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Les mondes darwiniens

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[t h o m a s h e a m s / hérédité]<br />

une approche plus gradualiste, dont le principal représentant est Karl Pearson.<br />

Le débat avait d’ailleurs commencé avant la phase « mendélienne », et dura<br />

plusieurs années après. Alors que les mutationnistes ou « mendéliens » avaient<br />

une vision discontinue du processus d’évolution, n’accordaient de l’importance<br />

qu’aux grandes mutations, ne laissant à la sélection naturelle qu’un rôle d’élimination<br />

des mutations défavorables, les gradualistes, ou « biométriciens »,<br />

défendaient la valeur sélective des petites variations, qui semblait cependant<br />

difficile à mettre en œuvre expérimentalement (car il était difficile d’en distinguer<br />

les composantes génétiques et environnementales). <strong>Les</strong> gradualistes<br />

semblèrent un temps perdre la main.<br />

C’est aussi à cette époque, dans les années 1910-1920, que, parallèlement,<br />

les travaux de Thomas Hunt Morgan sur les mouches drosophiles démontrèrent<br />

que les gènes étaient localisés linéairement sur les chromosomes,<br />

prouvant le bon accord entre les lois de Mendel et les mouvements de chromosomes<br />

pendant la méiose. Ces avancées ouvraient une nouvelle approche<br />

de la génétique, dans la recherche précise de la matérialité moléculaire de<br />

ses déterminants. La réévaluation du « darwinisme » tel qu’il se décrivait à<br />

l’époque, ou plutôt de l’école gradualiste, fut permise par une compréhension<br />

améliorée de l’action des gènes. On prit conscience, par des expériences de<br />

sélection expérimentale, de l’aptitude de celle-ci à retenir des caractères polygéniques,<br />

c’est-à-dire gouvernés par plusieurs gènes. La jonction entre les deux<br />

écoles put ainsi progressivement s’opérer : les caractères qui apparaissaient<br />

comme continus et régressant vers une moyenne de génération en génération<br />

pouvaient en fait s’expliquer en se décomposant en une somme de petits<br />

caractères élémentaires, et l’hérédité moyenne put intégrer progressivement<br />

le cadre mendélien. Celle-ci était observée sur des populations de taille limitée,<br />

là où la probabilité de la présence des phénotypes extrêmes était faible en<br />

raison du grand nombre de gènes impliqués dans le caractère considéré.<br />

Le cadre unitaire d’une théorie évolutionniste de l’hérédité était donc prêt,<br />

et sous l’impulsion de Ronald A. Fisher et J.B.S. Haldane (Angleterre), et de<br />

Sewall Wright (États-Unis), la génétique des populations pouvait naître dans<br />

les années 1930 6 . Cette discipline se donna pour but d’envisager la notion<br />

d’évolution sous l’angle de celle des fréquences, dans une population, des<br />

différentes formes (ou allèles) de gènes donnés de génération en génération.<br />

6. Sur Haldane, voir la biographie que lui consacre Simon Gouz, aux Éditions<br />

Matériologiques, à paraître en 2012. (Ndé.)

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