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Les mondes darwiniens

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[les mon des <strong>darwiniens</strong>]<br />

naissante 84 et a décrit le vivant sous forme déterministe, au sein duquel les<br />

être vivants seraient le résultat d’un « programme génétique ». Cette première<br />

approximation du fonctionnement des organismes, pour utile qu’elle<br />

soit quand il faut enseigner les principes fondamentaux du mode d’action<br />

moléculaire des gènes, ne tient en fait pas la route tant sont multiples les différentes<br />

interactions du moindre gène avec tous les autres, du moindre organisme<br />

avec les autres, avec son environnement. La prédictibilité des résultats<br />

d’un programme génétique est constamment mise en difficulté par l’accrétion<br />

d’un champ de contraintes incroyablement complexe, variant dans le temps et<br />

dans l’espace, qui font de la notion même de programme (étymologiquement<br />

« écrit à l’avance ») une exception beaucoup plus qu’une règle. Or que disent<br />

les tenant de la biologie synthétique ? Sans surprise, ce discours sur l’irréductibilité<br />

de cette complexité biologique ne reçoit pas leur adhésion. Comme le fait<br />

remarquer Bernadette Bensaude-Vincent 85 , le programme de déconstruction<br />

de cette complexité est vu par eux comme un « antidote opportun » pour se<br />

défaire définitivement du vieux fond de « vitalisme chronique » qui serait tapi<br />

derrière ce discours sur la complexité 86 . C’est cette ambition que l’on trouve<br />

dans un article iconoclaste de Yuri Lazebnik, « Un biologiste peut-il réparer<br />

une radio ? 87 », qui défend l’idée qu’en s’en donnant les moyens, on peut<br />

méthodiquement surmonter les obstacles induits par la complexité dans le<br />

cadre d’une approche ingénieur et réparer une cellule comme un transistor 88 .<br />

Chacun sera libre de se faire sa propre opinion, mais il est possible d’apporter<br />

des éléments de contradiction à cette manière de voir. Tout d’abord, on pourrait<br />

retourner la critique en « rationalité » et se demander quelle est la pertinence<br />

de déconstruire un génome en éléments de base sachant que ceux-ci<br />

n’ont jamais existé un par un, dans un catalogue, indépendamment les uns<br />

des autres. Si séduisante que soit la vision « modulaire » du vivant, elle ne doit<br />

pas nous aveugler au point de nous faire oublier qu’elle n’est qu’une manière<br />

84. Cf. Segal (2003), Le zéro et le un. Histoire de la notion scientifique d’information au<br />

20 e siècle, Syllepse, chap. 7.<br />

85. In Morange (dir.) (2009), “Historical and Philosophical Foundations of Synthetic<br />

Biology”, Workshop ENS @.<br />

86. Cf. l’éditorial non signé “Meanings of ‘life’”, Nature, vol. 447, 7148, 28 june 2007<br />

@.<br />

87. Lazebnik (2002), “Can a biologist fix a radio ? Or, what I learned while studying<br />

apoptosis”, Cancer Cell, 2(3) @.<br />

88. Sur ce genre d’approche, cf. Braillard, ce volume. (Ndd.)

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