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Les mondes darwiniens

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[les mon des <strong>darwiniens</strong>]<br />

en comble, mais vont se voir adjoindre, et éventuellement retrancher 59 , un<br />

nombre limité de gènes dont l’effet pourra, lui, être spectaculaire. C’est pourquoi<br />

cette branche de la biologie synthétique souffre d’une relative ambiguïté<br />

de définition. Selon qu’on s’accordera ou non sur le caractère « spectaculaire »<br />

de l’effet phénotypique – ce qui contient une indéniable dimension subjective<br />

–, on pourra considérer que la construction ressortit ou non à la biologie<br />

synthétique ou au classique génie génétique, indépendamment de l’ampleur<br />

de la modification génétique. De sorte que selon certains critères, un grand<br />

nombre de réalisation en biologie synthétique sont déjà disponibles, alors que<br />

selon d’autres, ils se comptent sur les doigts des deux mains.<br />

Cette biologie synthétique s’est développée sous l’impulsion enthousiaste<br />

de Drew Endy 60 qui est un des cofondateurs de l’initiative BioBricks, avec Tom<br />

Knight et Christopher Voigt. Cette initiative est en fait un répertoire, librement<br />

accessible en ligne, de fonctions et des gènes qui les accomplissent, en parfait<br />

accord avec la vision « programmiste » évoquée ci-dessus 61 . L’idée sous-jacente<br />

est que grâce à cette « déconstruction » du vivant, il sera virtuellement possible<br />

d’assembler ces briques, de les hiérarchiser et de les intégrer dans une bactérie<br />

ou une levure, pour lui faire réaliser une fonction « à la demande ». Ainsi donc,<br />

il faut souligner fortement qu’avec ce désir de « carrosser » des organismes,<br />

on s’éloigne radicalement du fonctionnement darwinien par lequel les lignées<br />

acquièrent leur caractéristiques via le jeu du hasard et de la sélection. Ici, la<br />

stratégie mise en œuvre pour adapter un organisme à une situation ou plutôt<br />

une fonction voulue est d’orienter intentionnellement la cellule modifiée, via<br />

une ingénierie a priori de son contenu en gènes. On reviendra plus loin sur les<br />

présupposés et implications épistémologique de cette vision du vivant.<br />

Quelles sont les réalisations de cette biologie synthétique ? Pour le dire<br />

trivialement : est-ce que « ça marche » ? Un certain nombre de publications<br />

l’attestent sans contestation possible. Dès 2000, un oscillateur cellulaire synthétique<br />

est rendu public, dans lequel trois gènes s’inhibant de manière circulaire<br />

aboutissent à l’expression oscillatoire d’une protéine fluorescente 62 dans<br />

une bactérie qui ne possédait évidemment pas cette propriété initialement.<br />

59. Pósfai et al. (2006), “Emergent properties of reduced-genome Escherichia coli”,<br />

Science, 312(5776) @.<br />

60. Endy (2005), “Foundations for engineering biology”, Nature, 438(7067) @.<br />

61. Knight (2005), “Engineering novel life”, Mol. Syst. Biol., 1 @. Voigt (2006), “Genetic<br />

parts to program bacteria”, Curr. Opin. Biotechnol., 17(5) @.<br />

62. Elowitz & Leibler (2000), “A synthetic oscillatory network of transcriptional regu-

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