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Les bamakois diplômés de Paris

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tel-00708235, version 1 - 14 Jun 2012<br />

et sociaux du poste <strong>de</strong> préparateur qui est le sien (gestion <strong>de</strong>s livraisons, procédures<br />

<strong>de</strong> délivrance <strong>de</strong>s médicaments, service <strong>de</strong> la clientèle) ; par la visite guidée et<br />

complète <strong>de</strong> l’officine (comme s’il s’agissait <strong>de</strong> sa propre maison) ; par l’attention qu’il<br />

porte à me présenter « comme il faut » son employeur.<br />

Tous ces détails témoignent d’un fort investissement personnel dans son travail.<br />

Ils sont le signe d’une i<strong>de</strong>ntité professionnelle positive qui, <strong>de</strong>puis l’obtention <strong>de</strong> son<br />

doctorat en 2003 à Bamako, n’avait pas trouvé les conditions <strong>de</strong> son expression.<br />

Ce même sentiment d’ « être à sa place » est renforcé par les bons rapports qu’il<br />

semble entretenir avec M. Diallo. Ce <strong>de</strong>rnier prend la forme d’un autrui significatif<br />

auprès duquel il peut vali<strong>de</strong>r ses compétences. Et l’on peut supposer que<br />

l’engagement d’Ibrahim dans son travail est une manière pour lui d’exprimer sa<br />

gratitu<strong>de</strong> envers celui qui lui a « donné [sa] chance ». Plus que cela, le profil <strong>de</strong> son<br />

employeur offre tout un registre d’i<strong>de</strong>ntifications significatives. Comme Ibrahim, M.<br />

Diallo est un migrant africain, comme lui, il est docteur en pharmacie, comme lui, il a<br />

entrepris les démarches du regroupement familial. Bref, M. Diallo est un homme qui<br />

est « passé par là ». Pour Ibrahim, son employeur est un modèle <strong>de</strong> réussite, un<br />

modèle à suivre.<br />

Passons à la secon<strong>de</strong> observation qui, comme nous allons le voir, contraste<br />

fortement avec la précé<strong>de</strong>nte. Nous sommes toujours à Epinay-sur-Scène, huit mois<br />

plus tard :<br />

[Epinay-sur-Seine, 18.06.09] 12h45, à peine ai-je eu le temps d’arriver à<br />

la pharmacie qu’Ibrahim « ferme la boutique », pour la pause déjeuner.<br />

Le « docteur titulaire », M. Diallo, me salue à peine, d’un geste <strong>de</strong> la<br />

main rapi<strong>de</strong> et à distance, signifiant son empressement. « On va manger au<br />

foyer 1 » me dit Ibrahim sans commentaires. Durant quinze minutes, nous<br />

longeons la voie ferrée qui mène à l’endroit recherché, quinze minutes<br />

pendant lesquelles Ibrahim se confie :<br />

Ibrahim : Puis après, il y a les problèmes avec le travail à la<br />

pharmacie. Je gagne 1400 euros <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux ans. Je n’ai jamais été<br />

augmenté. Pourquoi Parce que le patron est mal organisé. Mais lui, il<br />

n’est pas dans ma situation… et puis on est tous les <strong>de</strong>ux docteurs !»<br />

Ibrahim m’explique un problème interne au fonctionnement <strong>de</strong> la<br />

pharmacie qui touche à la gestion <strong>de</strong>s stocks <strong>de</strong> médicaments. J’ai <strong>de</strong>s<br />

1 Foyer d’immigrants africains situé non loin du lieu <strong>de</strong> travail d’Ibrahim.<br />

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