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Les bamakois diplômés de Paris

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Nous sommes à la veille <strong>de</strong> la fête. Bavieux vient me trouver à mon<br />

domicile : « David, viens, on va laver le mouton. J’en ai négocié un pour<br />

20 000 CFA », me dit-il rassuré. Le lavage est la première étape du rite du<br />

mouton, une tâche réservée aux petits frères <strong>de</strong> Bavieux.<br />

[…] L’après-midi ressemble à toutes les autres, du moins en apparence.<br />

Lors d’une promena<strong>de</strong>, je me rends compte que les salons <strong>de</strong> coiffure sont<br />

combles. Je croise certaines <strong>de</strong>s filles dont j’ai fait la connaissance durant<br />

mon séjour. Elles se présentent à moi avec une nouvelle coupe <strong>de</strong> cheveux et<br />

me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt mon avis. Je le leur donne, en mentant parfois.<br />

[…] Pour les jeunes (je dirais les moins <strong>de</strong> 30 ans), la Tabaski débute la<br />

veille au soir : « t’es avec nous ce soir ! On va faire du thé, on va causer,<br />

écouter <strong>de</strong> la musique, jouer aux cartes, rencontrer <strong>de</strong>s filles, jusqu’au petit<br />

matin » me dit-on. Je refuse. Ma compagne et moi <strong>de</strong>vons être en forme pour<br />

le len<strong>de</strong>main, le jour <strong>de</strong> la fête. Nous avons été invités chez les D. à 8 heures<br />

du matin.<br />

tel-00708235, version 1 - 14 Jun 2012<br />

[…] Le len<strong>de</strong>main, 8h40, nous arrivons, ma compagne et moi, dans la<br />

cour <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong>s D.. Nous avons raté l’égorgement du mouton. « Pour<br />

une fois que l’heure, c’est l’heure » me dis-je. 8h, la mosquée, 8h30 on égorge.<br />

Déçu, mais non découragé, je prends <strong>de</strong>s renseignements auprès <strong>de</strong> Vieux<br />

Cissé. C’est Papa D., le chef <strong>de</strong> famille, qui a égorgé le premier mouton et<br />

Vieux Cissé s’est chargé du second : « un mouton bien égorgé ne crie pas » -<br />

commente-t-il. Une idée reçue qui tombe. Mimant le geste <strong>de</strong> l’égorgement,<br />

Vieux Cissé me dit encore : « tu tranches telle partie, mais il faut<br />

impérativement que le couteau soit bien aiguisé ». <strong>Les</strong> <strong>de</strong>ux moutons sont à<br />

terre, la gorge tailladée. Il y a peu <strong>de</strong> sang.<br />

Alors que les femmes commencent la préparation <strong>de</strong> la garniture<br />

(oignons et bananes frites), les hommes entament le dépeçage du mouton.<br />

Cette tâche revient aux égorgeurs et aux jeunes garçons <strong>de</strong> la maison. Et il<br />

faut être <strong>de</strong>ux au minimum : alors que le ca<strong>de</strong>t maintient les pattes <strong>de</strong><br />

l’animal en l’air, l’aîné s’occupe d’ôter la peau (alternant l’utilisation <strong>de</strong> ses<br />

mains et <strong>de</strong> couteaux). On me <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> participer. Ce n’est pas sans mal :<br />

le mouton est encore chaud et l’on sent les os et les muscles <strong>de</strong> la bête. On<br />

débute par les pattes, on continue par le torse et l’abdomen, et l’on s’arrête là<br />

où la gorge a été tranchée. Symboliquement, j’éprouve moins <strong>de</strong> difficultés<br />

que je ne l’avais imaginé. Peut être est-ce dû au fait que ces gestes, pour les<br />

autres, semblent aller <strong>de</strong> soi.<br />

La peau quasiment retirée en son entier, la bête est suspendue à un<br />

crochet du mur <strong>de</strong> la maison. Vieux Cissé termine d’arracher la peau et celleci<br />

est mise <strong>de</strong> côté : « Elle ne peut pas être vendue, mais certains en fond leur<br />

business » m’explique-t-il. À l’ai<strong>de</strong> d’une hachette, Vieux Cissé décapite<br />

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