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Les mondes darwiniens

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[a n o u k bar b e rouss e & sa r a h sa m a d i / pou rquoi et c o m m e n t formaliser la t héo r i e de l’évolution]<br />

Insister comme nous le faisons sur la matérialité du substrat transmis lors<br />

de la reproduction nous éloigne des conceptions de la théorie de l’évolution<br />

qui font jouer à la notion d’information un rôle central (cf. annexe 2). Nous<br />

estimons en effet qu’il vaut mieux se passer de cette notion en raison des<br />

difficultés qu’elle soulève, en vertu de la méthodologie minimaliste que nous<br />

adoptons. De même, notre approche permet d’évacuer comme non pertinentes<br />

toutes les discussions relatives à la notion de gène et à son caractère<br />

éminemment problématique 37 .<br />

Une autre conséquence de ce choix théorique est qu’il nous permet de<br />

statuer clairement sur la place des organismes unicellulaires dans le réseau<br />

généalogique. Certains arguments, reposant principalement sur les recherches<br />

de phylogénies moléculaires, mettent en doute l’hypothèse selon laquelle on<br />

pourrait reconstituer un unique arbre de la vie, en particulier aux débuts de<br />

son histoire 38 . En effet, les reconstitutions de phylogénies à partir de gènes<br />

donnent des résultats peu lisibles sur les nœuds profonds du réseau. Il est<br />

donc très délicat d’obtenir un arbre unique à partir des phylogénies moléculaires.<br />

Nous répondons à ces arguments que dès que l’on quitte le « point de<br />

vue des gènes » pour adopter, comme nous le faisons, le « point de vue des<br />

organismes », les difficultés se dissipent. Représenter l’histoire de la vie par un<br />

réseau généalogique d’organismes élimine en effet tous les biais introduits par<br />

les phylogénies moléculaires et fait clairement apparaître leur origine : il n’y a<br />

aucune raison que les arbres de gènes et les arbres d’organismes soient superposables,<br />

entre autres à cause des transferts horizontaux de gènes 39 , qui sont<br />

courant chez les organismes unicellulaires. <strong>Les</strong> phylogénies de gènes visent en<br />

effet à reconstruire des degrés d’apparentement mais non des généalogies.<br />

37. Cf. Keller (2000), The Century of the Gene, Harvard UP. Morange (1998), La part<br />

des gènes, Odile Jacob. Moss (2003), What Genes Can’t Do, MIT Press.<br />

38. Cf. par exemple, Woese (2000), “Interpreting the universal phylogenetic tree”,<br />

PNAS, 97 (15) @. Doolittle & Bapteste (2007), “Pattern pluralism and the Tree of<br />

Life hypothesis”, PNAS, 104 (7) @.<br />

39. On appel « transfert horizontal » la transmission de parties de la molécule d’ADN<br />

d’une bactérie à une autre par simple contact, indépendamment d’un épisode de<br />

reproduction. Il s’oppose au transfert vertical du génome lors de la reproduction.<br />

Alors que chez les organismes multicellulaires, la reproduction et la transmission<br />

de gènes vont de pair, il n’en va pas de même chez les bactéries, chez qui ces deux<br />

processus sont découplés, ce qui explique la difficulté de construire des arbres<br />

phylogénétiques à partir de données génétiques.

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