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Les mondes darwiniens

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[les mon des <strong>darwiniens</strong>]<br />

données et connaissances sources de ce qui relève de la nature de la question<br />

posée. Des auteurs qui écrivent sur les méthodes de la systématique prescrivent<br />

une abstinence en matière de processus en amont de la construction<br />

de l’arbre au motif que cet arbre pourrait amener des connaissances sur les<br />

processus qu’eux-mêmes ne questionnent même pas… s’ils sont de vrais systématiciens<br />

! À moins que par « processus » soit entendue la simple mise en<br />

série des états d’un même caractère comme possiblement dérivés les uns des<br />

autres, que permet effectivement l’arbre et lui seul. Ici le terme de « processus<br />

» serait alors mal choisi, car il n’y a pas démonstration expérimentale d’une<br />

relation de cause à effet. Il n’y a que mise en cohérence maximale d’attributs,<br />

mise en preuve qui ne relève que des sciences des patrons.<br />

Pour finir sur cette alternative, et si on élargit le champ, ce qui est souhaitable,<br />

les auteurs qui ont écrit ces lignes entendent sans doute leur donner<br />

une portée plus générale. Ils prescrivent une abstinence en matière de processus<br />

en amont de la construction de l’arbre, au motif que cet arbre pourrait<br />

amener des connaissances sur les processus qui pourraient être élaborées par<br />

d’autres métiers que celui de la systématique. Si tel est le sens donné à cette<br />

prescription, elle se justifie alors plus par son idéalisme que par son réalisme<br />

au regard des conditions de la recherche. D’autres chercheurs, avec d’autres<br />

types de questions en tête que celles des systématiciens, auront besoin d’une<br />

phylogénie fiable. Cette dernière sera rarement celle d’un seul auteur, parce<br />

que les phylogénies publiées par les laboratoires sont rarement fiables dans<br />

leur entièreté. C’est la confrontation de diverses phylogénies obtenues par<br />

différentes équipes et différentes sources de données sur les mêmes taxons (ou<br />

presque) qui établit la fiabilité d’une hypothèse phylogénétique. Dans ce processus<br />

de validation des connaissances objectives, on constatera que certaines<br />

équipes auront suivi la prescription pour construire leur arbre, d’autres non ; et<br />

la corroboration des mêmes clades par des sources différentes aura un poids<br />

bien plus fort pour remporter l’assentiment que le respect d’une abstinence<br />

initiale au regard des « processus ». Dotée d’une portée aussi générale, la<br />

prescription des cladistes de cette époque confond la phase de démonstration<br />

avec la phase de validation des connaissances produites.<br />

Terminons-en avec la question de savoir quels arbres sont phylogénétiques<br />

et quels arbres ne le sont pas. Un graphe connexe non cyclique (ce qu’on appelle<br />

communément aujourd’hui un arbre), sur le plus pur plan algorithmique, ne<br />

montre que les partages d’attributs : « qui partage quoi avec qui ». Il ne deviendra<br />

phylogénétique que nourri de la théorie de l’évolution sous son bagage

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