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Les mondes darwiniens

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[les mon des <strong>darwiniens</strong>]<br />

trait (d’un caractère) est l’effet pour lequel il a été sélectionné. 25 » L’explication<br />

d’une fonction est donc recherchée dans l’émergence historique de celle-ci au<br />

sein de la lignée ancestrale à l’organisme où on l’observe actuellement, du fait<br />

de l’action cumulative de la sélection naturelle. Ainsi, les théories étiologiques<br />

de la fonction peuvent être qualifiées de rétrogrades (« bakward looking »),<br />

inscrivant la causalité dans un passé plus ou moins lointain.<br />

À l’inverse, les théories de la fonction développées à la suite de Robert<br />

Cummins 26 , dites « théories systémiques », s’intéressent à un système existant<br />

à un temps t et y attribuent une fonction à une caractéristique donnée du système<br />

dans la mesure où celle-ci est physiquement capable de produire l’effet<br />

considéré, sans prendre en compte l’histoire dont ce système est le produit.<br />

<strong>Les</strong> théories systémiques considèrent donc que l’histoire évolutive est non<br />

pertinente pour comprendre ce que c’est qu’une fonction, en se situant dans<br />

une perspective non temporelle : seuls comptent les dispositions du système<br />

tel qu’il existe. Ainsi, les théories systémiques (ou dispositionnelles) de la fonction<br />

peuvent être qualifiées d’antérogrades (« forward looking »).<br />

Théories étiologiques et systémiques ont en commun de proposer un<br />

concept général de fonction en accord avec l’usage scientifique courant de la<br />

notion de causalité mais, au delà de cette préoccupation commune, les deux<br />

approches répondent à des conceptions bien différentes.<br />

La conception étiologique a des affinités évidentes avec la sélection naturelle,<br />

celle-ci apparaissant en tant que « moteur » et que cause effective de<br />

l’évolution. La fonction en découle, en fin de compte, comme rien d’autre qu’un<br />

« effet sélectionné ». Selon cette logique, la fonction apparaît ainsi comme<br />

conséquence de l’adaptation, à condition de définir cette dernière selon une<br />

logique « darwinienne », c’est-à-dire comme des caractéristiques qui ont été<br />

progressivement sélectionnées car conférant des avantages pour la survie<br />

et la reproduction (fitness) à des organismes ancestraux successifs, dans des<br />

conditions de milieu données. Cette conception explique bien pourquoi les<br />

biologistes font si grand usage de la notion de fonction. En effet, si la majorité<br />

des traits des organismes a bien été façonnée par la sélection naturelle,<br />

l’omniprésence des énoncés fonctionnels n’est pas qu’un effet de langage. À<br />

chaque fois qu’un trait de l’organisme (organe, caractère) est censé avoir un<br />

effet donné (fonction), il répond de ce fait à une détermination issue de son<br />

25. Neander (1991), “The teleological notion of function”, Aust. J. Philos., 69 @.<br />

26. Cummins (1975), “Functional analysis”, J. philos. @.

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