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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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était un miracle vivant <strong>de</strong> charité, <strong>de</strong> pénitence <strong>et</strong> <strong>de</strong> zèle pour le salut <strong><strong>de</strong>s</strong> âmes.<br />

Ce moine-évêque avait un troisième caractère, qui, plus encore que les <strong>de</strong>ux<br />

premiers, a fait <strong>la</strong> gloire <strong>de</strong> son nom <strong>et</strong> <strong>la</strong> gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> son rôle historique. Il était<br />

né missionnaire. Le feu sacré <strong>de</strong> l’aposto<strong>la</strong>t le dévorait. Il s’attribuait une mission<br />

partout où il y avait une idole à renverser ou un païen à convertir. Il trouva les<br />

campagnes <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule plongées encore dans <strong>la</strong> nuit <strong>de</strong> l’idolâtrie : il les <strong>la</strong>issa<br />

chrétiennes <strong>et</strong> semées d’institutions qui continuaient <strong>et</strong> affermissaient son œuvre<br />

ré<strong>de</strong>mptrice. Il fut, <strong>et</strong> c’est <strong>la</strong> plus haute <strong>de</strong> toutes ses gloires, le créateur <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

paroisses rurales ; c’est lui qui a fait prendre racine à <strong>la</strong> loi <strong>de</strong> Dieu dans le sol<br />

fécond <strong>de</strong> <strong>la</strong> vieille Gaule, <strong>et</strong> qui a préparé à l’Évangile les vail<strong>la</strong>ntes légions <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong>boureurs chrétiens d’où sont sortis <strong><strong>de</strong>s</strong> saints comme Vincent <strong>de</strong> Paul, <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

saintes comme Geneviève <strong>et</strong> Jeanne d’Arc.<br />

Bien que l’aposto<strong>la</strong>t <strong>de</strong> saint Martin se soit surtout exercé dans <strong>la</strong> Gaule centrale,<br />

il n’est pas douteux que les provinces septentrionales <strong>de</strong> ce <strong>pays</strong> lui soient<br />

gran<strong>de</strong>ment re<strong>de</strong>vables. Nous savons qu’il s’est rendu <strong>de</strong>ux fois à Trèves, à <strong>la</strong><br />

cour <strong>de</strong> l’empereur Maxime, <strong>et</strong> nous <strong>de</strong>vons croire qu’il aura profité <strong>de</strong> ces<br />

voyages pour évangéliser les popu<strong>la</strong>tions par lesquelles il passait. A <strong>la</strong> cour <strong>de</strong><br />

Trèves on fit grand accueil à l’homme <strong>de</strong> Dieu ; on admira ses vertus <strong>et</strong> ses<br />

miracles1, on respecta sa noble franchise, <strong>et</strong> il revint chaque fois avec les grâces<br />

qu’il avait sollicitées. L’une <strong>de</strong> celles-ci lui coûta un dur sacrifice. Pour conjurer<br />

les rigueurs dont était menacée l’Espagne priscillianiste, il lui fal<strong>la</strong>it recevoir dans<br />

sa communion ceux-là même qui avaient fait condamner à mort, par le pouvoir<br />

séculier, Priscillien <strong>et</strong> ses principaux disciples. Ces <strong>hommes</strong> étaient les frères <strong>de</strong><br />

Martin dans le sacerdoce : à leur tête était Ithacius, qui avait été le grand<br />

promoteur <strong>de</strong> <strong>la</strong> persécution, <strong>et</strong> qui jouissait d’un crédit dangereux à <strong>la</strong> cour <strong>de</strong><br />

Maxime. La conscience <strong>de</strong> Martin se révoltait à l’idée <strong>de</strong> fraterniser avec ces<br />

pré<strong>la</strong>ts aux mains sang<strong>la</strong>ntes, mais son cœur le poussait à tout faire pour<br />

empêcher que leur fureur sanguinaire causât <strong>de</strong> nouvelles victimes. Ne pouvant<br />

venir à bout <strong>de</strong> lui, Maxime donna enfin ordre aux commissaires impériaux <strong>de</strong><br />

partir pour l’Espagne, avec droit <strong>de</strong> vie <strong>et</strong> <strong>de</strong> mort sur les malheureux qui leur<br />

seraient dénoncés. Alors enfin, <strong>la</strong> charité l’emporta chez Martin sur ses scrupules<br />

d’orthodoxie : au milieu <strong>de</strong> <strong>la</strong> nuit il courut au pa<strong>la</strong>is impérial, <strong>et</strong> promit <strong>de</strong><br />

communier avec les ithaciens si l’Espagne était épargnée. On lui accorda sa<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>, mais il ne goûta pas <strong>la</strong> joie <strong>de</strong> son triomphe. Il quitta <strong>la</strong> ville, <strong>la</strong><br />

conscience troublée, plein <strong>de</strong> douleur <strong>et</strong> <strong>de</strong> remords à l’idée qu’il avait manqué à<br />

son <strong>de</strong>voir en communiant avec les persécuteurs. Pendant qu’il revenait à pied<br />

par <strong>la</strong> chaussée qui al<strong>la</strong>it <strong>de</strong> Trèves à Reims, sa pensée inquiète repassait tous<br />

les détails du compromis qu’on lui avait arraché, <strong>et</strong> plus il y réfléchissait, plus il<br />

sentait <strong>la</strong> nuit <strong>et</strong> l’amertume envahir sa conscience. Arrivé au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> <strong>la</strong> station<br />

d’And<strong>et</strong>hanna, à l’entrée <strong>de</strong> <strong>la</strong> gran<strong>de</strong> forêt <strong><strong>de</strong>s</strong> Ar<strong>de</strong>nnes, il <strong>la</strong>issa ses<br />

compagnons prendre les <strong>de</strong>vants, <strong>et</strong>, tout entier à son combat intérieur, il s’assit<br />

à terre, abîmé dans son <strong>de</strong>uil, <strong>et</strong> tour à tour s’accusant <strong>et</strong> se défendant. Alors un<br />

ange lui apparut qui le conso<strong>la</strong> <strong>et</strong> l’exhorta à reprendre courage. Le saint se<br />

<strong>la</strong>issa rassurer par le céleste conso<strong>la</strong>teur, mais à partir <strong>de</strong> ce moment il sentit sa<br />

force atteinte, <strong>et</strong> pendant les seize années qu’il vécut encore, il ne remit plus les<br />

pieds dans un concile.<br />

L’histoire ne nous a pas conservé d’autres traces du passage <strong>de</strong> Martin par les<br />

contrées belges, mais on est bien fondé à lui attribuer une action efficace sur ces<br />

<strong>pays</strong>, à en juger d’après l’extraordinaire diffusion qu’y a prise son culte. Une<br />

1 Sulpice Sévère, Vita sancti Martini, c. 16-18.

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