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Les mondes darwiniens

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[gu i llau m e lecoi ntr e / filiation]<br />

génétique ou un processus lamarckien, ou un mutationnisme saltationniste,<br />

ou que sait-on encore. En fait, le processus fin de la transformation n’est pas<br />

directement convoqué pour concevoir une généalogie théorique des espèces ni<br />

pour en faire de la classification. Pour faire de la classification, ou pour justifier<br />

le « système naturel », la seule généalogie suffit. Un autre processus serait-il<br />

découvert pour expliquer pourquoi les générations organiques se suivent et<br />

ne se ressemblent pas, il n’y aurait pas une ligne à changer à ce paragraphe de<br />

Darwin. D’ailleurs, c’est ce que nous enseigne l’histoire des sciences. Mayr 8 et<br />

Gayon 9 précisent que si bien des scientifiques admirent dès le début le « descent<br />

with modification », peu d’entre eux adhérèrent dès le début à l’hypothèse de<br />

sélection naturelle, laquelle mit soixante-dix ans pour passer de l’hypothèse très<br />

plausible au fait expérimental indiscutable. En somme, là où l’on parle, dans les<br />

sciences des processus, de « descendance avec modification », dans les sciences<br />

des structures, l’ascendance commune (sa conséquence) suffit.<br />

L’ensemble de ces considérations nous amène à proposer la traduction suivante.<br />

Le premier « descent », puisqu’il est suivi de « with modification », est à<br />

traduire par « descendance avec modification » : il s’agit du cours généalogique<br />

au cours duquel se produisent les modifications. Le système naturel est légitime<br />

s’il prend en compte ce phénomène. Par contre, le second « descent » est clairement<br />

à traduire par « ascendance ». Il n’est pas suivi de « with modification »<br />

(puisqu’il l’implique déjà, s’agissant d’espèces distinctes) et réfère explicitement<br />

aux parents communs (parents au sens des géniteurs passés). Afin de restituer<br />

la logique du texte, la traduction suivante semble s’imposer :<br />

[…] que le système naturel est fondé sur la descendance avec modification ;<br />

que les caractères que les naturalistes considèrent comme montrant les véritables<br />

affinités entre une ou plusieurs espèces sont ceux qui ont été hérités<br />

d’un parent commun ; ceci étant, toute vraie classification est généalogique ;<br />

que la communauté d’ascendance est le lien caché que les naturalistes ont<br />

inconsciemment recherché, et non quelque plan inconnu de création, ni<br />

l’énonciation de propositions générales, ni les seuls regroupement ou séparation<br />

d’objets plus ou moins ressemblants. (Ma traduction.) 10<br />

Enfin, on remarquera que Barbier a ménagé ses lecteurs. Le texte de<br />

Darwin utilise une négation pour récuser l’emploi du créateur ou l’emploi<br />

8. Mayr (2004), Après Darwin, Dunod.<br />

9. Gayon (1992), Darwin et l’après-Darwin, Kimé.<br />

10. Ces difficultés de traduction portent encore en germe des incompréhensions<br />

entre chercheurs. Mais que dire de la même erreur de traduction, encore plus

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