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Les mondes darwiniens

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[les mon des <strong>darwiniens</strong>]<br />

élémentaires, était nécessaire pour qu’un organisme même « rudimentaire »<br />

puisse vivre 39 . Cela pouvait être mis en relation avec les découvertes récentes<br />

démontrant le caractère fondamentalement exploratoire et non pas programmé<br />

des cellules 40 . D’autre part, cela pose une question à l’histoire de la<br />

vie. Si une telle complexité est nécessaire, si ces gènes en surnombre sont<br />

indispensables, par quel chemin fragile une vie primordiale aurait elle pu aboutir<br />

à ce palier 41 ? Une nouvelle jeta transitoirement le trouble. On découvrit en<br />

2006 un organisme possédant un génome incroyablement plus restreint que<br />

tout ce qui était connu auparavant. « Candidatus » Carsonella ruddii défia ces<br />

hypothèses en dévoilant un génome de 180 gènes 42 , soit moins que le LMG<br />

décrit à l’époque ! Mais les spécialistes même de la thématique donnèrent<br />

une explication plausible à cette contradiction apparente. Carsonella ruddii<br />

est un endosymbionte, c’est-à-dire un parasite intracellulaire, et cette bactérie<br />

a donc subi secondairement une réduction de génome, un grand nombre de<br />

ses fonctions de base étant prises en charge par la cellule-hôte. Ce délestage<br />

est tel qu’on peut en fait considérer qu’en perdant son autonomie, elle est en<br />

train, sous nos yeux, de devenir un organite intracellulaire 43 , à l’instar de la<br />

mitochondrie (usine à production énérgétique des cellules) dont on estime,<br />

d’après la théorie endosymbiotique, qu’elle est à la trace de l’internalisation,<br />

il y a 2 milliards d’années, d’une α-bactérie dans une cellule eucaryote ou une<br />

archée. Ainsi donc, C. ruddii est un cas d’école captivant, qui nous montre la<br />

39. Heams (2007), « Comment la vie est-elle possible ? Temps et réduction dans la<br />

problématique du vivant minimal », in Athané et al. (dir.), Matière première, revue<br />

d’épistémologie et d’études matérialistes, n° 2/2007 : Emergence et réductions,<br />

Syllepse.<br />

40. Heams (2011), « Expression stochastique des gènes et différenciation cellulaire »,<br />

in Kupiec et al. (dir.), Le hasard dans la cellule, Editions Matériologiques @. Cf.<br />

Kupiec, ce volume.<br />

41. Il convient de plus d’être prudent face à l’idée, intuitive mais peut-être trompeuse,<br />

que les premières « cellules » aient nécessairement été simples. Cf. notamment<br />

Forterre & Philippe (1999), “The last universal common ancestor (LUCA), simple or<br />

complex ?”, Biol. Bull., 196(3) @. Koonin (2003), “Comparative genomics, minimal<br />

gene-sets and the last universal common ancestor”, Nat. Rev. Microbiol., 1(2) @.<br />

Norris et al. (2007), “The first units of life were not simple cells”, Orig. Life Evol.<br />

Biosph., 37(4-5) @.<br />

42. Nakabachi et al. (2006), “The 160-kilobase genome of the bacterial endosymbiont<br />

Carsonella”, Science, 314(5797) @.<br />

43. Tamames et al. (2007), “The frontier between cell and organelle : genome analysis<br />

of Candidatus Carsonella ruddii”, BMC Evol. Biol., 7 @.

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