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Les mondes darwiniens

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[pa s c a l ta s s y / d a r w i n et la phylogénétiqu e : h i e r et aujou r d’h u i]<br />

États-Unis, dont la 3 e édition 60 vient d’être épinglée par Morrison 61 : « La facilité<br />

d’usage est une très bonne chose du point de vue informatique mais cela ne<br />

devrait pas se faire au détriment de la réflexion. »<br />

Patterson 62 avait affirmé il y a longtemps déjà que les caractères moléculaires<br />

étaient d’essence statistique. Ils le sont devenus, en tout cas. Mais les<br />

caractères morphologiques ? Peut-on décemment poser a priori un modèle<br />

d’évolution pour un caractère morphologique qui s’est transformé et fixé au<br />

hasard d’une spéciation il y a huit millions d’années dans une région quelconque<br />

du globe ? Je ne connais pas de morpho-anatomiste qui réponde par<br />

l’affirmative (mais certains y pensent, sans doute). La parcimonie serait donc<br />

convenable pour la forme, l’organe, le muscle, le vaisseau sanguin, le nerf, l’os,<br />

la dent, et non pour le nucléotide ? Qu’est-ce qui est donc en jeu dans cette<br />

opposition : le caractère ou le processus ?<br />

2.1 Effacement du signal et succès phylogénétiques<br />

Le dilemme est simple. Imaginons deux groupes frères 63 . Au cours de leurs<br />

évolutions respectives depuis leur différenciation ils ont tellement divergé<br />

que les différentes transformations morpho-anatomiques ont apparemment<br />

effacé le caractère qu’ils partageaient au moment de leur différenciation : il n’y<br />

aurait alors aucun moyen d’identifier leur relation de groupes frères. Imaginons<br />

maintenant deux groupes frères dont les taux d’évolution moléculaire sont tels<br />

que pour les gènes étudiés les accumulations de substitutions nucléotidiques<br />

redondantes effacent toute trace des nucléotides effectivement partagés au<br />

moment de leur différenciation ; il n’y aurait de nouveau aucun moyen d’identifier<br />

leur relation de groupes frères. Face à ce constat le morpho-anatomiste<br />

retournera à ses caractères morphologiques, en cherchera d’autres, et si rien n’y<br />

fait, il constatera la non-résolution. Le moléculariste cherchera un autre gène<br />

qu’il espérera non saturé 64 ; mais si rien n’y fait non plus, il lui reste à utiliser la<br />

60. Hall (2008), Phylogenetic Trees Made Easy, Sinauer Associates, Inc. @<br />

61. Morrison (2008), Book Reviews : “Phylogenetic Trees Made Easy : A How-to Manual,<br />

third edition, Barry G. Hall. 2008. Sinauer Associates, Sunderland, Massachusetts.<br />

xiv + 230 pp.”, Syst. Biol., 57 @, p. 660.<br />

62. Patterson (1987), “Introduction”, in Patterson (ed.) Molecules and morphology :<br />

conflict or compromise ?, Cambridge UP, p. 9.<br />

63. Deux groupes d’organismes (clades) qui descendent d’une espèce ancestrale<br />

exclusive.<br />

64. Gène non saturé : gène dont, pour tel ou tel site donné, les substitutions nucléotidiques<br />

ne sont pas multiples.

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