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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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Les souffrances <strong>de</strong> l’Auvergne n’étaient pas finies, car les Goths avaient ravagé<br />

cruellement les campagnes <strong><strong>de</strong>s</strong> environs, <strong>et</strong> ils <strong>la</strong>issaient <strong>de</strong>rrière eux <strong>la</strong> famine,<br />

qui continuait leur œuvre <strong>de</strong> mort. Alors le rôle <strong>de</strong> <strong>la</strong> charité commença. Sidoine<br />

Apollinaire se multiplia ; plus d’une fois, à l’insu <strong>de</strong> sa femme, il distribuait aux<br />

pauvres l’argenterie <strong>de</strong> sa maison, qu’elle al<strong>la</strong>it rach<strong>et</strong>er ensuite1. Les évêques<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> cités voisines vinrent aussi au secours <strong><strong>de</strong>s</strong> victimes. Tous les chemins <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

province étaient sillonnés par les voitures chargées <strong><strong>de</strong>s</strong> provisions envoyées par<br />

saint Patient, le généreux évêque <strong>de</strong> Lyon2. C<strong>et</strong>te fois encore, Ecdicius ne<br />

manqua pas à sa patrie : il fut aussi prodigue <strong>de</strong> son or que <strong>de</strong> son sang, <strong>et</strong> à lui<br />

seul il nourrit sous son toit quatre mille affamés3. Mais <strong>la</strong> malédiction <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

déca<strong>de</strong>nces, c’est que l’héroïsme y est stérile, <strong>et</strong> qu’elles ne savent que faire <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

plus généreux dévouements. Les Arvernes croyaient avoir prouvé au mon<strong>de</strong><br />

qu’ils avaient le droit <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r leur indépendance : ils furent trahis par celui-là<br />

même qui avait pour <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> les défendre. Comme les Visigoths ne cessaient<br />

<strong>de</strong> troubler l’Empire, menaçant les autres provinces si on leur cédait celle qui les<br />

avait repoussés, un malheureux du nom <strong>de</strong> Julius Nepos, alors revêtu du titre<br />

impérial, eut le triste courage <strong>de</strong> leur livrer c<strong>et</strong>te noble contrée (475). On <strong>de</strong>vine<br />

le désespoir <strong><strong>de</strong>s</strong> patriotes arvernes. Ceux qui ne pouvaient se résigner à cesser<br />

d’être Romains durent prendre le chemin <strong>de</strong> l’exil. Ecdicius, on le comprend, fut<br />

du nombre ; il al<strong>la</strong>, loin <strong><strong>de</strong>s</strong> murs chéris dont il avait été le défenseur, terminer<br />

obscurément une carrière que <strong><strong>de</strong>s</strong> âges plus heureux auraient couverte d’une<br />

gloire impérissable4. Quant à son beau-frère Sidoine, il fut arraché à son<br />

troupeau <strong>et</strong> relégué à Livia, près <strong>de</strong> Narbonne5. Voilà comment l’Auvergne passa<br />

sous le joug <strong><strong>de</strong>s</strong> Visigoths.<br />

La chute <strong>de</strong> Clermont faisait d’Euric le maître <strong>de</strong> toute <strong>la</strong> Gaule au sud <strong>de</strong> <strong>la</strong> Loire<br />

: il se hâta <strong>de</strong> cueillir les fruits <strong>de</strong> ce nouveau succès. Les circonstances d’ailleurs<br />

le servirent à souhait. En 476, Odoacre m<strong>et</strong>tait fin à l’empire d’Occi<strong>de</strong>nt, <strong>et</strong> peu<br />

après mourait Julius Nepos, l’empereur détrôné, mais légitime, envers lequel les<br />

Visigoths étaient liés par le traité <strong>de</strong> 475. Ayant les mains libres désormais du<br />

côté <strong>de</strong> Rome, Euric reprit le programme <strong>de</strong> ses prédécesseurs, <strong>et</strong>, plus heureux,<br />

mit enfin <strong>la</strong> main sur les villes qu’ils avaient si ar<strong>de</strong>mment convoitées. Arles, qui<br />

avait soutenu quatre sièges <strong>de</strong> <strong>la</strong> part <strong><strong>de</strong>s</strong> Visigoths, lui ouvrait ses portes, <strong>de</strong><br />

même que l’opulente Marseille, <strong>la</strong> reine du commerce d’Occi<strong>de</strong>nt. C<strong>et</strong>te conquête<br />

livrait au barbare tout le littoral méridional <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule ; il s’étendait sur <strong>la</strong> rive<br />

gauche du Rhône jusqu’à <strong>la</strong> Durance, <strong>et</strong> il fermait définitivement aux Burgon<strong><strong>de</strong>s</strong><br />

l’accès <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Méditerranée</strong>.<br />

Euric était maintenant à <strong>la</strong> tête d’un royaume immense, qui ressemb<strong>la</strong>it à un<br />

empire. Les frontières en couraient <strong>de</strong>puis les Alpes jusqu’au détroit <strong>de</strong> Gibraltar<br />

d’une part, jusqu’aux rives <strong>de</strong> <strong>la</strong> Loire <strong>de</strong> l’autre, <strong>et</strong> comprenaient les plus belles<br />

contrées <strong>de</strong> l’Occi<strong>de</strong>nt. Maître <strong>de</strong> ces superbes domaines, Euric pouvait se<br />

considérer comme le véritable héritier <strong><strong>de</strong>s</strong> Césars, maintenant surtout qu’il n’y<br />

avait plus personne qui portât le titre impérial. Il fut, avant Théodoric le Grand,<br />

<strong>et</strong> dans une aussi <strong>la</strong>rge mesure que lui, l’arbitre <strong>de</strong> l’Europe, <strong>et</strong> il ne lui a<br />

manqué, pour prendre le même rang <strong>de</strong>vant l’histoire, que <strong><strong>de</strong>s</strong> panégyristes pour<br />

1 Grégoire <strong>de</strong> Tours, II, 23.<br />

2 Sidoine Apollinaire, Epist., VI, 12.<br />

3 Grégoire <strong>de</strong> Tours, II, 24.<br />

4 Jordanès, c. 45. Cf. Binding, Das Burgundisch-Romanische Kœnig reich, p. 90, note<br />

360.<br />

5 Sidoine Apollinaire, Epist., VIII, 3.

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