22.06.2013 Views

Les mondes darwiniens

Les mondes darwiniens

Les mondes darwiniens

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

866 / 1576<br />

[les mon des <strong>darwiniens</strong>]<br />

conditions de la lutte pour l’existence 1 ». Rappelons que Darwin était parti du<br />

constat établi par l’économiste Robert Malthus (1766-1834) que les espèces<br />

avaient tendance à croître en proportion géométrique ou exponentielle, si<br />

bien que chacune aurait rapidement envahi la Terre, les conditions fussentelles<br />

restées favorables. Or, à cause de la limitation de l’espace et de la rareté<br />

des ressources, on pouvait en inférer que les êtres vivants étaient engagés<br />

dans une « lutte pour l’existence » conduisant à l’élimination de nombreux<br />

individus à chaque génération. Darwin précise dans L’Origine des espèces que<br />

cette lutte ou concurrence vitale, malgré son caractère chaotique et complexe,<br />

obéit à des lois dont on peut admirer les résultats dans la nature. Et s’il donne<br />

des exemples de proportions harmonieuses entre espèces résultant de cette<br />

lutte – des « adaptations » selon ses propres termes –, il avoue honnêtement<br />

son ignorance quant à la forme des lois qui règlent ces rapports. Pour sa part,<br />

Haeckel ne contribuera pas activement au développement de cette nouvelle<br />

science « des relations totales entre les animaux et leurs relations inorganiques<br />

et organiques avec leur environnement », se contentant de lui inventer un<br />

nom, « Oekologie », sur la base de la racine grecque Oïkos (maison).<br />

Alors que pour l’histoire naturelle, adossée à une conception téléologique<br />

et providentialiste des phénomènes naturels, les processus qui ressortissent à<br />

ce que nous nommons aujourd’hui l’écologie ne font que conforter la place de<br />

toutes les espèces dans la scala naturae ou « chaîne des êtres », pour Darwin,<br />

les processus écologiques (la concurrence vitale et la « place » des espèces<br />

dans le milieu) sont clairement distincts des processus évolutifs (la sélection<br />

naturelle), même s’ils relèvent d’une complémentarité obligée dans le cadre<br />

explicatif de la théorie de l’évolution.<br />

Par la suite, Darwin ne s’intéressa guère aux lois de la concurrence vitale<br />

et, comme le confirme une rapide recherche sur l’ensemble de ses œuvres<br />

publiées en ligne 2 , il n’employa jamais le néologisme « oecology » dont il prit<br />

pourtant connaissance dans Generelle Morphologie que Haeckel lui envoya<br />

après sa visite à Downe en 1866. Nous pourrions bien sûr évoquer les travaux<br />

de Darwin sur les vers de terre ou sur les orchidées qui témoignent tous<br />

d’un remarquable sens des relations d’échanges biologiques et physico-chimiques<br />

entre les êtres vivants et leur milieu. Mais les faits que rapportent<br />

Darwin, s’ils confortent sa théorie de l’évolution en fournissant des exem-<br />

1. Haeckel (1870), “Über Entwicklungsgand und Aufgabe der Zoologie”, Jenaische<br />

Zeitschrift für Naturwissenschaft.<br />

2. The Complete Work of Charles Darwin Online @. (Ndd.)

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!