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Les mondes darwiniens

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[les mon des <strong>darwiniens</strong>]<br />

base. Plus celui-ci est complexe (par exemple, un gène, un ensemble de gènes),<br />

moins l’abîme à combler entre matière inerte et organisme vivant sera profond.<br />

Si l’on se lance le défi de partir non pas de gènes mais de leur précurseurs, les<br />

nucléotides (qui constituent les gènes), voire de molécules encore plus petites,<br />

les précurseurs des nucléotides, le défi d’aboutir in vitro à une cellule vivante<br />

est d’autant plus impressionnant. En résumé, il faut savoir d’où l’on part, et<br />

symétriquement, où l’on souhaite aboutir, pour estimer l’ampleur du défi que<br />

l’on s’est lancé 15 . Cela explique l’impression que l’on a parfois d’avoir entendu<br />

parler de vie recréée à plusieurs reprises dans le journal. Point de départ et<br />

d’arrivée n’étaient pas les mêmes, comme on va le voir. Et disons-le d’emblée :<br />

à ce jour, nul organisme vivant n’a été créé.<br />

À ce stade, il est inévitable d’aborder de front la redoutable question de<br />

ce qu’est la vie. Aussi paradoxal que cela puisse paraître aux non-spécialistes,<br />

il n’existe pas dans la communauté des biologistes de définition consensuelle<br />

de la vie, pourtant leur objet d’étude 16 . D’où, on l’imagine aisément, un lot<br />

de malentendus quand il s’agit de se placer à la frontière du vivant et du<br />

non-vivant. <strong>Les</strong> biologistes préfèrent souvent dire, et largement à raison,<br />

qu’ils connaissent des organismes vivants plutôt que « la » vie, et que cela<br />

suffit à nourrir leurs questionnements. Cette approche raisonnable ne doit<br />

pas cependant nous servir de paravent, et une définition de la vie peut être<br />

esquissée. On proposera ici la suivante, classique : est vivant tout système<br />

capable de se répliquer, d’avoir un métabolisme et d’évoluer. Cette définition<br />

est utile en ce qu’elle nous donne une clé pour comprendre pourquoi elle fait<br />

intrinsèquement débat : puisqu’elle se subdivise en trois caractéristiques, elle<br />

ouvre la porte à une pondération différentielle de celles-ci. Certains auteurs<br />

vont accorder une importance primordiale à la réplication, de sorte qu’en<br />

entité se répliquant, évoluant, mais n’ayant pas de métabolisme, comme<br />

un virus, pourra être considérée par certains comme quasi « vivante », du<br />

moins cela posera-t-il à ces derniers moins d’états d’âme qu’à ceux pour qui<br />

un métabolisme, le maintien actif d’un milieu intérieur loin de l’équilibre<br />

thermodynamique, est primordiale dans la définition. La situation inverse<br />

pourrait aussi être décrite. À titre d’illustration de ce débat, on peut évoquer<br />

la publication en 2008 d’une étude démontrant qu’un virus pouvait<br />

15. Channon et al. (2008), “Synthetic biology through biomolecular design and engineering”,<br />

Curr. Opin. Struct. Biol., 18(4) @.<br />

16. Cf. Tirard, ce volume. (Ndd.)

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