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Les mondes darwiniens

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[gu i llau m e b a l av o i n e / la génétiqu e du développement c o m pa r é e et son apport à la t héo r i e de l’évolution]<br />

fragments d’ADN était encore un tour de force au milieu des années 1970<br />

mais les techniques ont considérablement progressé et depuis le milieu des<br />

années 2000, certains laboratoires disposent désormais de séquenceurs capables<br />

d’analyser plusieurs milliards de nucléotides par jour. Combiné à l’accroissement<br />

des capacités de mémoire et de calcul des ordinateurs, le séquençage<br />

des gènes devient donc aujourd’hui un jeu d’enfant (de famille aisée toutefois).<br />

À l’origine, ce sont des gènes sans rapport direct avec le développement qui<br />

ont été séquencés, mais très vite des généticiens du développement se sont<br />

lancés dans l’application des nouvelles techniques aux mutants particuliers<br />

qu’ils avaient étudiés depuis parfois des décennies. Quel pouvait être la nature<br />

de ces gènes agissant au cours de l’embryogenèse et qui déterminent la forme<br />

des organismes ? Constituent-ils une classe particulière de gènes parmi les<br />

milliers présents sur les chromosomes ?<br />

Remarquablement, ce sont encore la drosophile et ses mutations qui ont<br />

permis de faire un bond qualitatif considérable sur ces questions et de préciser<br />

la notion de gène régulateur du développement ou simplement « gène<br />

du développement ». Le généticien américain Edward Lewis (1918-2004), prix<br />

Nobel en 1995, a joué un rôle crucial dans cette entreprise. Lewis a étudié les<br />

gènes homéotiques de la drosophile pendant une grande partie de sa carrière.<br />

Le corps d’une mouche est constitué d’une tête, d’un thorax composé<br />

de trois segments portant chacun une paire de pattes, et de huit segments<br />

abdominaux. Tous ces segments ont une anatomie différente et spécifique.<br />

<strong>Les</strong> mutations des gènes homéotiques provoquent chez la drosophile un changement<br />

d’identité de certains segments spécifiques du corps, qui prennent<br />

l’apparence d’autres segments. <strong>Les</strong> segments affectés sont toujours les mêmes<br />

pour un gène donné (figure 1 Þ). Lewis a spécifiquement étudié une série<br />

de mutants homéotiques produisant des transformations complémentaires<br />

tout le long du thorax et de l’abdomen des mouches. Au moyen de croisements<br />

entre les différentes souches mutantes, il a patiemment déterminé la<br />

position de ces gènes sur les chromosomes. Dans une publication clé (Lewis<br />

1978), il est arrivé à deux conclusions importantes. (i) <strong>Les</strong> gènes homéotiques<br />

sont organisés en complexes sur le chromosome, c’est-à-dire qu’ils sont tous<br />

regroupés à proximité immédiate les uns des autres sur la molécule d’ADN<br />

linéaire d’un seul chromosome. Lewis lui donna le nom de complexe Bithorax,<br />

du nom du plus spectaculaire mutant étudié. Par la suite, d’autres chercheurs<br />

établirent que d’autres gènes homéotiques de la drosophile, responsables,<br />

eux, de mutations dans la partie la plus antérieure du corps (tête et thorax),

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