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Les bamakois diplômés de Paris

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Il faut rappeler ici qu’une partie <strong>de</strong>s moyens financiers dont peut disposer un<br />

individu au début <strong>de</strong> sa carrière professionnelle est investie à l’intérieur du groupe <strong>de</strong><br />

parenté. C’est là le prix à payer pour gravir un échelon dans la hiérarchie familiale et<br />

exercer les fonctions d’adulte. Autrement dit, on doit être du côté <strong>de</strong> ceux qui<br />

donnent, et non plus seulement du côté <strong>de</strong> ceux qui reçoivent. Mais la situation<br />

précaire d’emploi, qui est celle <strong>de</strong> mes interlocuteurs diplômés, impose aux aînés<br />

familiaux <strong>de</strong> maintenir les formes informelles <strong>de</strong> la solidarité microsociale ; ce dont<br />

Gaoussou, étudiant en master d’économie à <strong>Paris</strong>, a parfaitement conscience :<br />

tel-00708235, version 1 - 14 Jun 2012<br />

« Mais si on veut parler <strong>de</strong> famille, c’est surtout le même problème comme<br />

ici en France : c’est les jeunes. Surtout les jeunes, même ceux <strong>de</strong>s universités,<br />

ils n’ont pas <strong>de</strong> travail. Et généralement, c’est les chefs <strong>de</strong> famille qui<br />

subviennent aux besoins <strong>de</strong> leurs enfants. Très difficilement, la relève est<br />

assurée, très difficilement. Disons qu’il y a beaucoup <strong>de</strong> jeunes qui partent<br />

pour ces raisons là, pour <strong>de</strong>s raisons économiques. » Gaoussou.<br />

Philippe Antoine et Victor Piche, dans une étu<strong>de</strong> sur l’insertion urbaine à<br />

Bamako et à Dakar, ont montré que « la crise conforte la dépendance <strong>de</strong>s plus jeunes<br />

envers les aînés. La génération <strong>de</strong>s 45-59 ans est peut être celle qui, déjà dans les<br />

années 60, faisait vivre ses parents ; aujourd’hui, c’est elle encore qui a la charge <strong>de</strong>s<br />

personnes du ménage. […] On peut se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si les générations <strong>de</strong> l’indépendance<br />

(nées entre 1930 et 1944) ne sont pas <strong>de</strong>s générations charnières qui supportent le<br />

plus le poids <strong>de</strong> la crise. <strong>Les</strong> jeunes vivent la crise, les aînés la supportent 1 ».<br />

« Ce sont mes parents qui me donnent <strong>de</strong> l’argent. Parce que ceux qui nous<br />

font travailler, ils nous donnent pas assez. Sinon, même pour mettre le<br />

carburant dans la moto… Même ce matin, quand je suis sorti, c’est mon père<br />

qui m’a donné l’argent. Sinon, s’il n’y a pas ça, ah mais tu galères ! Ah<br />

ouais ! Heureusement qu’il y a la solidarité quand même : les amis, les<br />

proches… On est soudé entre nous. Même quand il y a un problème <strong>de</strong> 500<br />

ou <strong>de</strong> 700 francs… Même si tu n’as rien, tu peux aller <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à un ami ou<br />

à un proche et il te donne. Mais il n’y a que ça. Sinon, ici, on est bien.<br />

Franchement, ici, on est bien. » Demba.<br />

On touche ici à l’importance <strong>de</strong>s solidarités interpersonnelles à Bamako,<br />

lesquelles débor<strong>de</strong>nt largement le cadre <strong>de</strong> la famille. Si les sollicitations <strong>de</strong> cette<br />

1 Philippe Antoine, Victor Piche, « L’insertion urbaine à Bamako et Dakar, les jeunes vivent la crise,<br />

leurs aînés la supportent », Pop Sahel, n°21, 1994, pp. 48-50.<br />

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