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Les mondes darwiniens

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[les mon des <strong>darwiniens</strong>]<br />

ces systèmes. Du fait de la loi des grands nombres, la variabilité devient négligeable<br />

et le système semble se comporter de manière déterministe alors que<br />

les lois sous-jacentes sont probabilistes. Toute la physique statistique fonctionne<br />

selon ce schéma. La diffusion fournit un exemple caractéristique. <strong>Les</strong><br />

molécules et les atomes individuels se déplacent par une marche au hasard,<br />

mais au niveau macroscopique la diffusion est décrite par les lois déterministes<br />

de Fick. Un tel « principe d’ordre à partir du désordre » peut-il également<br />

fonctionner en biologie ? Selon Schrödinger et les biologistes moléculaires la<br />

réponse est négative. Du fait de leur nombre trop petit, si les molécules biologiques<br />

étaient soumises au hasard brownien la variabilité des phénomènes<br />

physiologiques serait trop grande, incompatible avec la très grande précision et<br />

la reproductibilité qui les caractérisent. Il doit donc exister, selon Schrödinger,<br />

un « principe d’ordre à partir de l’ordre » qui permet aux protéines d’échapper<br />

au hasard brownien et de se comporter de manière très précise. Ce principe<br />

correspond à ce que nous appelons aujourd’hui l’information génétique. Ainsi,<br />

les molécules biologiques, au lieu de se comporter de manière purement statistique<br />

comme celles d’un système physique, seraient dirigées d’une manière<br />

strictement déterminée par les instructions correspondant à cette information<br />

génétique contenue dans les gènes.<br />

Un tel principe soulève immédiatement la question des modalités concrètes<br />

de la mise en œuvre de l’information génétique. Par quel processus matériel<br />

l’organisme virtuel codé dans les gènes est-il transformé en un être réel ?<br />

Comment les signaux biologiques véhiculent-ils l’information ? Schrödinger<br />

suggéra l’existence de lois physiques particulières à la biologie mais à partir<br />

des années 1960, ce fut la propriété d’auto-assemblage stéréospécifique des<br />

protéines qui fut mise en avant par les biologistes moléculaires pour régler ce<br />

problème. La propriété de stéréospécificité induirait des interactions moléculaires<br />

rigoureusement ordonnées. De par les contraintes de forme et de charge<br />

électrique liées à leur structure tridimensionnelle, les protéines se reconnaîtraient<br />

et interagiraient spécifiquement, comme les pièces d’un puzzle, chaque<br />

protéine n’ayant qu’un seul partenaire moléculaire, ou un nombre défini<br />

très limité, excluant ainsi toute possibilité combinatoire et tout hasard dans<br />

ces interactions (figure 1 ). Or, la structure tridimensionnelle des protéines<br />

dépend de leur séquence en acides aminés et celle-ci dépend elle-même de la<br />

séquence en nucléotides de l’ADN. L’information génétique contrôlerait ainsi<br />

les processus biologiques par l’intermédiaire de ces phénomènes d’interaction<br />

moléculaire spécifique. Cette propriété d’auto-assemblage stéréospécifique a

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