clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée
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siècle, ainsi que l’atteste un chroniqueur <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te époque1. Le pont dont il est ici<br />
question donnait passage sur <strong>la</strong> rivière à <strong>la</strong> voie romaine <strong>de</strong> Trèves à Reims, que<br />
Clovis n’avait qu’à suivre pour se rendre en c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière ville. Suivant<br />
l’itinéraire indiqué par notre hagiographe, après sa victoire sur les A<strong>la</strong>mans, il<br />
avait d’abord passé par Toul, puis avait remonté vers le nord <strong>et</strong> s’était dirigé du<br />
côté <strong>de</strong> l’Aisne <strong>et</strong> du <strong>pays</strong> <strong>de</strong> Voncq2. On s’est étonné <strong>de</strong> lui voir prendre un<br />
chemin si peu direct ; ce voyage a semblé fort invraisemb<strong>la</strong>ble, <strong>et</strong> l’on a voulu en<br />
tirer un argument contre l’authenticité du récit3. Mais si étrange que ce détour<br />
paraisse, il a pu être déterminé par un motif qui nous est inconnu4, <strong>et</strong> nous ne<br />
voyons pas <strong>de</strong> raisons suffisantes pour nous inscrire en faux, <strong>et</strong> pour rej<strong>et</strong>er<br />
d’une façon absolue toutes les données fournies par <strong>la</strong> Vie <strong>de</strong> saint Vaast.<br />
Ainsi, sans vouloir pénétrer plus avant dans le débat, nous nous en tenons à<br />
l’opinion admise jusqu’ici par <strong>la</strong> très gran<strong>de</strong> majorité <strong><strong>de</strong>s</strong> historiens, <strong>et</strong> malgré lés<br />
objections qu’on lui a opposées, nous pensons qu’elle a toutes les probabilités<br />
pour elle. Avec les érudits dû dix-septième <strong>et</strong> du dix-huitième siècle, avec<br />
Junghans5, avec M. Kurth6, nous adm<strong>et</strong>tons que les prétentions <strong>de</strong> Reims sont<br />
fort légitimes, <strong>et</strong> que c<strong>et</strong>te ville a été véritablement le berceau <strong>de</strong> <strong>la</strong> France<br />
chrétienne.<br />
Après avoir reconnu que Clovis se rendit à Reims pour recevoir le baptême, il est<br />
permis <strong>de</strong> serrer <strong>de</strong> plus près <strong>la</strong> question topographique, <strong>et</strong> <strong>de</strong> rechercher en<br />
1 L’auteur <strong><strong>de</strong>s</strong> Gesta episcoporum Cameracensium, l. I, ch. VI : Cernitur usque in<br />
hodiernum ecclesia, dit-il (éd. Colvener, p. 19) ; voy. aussi AA. SS. Boll., février, t. I, p.<br />
797, note. Il faut observer toutefois qu’il parait faire ici un emprunt à <strong>la</strong> Vie <strong>de</strong> saint<br />
Vaast, composée par Alcuin (ibid., p. 796), dont il reproduit certaines expressions. Quoi<br />
qu’il en soit, l’existence <strong>de</strong> l’église est très réelle ; l’église du vil<strong>la</strong>ge <strong>de</strong> Rilly-aux-Oies<br />
avait hérité du vocable <strong>de</strong> saint Vaast, <strong>et</strong> le conservait encore au dix-septième <strong>et</strong> au dixhuitième<br />
siècle. Un document <strong>de</strong> 1774 constate qu’on y venait en pèlerinage pour<br />
invoquer ce saint (Archives <strong>de</strong> Reims, fonds <strong>de</strong> l’archevêché, G. 231, doyenné d’Attigny ;<br />
cf. Inventaire sommaire, série G, t. I, p. 300).<br />
2 Cf. von Schubert, Die Unterwerfung <strong>de</strong>r A<strong>la</strong>mannen unter die Franken, p. 169.<br />
3 Krusch, l. cit., p. 430.<br />
4 Le R. P. Jubaru, dans l’excellent article qu’il a publié sur le baptême <strong>de</strong> Clovis (Étu<strong><strong>de</strong>s</strong><br />
religieuses, t. LXVII, 15 février 1896, p 297 <strong>et</strong> suiv.), présente une explication fort<br />
ingénieuse. La ville d’Attigny, située non loin <strong>de</strong> Voncq, au bord <strong>de</strong> l’Aisne, aurait été dès<br />
lors un domaine royal, <strong>et</strong> l’une <strong><strong>de</strong>s</strong> rési<strong>de</strong>nces préférées du monarque. S’il en est ainsi,<br />
celui-ci a très bien pu, à l’issue <strong>de</strong> sa campagne, venir y faire un séjour, <strong>et</strong> pour s’y<br />
rendre en arrivant <strong>de</strong> Toul, il <strong>de</strong>vait forcément passer l’Aisne à l’endroit désigné par<br />
l’auteur <strong>de</strong> <strong>la</strong> Vie <strong>de</strong> saint Vaast. C’est à Attigny que Clotil<strong>de</strong> aurait mandé en secr<strong>et</strong> saint<br />
Remi, pour achever l’instruction religieuse <strong>de</strong> son époux <strong>et</strong> pour le déci<strong>de</strong>r à recevoir le<br />
baptême, <strong>et</strong> <strong>de</strong> là, une fois <strong>la</strong> résolution prise, Clovis <strong>et</strong> sa suite auraient gagné Reims<br />
directement par <strong>la</strong> voie <strong>antique</strong> <strong>de</strong> Trèves. C<strong>et</strong>te hypothèse est, à première vue, assez<br />
séduisante ; malheureusement, elle pèche par <strong>la</strong> base, car Attigny n’est entré dans le<br />
domaine royal que beaucoup plus tard, sous le règne <strong>de</strong> Clovis II. Helgaud dans son<br />
Epitoma vitæ Roberti regis (Duchesne, Hist. Francorum script., t. IV, p. 591, nous<br />
apprend que Liébaud, abbé <strong>de</strong> Saint-Aignan d’Orléans, avait cédé à Clovis II <strong>la</strong> terre<br />
d’Attigny, agellum Attiniacum, cum cunctis sibi adjacentibus, super Axonam duvium<br />
situm en échange du domaine <strong>de</strong> Fleury-sur-Loire (voyez Murlot, M<strong>et</strong>rop. Remensis hist.,<br />
t. II, p. 227 ; Mabillon, De re diplomatica, p. 248). En présence d’un texte aussi formel, il<br />
est, impossible <strong>de</strong> faire remonter le pa<strong>la</strong>is royal d’Attigny jusqu’aux premiers<br />
Mérovingiens.<br />
5 Geschichte <strong>de</strong>r fränkischen Kœnige Chil<strong>de</strong>rich und Chlodovech, 57.<br />
6 L. cit., p. 415.