païen. Les unions <strong>de</strong> ce genre, sans être précisément défendues par l’Église,<br />

étaient généralement envisagées par elle avec une certaine défiance, <strong>et</strong> Clotil<strong>de</strong><br />

ne pouvait pas l’ignorer. Sans doute, dans le trouble <strong>de</strong> sa conscience, elle se<br />

1 Grégoire <strong>de</strong> Tours, l. c. C’est à c<strong>et</strong>te occasion qu’elle aura reçu le nom <strong>de</strong> Chrona ; le<br />

texte <strong>de</strong> Grégoire l’insinue d’ailleurs : Quarum senior mutata veste Chrona... vocabatur.<br />

2 Frédégaire, IV, 22 ; Jahn, II, p. 163, conteste que Sæ<strong>de</strong>leuba ait pu bâtir c<strong>et</strong>te église à<br />

Genève, où elle était une pauvre exilée, mais il fournit par là une preuve <strong>de</strong> plus que c<strong>et</strong><br />

exil n’est qu’une légen<strong>de</strong>.<br />

3 Leb<strong>la</strong>nt, Inscriptions chrétiennes <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule, t. I, n° 31, pp. 68-71.<br />

4 Flebatis quondam pi<strong>et</strong>ate ineffabili funera germanorum. S. Avitus, Epistolæ ad<br />

Gundobadum, 5.<br />

5 Cf. Ennodius, Vitæ sancti Epiphanii.

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