27.06.2013 Views

clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

Reims1. Ce sont là tous les renseignements qu’on peut emprunter aux légen<strong><strong>de</strong>s</strong> ;<br />

il serait dangereux <strong>de</strong> les interroger sur <strong><strong>de</strong>s</strong> dates ou sur <strong><strong>de</strong>s</strong> faits précis. En<br />

général, elles obéissent toutes à une même tendance, qui consiste à faire<br />

remonter l’origine <strong><strong>de</strong>s</strong> sièges épiscopaux le plus haut possible. D’ordinaire elles <strong>la</strong><br />

rattachent directement au prince <strong><strong>de</strong>s</strong> apôtres lui-même, dont les premiers<br />

évêques <strong>de</strong> <strong>la</strong> Belgique <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> Germanie auraient été les disciples. Ces<br />

légen<strong><strong>de</strong>s</strong>, dont on a longtemps considéré l’authenticité comme inattaquable<br />

parce qu’on les prenait pour <strong><strong>de</strong>s</strong> traditions immémoriales, ne remontent guère<br />

au-<strong>de</strong>là du neuvième siècle, <strong>et</strong> rien n’égale <strong>la</strong> naïv<strong>et</strong>é avec <strong>la</strong>quelle ont procédé<br />

leurs auteurs pour vieillir les principales églises <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule. Ils se sont bornés,<br />

en général, à reporter du troisième siècle au premier le fondateur ou le premier<br />

titu<strong>la</strong>ire connu d’un siège épiscopal, sans se douter <strong><strong>de</strong>s</strong> mille invraisemb<strong>la</strong>nces<br />

que c<strong>et</strong>te migration chronologique entraînait dans sa biographie. L’énorme écart<br />

qui en résultait entre lui <strong>et</strong> ses successeurs avérés était expliqué ensuite,<br />

lorsqu’on s’en apercevait, par les persécutions qui avaient interrompu <strong>la</strong> série<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> évêques, à moins qu’on préférât le combler tant bien que mal par <strong><strong>de</strong>s</strong> noms<br />

empruntés aux diptyques d’autres sièges. Lorsque, dans <strong>la</strong> suite, on a essayé <strong>de</strong><br />

porter un peu <strong>de</strong> lumière dans ces obscurités légendaires, les historiens se sont<br />

trouvés bien embarrassés : voyant un même évêque p<strong>la</strong>cé par <strong>la</strong> légen<strong>de</strong> au<br />

premier siècle <strong>et</strong> attesté par l’histoire au troisième, ils ont cru se tirer d’affaire en<br />

le dédoub<strong>la</strong>nt, <strong>et</strong> c<strong>et</strong> expédient fal<strong>la</strong>cieux a été accueilli avec empressement par<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> fidèles plus désireux <strong>de</strong> sauver une tradition locale qui leur était chère, que<br />

<strong>de</strong> parvenir à r<strong>et</strong>rouver l’aspect austère <strong>de</strong> <strong>la</strong> vérité. Nous ne reproduirons pas<br />

ces traditions ; elles sont nées longtemps après l’époque dont nous racontons les<br />

annales. Quelque valeur qu’on puisse leur accor<strong>de</strong>r pour l’histoire <strong><strong>de</strong>s</strong> idées, ce<br />

serait fausser <strong>la</strong> couleur <strong><strong>de</strong>s</strong> temps <strong>et</strong> brouiller <strong>la</strong> succession <strong><strong>de</strong>s</strong> siècles que <strong>de</strong><br />

leur assigner une p<strong>la</strong>ce dans notre tableau. Il perdra en pittoresque ce qu’il<br />

gagnera en vérité, <strong>et</strong> beaucoup <strong>de</strong> lecteurs se p<strong>la</strong>indront peut-être <strong>de</strong> ne pas<br />

r<strong>et</strong>rouver dans ces pages le charme poétique <strong>de</strong> ces fictions que le patriotisme<br />

ou <strong>la</strong> piété aimaient à accueillir sans contrôle. Mais rien ne peut prévaloir contre<br />

les droits <strong>de</strong> <strong>la</strong> vérité scientifique, pas même le désir légitime du narrateur <strong>de</strong><br />

vivifier <strong>et</strong> d’embellir son récit.<br />

Chose remarquable, <strong>de</strong> toutes les églises du nord <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule, ce sont celles <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

<strong>de</strong>ux Germanies dont l’antiquité est <strong>la</strong> mieux établie. Saint Irénée invoque leur<br />

foi comme une preuve <strong>de</strong> <strong>la</strong> catholicité <strong><strong>de</strong>s</strong> doctrines orthodoxes ; <strong>et</strong> ce Père <strong>de</strong><br />

l’Eglise, qui écrivait vers <strong>la</strong> fin du <strong>de</strong>uxième siècle, <strong>et</strong> qui était le voisin <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong>ux<br />

Germanies, n’a pu ignorer ce dont il parle avec tant d’assurance2. Le témoignage<br />

<strong>de</strong> saint Irénée est bien précieux, car .Mayence <strong>et</strong> Cologne, les <strong>de</strong>ux sièges<br />

auxquels il fait allusion, ne possè<strong>de</strong>nt que <strong>de</strong> vagues <strong>et</strong> lointains souvenirs <strong>de</strong><br />

leurs premières années, <strong>et</strong> c’est l’histoire, c<strong>et</strong>te fois, dont, par une exception<br />

assez rare, les affirmations suppléent au silence <strong>de</strong> <strong>la</strong> légen<strong>de</strong>. Ce<strong>la</strong> montre que<br />

les églises n’ont pas toujours conservé leurs traditions historiques, <strong>et</strong> que<br />

souvent les chroniques pèchent par oubli autant que par fiction. Rien n’est mieux<br />

fait pour rendre réservé l’historien qui prétendrait nier l’existence d’une<br />

chrétienté primitive, pour <strong>la</strong> raison qu’il n’en reste pas <strong>de</strong> traces. Innombrables<br />

sont les phénomènes dont les traces mêmes ont disparu.<br />

Les <strong>de</strong>ux Belgiques sont-elles restées en arrière <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong>ux Germanies, <strong>et</strong> peut-on<br />

croire qu’elles aient manqué d’organisation ecclésiastique alors que déjà les villes<br />

1 Heriger, Gesta episc. tungrensium, c. 7 ; Flodoard, Hist. Ecclés. rem., I, 3.<br />

2 Saint Irénée, Adversus hæreses, II, X, 2.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!