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Les mondes darwiniens

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[philippe h u n e man & édouar d machery / la psyc holog i e évolution n iste : enjeux, rés u ltats, débats]<br />

cognition. <strong>Les</strong> premières réalisations du programme portèrent sur le test de<br />

sélection de Wason, qui met en évidence des défauts de raisonnement logique<br />

(sur les énoncés conditionnels) extrêmement répandus dans la population 9 .<br />

Comme le montre Cosmides, si le test de sélection de Wason est formulé<br />

de manière à évaluer la détection d’entorses à un contrat (c’est-à-dire que<br />

répondre correctement à ce test consiste à déterminer si quelqu’un ne remplit<br />

pas les engagements qu’il avait contractés ou n’obéit pas aux devoirs et règles<br />

auxquels il est soumis), ces erreurs disparaissent et les gens raisonnent alors<br />

correctement ; cela laisse penser que nous avons un module adapté à la<br />

résolution d’un certain type de problèmes (un problème essentiellement<br />

social : la détection des entorses à des contrats), qui se met à errer lorsqu’il est<br />

appliqué à des problèmes généraux 10 . De manière générale, les biais cognitifs,<br />

c’est-à-dire les erreurs systématiques que produit la cognition, sont un objet<br />

d’étude relativement fructueux pour cette approche, qui les traite de la même<br />

manière que les erreurs révélées par le test de sélection de Wason. Par exemple,<br />

Gigerenzer & Hoffrage 11 ont développé l’hypothèse suivante : si les gens font<br />

moins d’erreurs systématiques lorsque des problèmes de probabilités 12 sont<br />

formulés en termes de fréquence 13 , c’est que les hominidés faisaient face à<br />

des occurrences répétées d’événements dans leur environnement (et non<br />

à des informations probabilistes présentées comme des pourcentages ou<br />

des fractions) et qu’en conséquence, la sélection naturelle a sélectionnée un<br />

module de traitement des fréquences relatives d’événements. Ou encore,<br />

la théorie de la gestion des erreurs (« error management theory »), initiée<br />

par Martie Haselton, développe l’idée que certaines erreurs ont un coût<br />

asymétrique 14 . En particulier, un faux positif est souvent moins dommageable<br />

9. Cosmides (1989), “The logic of social exchange : Has natural selection shaped how<br />

humans reason? Studies with the Wason selection task”, Cognition, 31 @.<br />

10. Cf., cependant, la critique de Sperber, Cara & Girotto (1995), “Relevance theory<br />

explains the selection task”, Cognition, 57 @.<br />

11. Gigerenzer & Hoffrage (1995), “How to improve Bayesian reasoning without instruction<br />

: Frequency formats”, Psychological Review, 102 @.<br />

12. De type : « Si la probabilité qu’un test de maladie détecte effectivement une certaine<br />

maladie est 0,9, et si la probabilité qu’un individu dans une population ait<br />

cette maladie est de 0,03, quelle est la probabilité qu’un individu testé positif dans<br />

cette population ait bien cette maladie ? »<br />

13. C’est-à-dire : au lieu de dire « la probabilité qu’un individu ait une certaine maladie<br />

est de 0,9 », on dit « 9 individus sur 10 ont une certaine maladie ».<br />

14. Par exemple, lorsque j’évalue ma distance de freinage devant un mur, il vaut mieux<br />

se tromper en s’arrêtant trop tôt que se tromper en s’arrêtant trop tard. Haselton &

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