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Les mondes darwiniens

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[philippe h u n e man / sélection]<br />

vérité de cette assertion relève fondamentalement des mathématiques, plus<br />

précisément du calcul des probabilités, plutôt que de la biologie. Le fait que<br />

Fisher 102 fasse un parallèle entre dynamique des allèles à fitness différentes<br />

et dynamique des intérêts de divers emprunts indique bien qu’il s’agit là de<br />

quelque chose qui n’est pas initialement biologique. Le contenu biologique<br />

vient après, à savoir lorsqu’on s’intéresse aux causes de la fitness. Dans cette<br />

optique, la sélection naturelle n’est pas une loi de la biologie, mais un principe<br />

mathématique qui soutient diverses généralisations biologiques possibles à<br />

caractère localement nomothétique. Ce principe implique par exemple une<br />

tendance à l’optimisation à l’œuvre dans les pools de gènes, et soutient ainsi<br />

la plupart des modèles en écologie comportementale 103 .<br />

Fisher 104 avait bien sûr introduit son « théorème fondamental de la sélection<br />

naturelle » comme « loi de l’évolution ». Néanmoins, cet énoncé est très<br />

délicat à interpréter. L’interprétation traditionnelle s’énonce ainsi : la variation<br />

de fitness moyenne d’une population est égale à la variance génétique<br />

additive 105 , ce qui implique qu’elle est toujours positive donc que la fitness<br />

moyenne croît. Cette interprétation se heurte à des contre-exemples immédiats,<br />

tels que des cas de sélection négativement dépendante à la fréquence,<br />

par exemple l’augmentation de la fréquence des « agressifs » dans un modèle<br />

faucon-colombe 106 . Récemment 107 , on l’a interprété différemment, comme<br />

102. Fisher (1958), The genetical theory of natural selection, Clarendon @, p. 28.<br />

103. Le lien entre sélection et optimisation semble évident ; la démonstration de cette<br />

évidence est donnée dans les articles récents d’Alan Grafen, par exemple (2002),<br />

“A First Formal Link between the Price Equation and an Optimization Program”,<br />

Journal of Theoretical Biology, 217 @.<br />

104. Fisher (1958), The genetical theory of natural selection, Clarendon @.<br />

105. Variance due à l’addition de la contribution des allèles à la valeur phénotypique,<br />

c’est-à-dire en négligeant les relations qui démentent cette additivité : épistasie,<br />

dominance, etc.<br />

106. Le jeu « faucon-colombe » a été popularisé par Maynard Smith (1982), Evolution<br />

and the theory of games, Cambridge UP @. (Cf. Clavien, ce volume.) <strong>Les</strong> faucons<br />

battent les colombes, les colombes fuient le combat ; la fitness des faucons est plus<br />

haute donc leur fréquence augmente, mais lorsqu’il y a beaucoup de faucons, il<br />

est plus avantageux d’être une colombe (les faucons s’éliminent les uns les autres).<br />

En ce sens, la fitness moyenne de la population n’augmente pas, contrairement<br />

au théorème.<br />

107. Cf. Frank & Slatkine (1994), “Fisher’s fundamental theorem of natural selection”,<br />

Trends in Ecology and Evolution, 7 @, après Price (1972), “Extension of covariance<br />

selection mathematics”, Annals of Human Genetics, 35 (4) @.

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