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Les mondes darwiniens

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[les mon des <strong>darwiniens</strong>]<br />

dans le niveau de moralité donneront certainement un immense avantage à<br />

une tribu sur une autre » (LFH, p. 220).<br />

Autrement dit, la présence d’un sens moral au sein de certaines communautés<br />

pourrait expliquer que ces dernières aient été en mesure de triompher sur<br />

les autres communautés au sein desquelles la moralité n’était pas apparue.<br />

Mais comment le sens moral a-t-il pu apparaître au sein même d’une tribu ?<br />

Afin de répondre à cette question, Darwin a recours à une théorie proche de<br />

ce que les biologistes évolutionnistes nomment actuellement « l’altruisme<br />

réciproque » : selon Darwin, à mesure que les capacités rationnelles des membres<br />

d’une tribu se développent, ces derniers sont en mesure de comprendre<br />

à partir de leur expérience que l’aide apportée aux autres permet d’accroître<br />

leurs propres chances de survie. En effet, « comme les capacités de prévision et<br />

de raisonnement des membres (appartenant aux tribus) s’amélioraient, chaque<br />

homme apprit bientôt que s’il aidait ses pareils, il recevrait généralement de<br />

l’aide en retour » (LFH, p. 219). En ayant cette motivation, les membres d’un<br />

groupe pourraient développer l’habitude d’accomplir des actions bienveillantes,<br />

susceptibles d’avoir été héritées par la suite, entraînant une dynamique de<br />

sélection de groupe. La seconde source d’apparition du sens moral n’est autre<br />

que l’éloge et le blâme. La tendance à aider autrui pourrait avoir été motivée<br />

par la recherche de l’admiration, et le désir d’éviter la honte et la réprobation.<br />

Enfin, pour Darwin, dans la mesure où les vertus possédées par les individus<br />

peuvent être sélectionnées, et donc transmises aux générations suivantes, le<br />

sens moral est héritable.<br />

3.2 Le sens moral comme marque distinctive de l’humain<br />

Toutefois, si continuiste soit-il, Darwin insiste également sur le fait que les<br />

hommes possèdent des caractéristiques fondamentales qui les distinguent du<br />

reste du règne animal. On peut dire que si Darwin ne cesse d’insister sur la<br />

proximité entre l’homme et les animaux, c’est pour mieux mettre l’accent sur<br />

ce qui les sépare le plus : le sens moral. Comme y insiste Darwin dès le début<br />

du chapitre IV de LFH, « de toutes les différences existant entre l’homme et<br />

les animaux inférieurs, c’est le sens moral qui est le plus important » (LFH, p.<br />

183). Comment comprendre cette assertion et l’idée simultanée selon laquelle<br />

il y a bel et bien continuité entre l’homme et les autres animaux ?<br />

Force est de constater que sur ce point les propos de Darwin pourraient<br />

sembler de prime abord paradoxaux. Ainsi, comme il l’écrit, « tout animal,<br />

quel qu’il soit, doté d’instincts sociaux bien affirmés, incluant les affections

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