20.01.2015 Views

Les bamakois diplômés de Paris

Les bamakois diplômés de Paris

Les bamakois diplômés de Paris

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

vois, travailler… J’avais ce projet dans la tête : faire une vie qui n’est pas<br />

celle <strong>de</strong> mes parents, travailler en France, envoyer <strong>de</strong> l’argent, mettre <strong>de</strong><br />

l’argent <strong>de</strong> côté et, après, retourner au pays pour avoir une gran<strong>de</strong> et belle<br />

famille. » Ousmane.<br />

tel-00708235, version 1 - 14 Jun 2012<br />

« Ce qui importe, pour être reconnu, c’est <strong>de</strong> « “donner la mesure <strong>de</strong> soi“ en un<br />

autre domaine 1 », hors du cadre social <strong>bamakois</strong>. « Trouver un boulot », « envoyer<br />

<strong>de</strong> l’argent », « se débrouiller seul », la France <strong>de</strong>vient prometteuse en termes<br />

d’emploi, <strong>de</strong> rentes monnayables et <strong>de</strong> réussite. Bref, elle offre un avenir, un avenir<br />

qui, moins assujetti aux pressions familiales, leur permettra (enfin) d’être activement<br />

présents dans le circuit <strong>de</strong> la <strong>de</strong>tte intergénérationnelle.<br />

Ainsi, le candidat à l’émigration cherche l’émancipation individuelle, pour<br />

conquérir son autonomie, « mais cette autonomie, toujours problématique, est<br />

d’autant plus relative […] qu’elle doit et sait composer avec <strong>de</strong>s solidarités repensées<br />

et renégociées, mais jamais radicalement récusées 2 ».<br />

« Si on est là [en France], c’est pour la famille. Je t’ai déjà dit qu’il n’y avait<br />

rien <strong>de</strong> pire pour un Malien que d’être banni <strong>de</strong> la communauté. C’est clair,<br />

tout Malien te le dira. […] Mais tant qu’on ne valorisera pas la personne, les<br />

gens continueront <strong>de</strong> partir pour l’Europe. » Mamadou.<br />

Deux logiques sociales s’enchâssent dans le désir <strong>de</strong> partir. La première logique<br />

est familiale et relève <strong>de</strong> l’habitus communautaire. La secon<strong>de</strong> logique est<br />

individuelle et vise l’autonomie. Complémentaires, ambivalentes ou contradictoires,<br />

elles constituent, quoi qu’on en dise, le cœur du projet migratoire.<br />

3.2 La construction imaginaire <strong>de</strong> la réalité française<br />

Pour les enquêtés, la perspective d’immigrer est un véritable bol d’air. On peut à<br />

nouveau penser positivement au len<strong>de</strong>main. Car en changeant <strong>de</strong> condition sociale,<br />

c’est le risque d’un déclassement durable qui semble écarté. Plus que cela, la<br />

migration est une solution radicale pour se délier <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s contraintes sociales<br />

<strong>bamakois</strong>es, aux premiers rangs <strong>de</strong>squelles on trouve un marché <strong>de</strong> l’emploi saturé et<br />

l’hétéronomie familiale.<br />

1 Op.cit., Sayad., 1999, p 45.<br />

2 François Leimdorfer et Alain Marie, L’Afrique <strong>de</strong>s citadins, sociétés civiles en chantier (Abidjan,<br />

Dakar), <strong>Paris</strong>, Karthala, 2003, p. 8.<br />

207

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!