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Les mondes darwiniens

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[t h o m a s h e a m s / de quoi la b iolog i e synthétiqu e est-elle le nom ?]<br />

nombreuses découvertes ou vers une gueule de bois généralisée du secteur<br />

des biotechnologies…<br />

Cependant, cette branche de la biologie synthétique peut encore se nourrir<br />

d’un débat fructueux avec la recherche fondamentale. On peut ici mentionner<br />

les efforts qui sont faits pour donner de la maturité à cette approche en<br />

introduisant une composante « écologique » dans cette recherche. En effet,<br />

les espèces sur Terre vivent toutes (à de surprenantes exceptions prêt 68 ) en<br />

interaction avec d’autres, selon des modalités très variées, allant du parasitisme<br />

à la symbiose, en passant par les relations proies-prédateurs. Il n’y a de<br />

vivant que s’il y a échange avec du vivant (ce qui rend délicate la définition<br />

de la vie d’« un » organisme pris isolément). Or si l’on y songe, les bactéries<br />

biosynthétiques décrites dans cette section sont pensées comme des purs<br />

systèmes de production, sans interaction entre eux ou avec d’autre, ce qui<br />

est un grand écart significatif avec le monde naturel et darwinien dont on<br />

les extrait. Cette situation quelque peu artificielle est peut-être sur le point<br />

d’évoluer puisque plusieurs groupes en prennent conscience et plutôt que de<br />

chercher à obtenir une bactérie exceptionnelle, s’orientent vers la conception<br />

de « consortium microbiens » 69 incluant plusieurs espèces réalisant chacune<br />

des sous-tâches de la fonction espérée. Même si l’on imagine les nombreuses<br />

difficultés à résoudre (comment gérer les proportions de chacune ? comment<br />

faire dépendre les espèces les unes des autres ? comment éviter les transferts<br />

génétiques horizontaux ? etc.), il est intéressant de voir que celles-ci<br />

ne repoussent pas les chercheurs qui constatent bien par ailleurs les limites<br />

conceptuelles blotties derrière le fantasme de la « super-bactérie » qui pourrait<br />

tout faire. Que des dynamiques écologiques et évolutives, et leur modélisation,<br />

soient convoquées dans cet univers d’ingénieurs rêvant de précision est un<br />

signe que l’on ne peut aussi aisément que prévu faire fonctionner le vivant<br />

avec des lois qui ne sont pas les siennes.<br />

Il demeure enfin un domaine où cette approche « ingénieur » peut légitimement<br />

soulever l’enthousiasme. Adossé à l’initiative Biobricks, existe depuis<br />

68. Cf. Chivian et al. (2008), “Environmental genomics reveals a single-species ecosystem<br />

deep within Earth”, Science, 322(5899) @.<br />

69. Brenner et al. (2008), “Engineering microbial consortia : a new frontier in synthetic<br />

biology”, Trends Biotechnol., 26(9) @. Purnick & Weiss (2009), “The second<br />

wave of synthetic biology : from modules to systems”, Nat. Rev. Mol. Cell Biol.,<br />

10(6) @.

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