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Les mondes darwiniens

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[stephen m. d o w n e s / la psyc holog i e évolution n iste, l’a da p tat i o n et l’organ isation]<br />

L’adaptationnisme méthodologique est un principe heuristique ; il préconise<br />

aux biologistes (et aux spécialistes des disciplines voisines) de commencer<br />

par la recherche de l’adaptation, et de voir ce que cela donne, mais cela<br />

sans véhiculer de thèse sur l’importance quantitative de l’adaptation dans le<br />

monde 59 . Étant donné que l’adaptationnisme explicatif n’a pas d’équivalent<br />

dans la nomenclature de Sober, prenons le temps d’en exposer les tenants et<br />

les aboutissants.<br />

Godfrey-Smith classe Richard Dawkins parmi les adaptationnistes explicatifs.<br />

« Le premier chapitre de The Blind Watchmaker [Dawkins 1987] présente une<br />

apologie détaillée de la thèse selon laquelle l’organisation manifeste [apparent<br />

design] de la nature pose un problème prééminent à la conception scientifique<br />

du monde, la tâche propre de la biologie étant d’y apporter une solution 60 . » On<br />

trouve également un plaidoyer éloquent en faveur de cette conception dans<br />

le livre de Dennett, Darwin’s Dangerous Idea (1995). Le sentiment de Godfrey-<br />

Smith au sujet de l’adaptationnisme explicatif – sentiment que je partage – est<br />

de séparer clairement la biologie de la théologie naturelle, plus que de servir de<br />

principe conducteur dans la recherche et la pratique biologiques. La sélection,<br />

dans l’esprit de l’adaptationnisme explicatif, « est une pièce maîtresse d’une<br />

entreprise intellectuelle plus vaste, l’entreprise de défense et d’illustration d’une<br />

conception du monde sécularisée 61 ». Pour l’adaptationnisme explicatif, la structure<br />

visible, par exemple celle d’organes complexes, est l’objet de la réflexion, et<br />

l’idée, c’est que cette structure peut être expliquée en termes évolutionnaires.<br />

Mais, comme Seger et Stubblefield l’ont montré en détail, les biologistes savent<br />

parfaitement cela depuis Darwin ! Ce n’est donc pas un principe permettant de<br />

produire des explications innovantes sur la gamme de phénomènes naturels<br />

tombant sous la coupe de la biologie de l’évolution.<br />

59. Tim Lewens (2009, “Seven Types of Adaptationism”, Biology and Philosophy, 24(2)<br />

@) compte sept versions différentes de l’adaptationnisme. Il emploie également la<br />

terminologie d’adaptationnisme « heuristique » pour caractériser la version méthodologique<br />

de Godfrey-Smith. Cependant, nous divergeons dans l’interprétation de<br />

cette version méthodologique de l’adaptationnisme : ainsi, il voit en Dennett l’un<br />

de ses représentants par excellence, alors que je range cet auteur parmi les adaptationnistes<br />

explicatifs (ce qui est aussi l’avis de Godfrey-Smith). Dennett tient en effet<br />

à l’idée que tous les traits, ou leur écrasante majorité, sont des adaptations.<br />

60. Godfrey-Smith (2001), “Three Kinds of Adaptationism. Adaptationism and<br />

Optimality” @, in S.H. Orzack & E. Sober (eds.), Adaptationism and Optimality,<br />

Cambridge UP @, p. 339.<br />

61. Ibid., p. 350.

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