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Les bamakois diplômés de Paris

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tel-00708235, version 1 - 14 Jun 2012<br />

Lonsdale 1 , que cet appel à la mémoire, aux souvenirs, comporte nécessairement une<br />

part <strong>de</strong> bricolage, notamment pour permettre aux enquêtés <strong>de</strong> répondre aux<br />

exigences <strong>de</strong> l’entretien 2 .<br />

Il est un point central à partir duquel mes interlocuteurs ont raconté leur<br />

histoire : le fait d’être né et d’avoir grandi à Bamako. À leurs yeux, la ville <strong>de</strong> Bamako<br />

désigne ce « chez nous » auquel ils font systématiquement référence dans leur<br />

discours pour expliquer qui ils sont, mais également qui ils ne sont pas. S’il est<br />

important <strong>de</strong> saisir ce que signifie « être <strong>bamakois</strong> », il est tout aussi important <strong>de</strong> ne<br />

pas s’en tenir là. La ville <strong>de</strong> Bamako n’est que le cadre « global » dans lequel se sont<br />

déroulées les activités socialisatrices <strong>de</strong>s enquêtés. Parmi les valeurs mémorielles qui<br />

sont celles <strong>de</strong>s enquêtés, le vécu familial et la carrière scolaire sont cotés très haut.<br />

Mais la maison familiale et l’école renvoient aussi aux lieux « concrets » <strong>de</strong><br />

socialisation qui ont structuré leur intériorité, conditionné leur rapport au mon<strong>de</strong> et<br />

aux autres. Je montrerai que ces <strong>de</strong>ux activités sont étroitement liées l’une à l’autre et<br />

qu’elles sont une affaire <strong>de</strong> reproduction sociale.<br />

Banal, pourrait-on penser. Pourtant, dans un pays qui scolarise un enfant sur<br />

cinq 3 , la possibilité <strong>de</strong> terminer un cursus scolaire et d’obtenir un diplôme n’est pas<br />

donnée à tout le mon<strong>de</strong>. Seule une fraction très minoritaire <strong>de</strong> la population malienne<br />

est concernée, fraction dont les personnages <strong>de</strong> cette enquête font partie. Cela signifie<br />

également que les familles <strong>de</strong> mes interlocuteurs réunissaient les conditions<br />

suffisantes pour permettre à leurs enfants <strong>de</strong> mener à bien une carrière scolaire. De<br />

quelles familles parle-t-on Voilà une question à laquelle il me faut répondre.<br />

Ville, famille et École, tels sont les trois registres à partir <strong>de</strong>squels se sont<br />

racontés les enquêtés. C’est à travers ce triangle i<strong>de</strong>ntitaire que je vais tenter <strong>de</strong> situer<br />

mes interlocuteurs dans la hiérarchie <strong>de</strong>s positions sociales maliennes, et, par ce<br />

biais, aboutir à une définition plus fine <strong>de</strong> leur capital pré-migratoire.<br />

1 John Lonsdale, « Le passé <strong>de</strong> l’Afrique au secours <strong>de</strong> son avenir », Politique africaine, n°39, 1990, p.<br />

137.<br />

2 Toutefois, mes interlocuteurs sont physiquement sortis <strong>de</strong> la condition sociale qui était la leur au<br />

Mali (symboliquement, c’est une autre histoire). Cette position, à distance <strong>de</strong> leur société d’origine,<br />

encourage mes interlocuteurs à objectiver le discours sur leur passé.<br />

3 Gérard Dumestre, « De la scolarité souffrante (compléments à « De l’école au Mali ») », Nordic<br />

Journal of African Studies 9(3), 2000, p. 183.<br />

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