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Les mondes darwiniens

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[les mon des <strong>darwiniens</strong>]<br />

plus proche de qui, accessibles à l’investigation). Ce fut le cas par exemple<br />

pour Archaeopteryx, oiseau fossile découvert en 1861, conçu comme l’ancêtre<br />

des oiseaux. Il faut comprendre que dès lors, les relations d’ancêtres à<br />

descendants furent conçues entre taxons, comme ce fut le cas dès 1866 dans<br />

les arbres des paléontologues transformistes français Albert Gaudry (sur les<br />

hyènes fossiles 89 ) et allemand Franz Hilgendorf (sur les planorbes fossiles) où<br />

les fossiles attestent les filiations de par leur qualité même de fossiles. Lorsque<br />

les relations d’ancêtres à descendants seront dessinées entre taxons de plus<br />

haut rang encore, les fossiles continueront d’incarner des ancêtres concrets,<br />

constituant alors des ponts entre les grades, ou entre les grades et les clades.<br />

Le fossile comme ancêtre concret participe de la logique gradiste. Tant et si<br />

bien que dans toute l’iconographie de ces auteurs et de leurs héritiers du xx e<br />

siècle (tels Alfred Romer), les fossiles sont représentés aux nœuds des branches<br />

des arbres phylogénétiques, erreur que font encore aujourd’hui nombre de<br />

paléontologues et de médias.<br />

La deuxième raison tient au fait qu’on a voulu injecter dans la classification<br />

biologique beaucoup plus que la seule phylogénie. En effet, la systématique<br />

de l’époque, que l’on qualifiera plus tard de « systématique éclectique », s’employait<br />

à traduire non seulement les « affinités évolutives », mais aussi les<br />

« sauts adaptatifs » et le « degré de complexité » réalisés par des taxons entiers<br />

appelés « grades ». Par exemple, on sait depuis la fin du xix e siècle que les<br />

oiseaux ont certaines affinités avec les dinosaures théropodes. Autrement dit,<br />

certains dinosaures théropodes (comme le Velociraptor) sont plus apparentés<br />

aux oiseaux qu’à n’importe quel autre reptile ; c’est-à-dire qu’ils partagent<br />

avec les oiseaux des ancêtres communs exclusifs. Cela signifie que la classe<br />

des reptiles est hétérogène sur le plan phylogénétique : elle comprend des<br />

éléments (certains dinosaures) plus apparentés à des organismes non reptiles<br />

(les oiseaux) qu’aux autres reptiles. Malgré cela, au lieu d’inclure les oiseaux<br />

dans les reptiles afin de restituer à ces derniers une partie de leur histoire, on<br />

a maintenu durant un siècle une classe des oiseaux séparée de la classe des<br />

reptiles pour souligner une grande différence anatomique globale entre les<br />

deux classes. <strong>Les</strong> oiseaux ayant appris à voler, ils ont acquis sur leur propre<br />

branche de l’arbre évolutif une « somme » de spécialisations (plumes, bréchet,<br />

anatomie du membre antérieur, etc.) qui marque un « saut adaptatif », ou<br />

encore réalisent un bond en terme de « degré de complexité » (bien que cette<br />

89. Cf. Tassy (1991), L’arbre à remonter le temps, Christian Bourgois, p. 60.

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