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Les bamakois diplômés de Paris

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débrouille comme ça, dès que tu es du même village, <strong>de</strong> la même famille…<br />

Après, les autres, ils se débrouillent à leur manière. » Souleymane.<br />

Cet enquêté souligne l’importance <strong>de</strong> la solidarité intra-villageoise et<br />

intrafamiliale pour trouver un travail à <strong>Paris</strong>, une forme d’entrai<strong>de</strong> qui - une fois<br />

encore - est réservée aux membres <strong>de</strong> la communauté. Mais surtout, il ne s’agit pas <strong>de</strong><br />

travailler n’importe où : pour Souleymane, l’immigrant doit occuper les postes que lui<br />

assigne la société d’installation.<br />

tel-00708235, version 1 - 14 Jun 2012<br />

« Le boulot qu'il y a là, les Français n'ont pas besoin <strong>de</strong> le faire, il y a nous<br />

pour le faire […] Il faut <strong>de</strong>s immigrés pour faire ça. Sinon, qui va faire le<br />

boulot Nous on connaît tous ces boulots. On a été formé pour ça : le<br />

restaurant, c'est l'Africain ; le nettoyage, c'est l'Africain ; les travaux<br />

publics, c'est l'Africain ; le goudron, la voierie, c'est l'Africain ; l'usine, c'est<br />

l'Africain. Nous, on ne veut pas faire un autre boulot, ce qui compte c'est le<br />

salaire. Après, tu peux faire n'importe quoi du moment qu'on est payé. Tu<br />

vas prendre la place <strong>de</strong> quelqu'un qui pendant cinq ans à fait l'école <br />

Jamais ! Il faut que tu travailles en <strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> lui.» Souleymane.<br />

Il est frappant <strong>de</strong> constater à quel point le discours <strong>de</strong> cet interlocuteur<br />

correspond à l’imagerie collective attachée à l’Africain, en l’occurrence celle du<br />

travailleur non qualifié. Souleymane ne considère pas d’ailleurs qu’il puisse faire à<br />

<strong>Paris</strong> autre chose qu’un travail situé en bas <strong>de</strong> l’échelle <strong>de</strong>s professions.<br />

Précé<strong>de</strong>mment, Jacques Barou parlait d’une « colonisation progressive » <strong>de</strong>s<br />

ruraux soninkés dans <strong>de</strong>s secteurs professionnels spécifiques très proches <strong>de</strong> ceux<br />

cités par Ousmane : l’industrie ou les travaux publics par exemple. L’auteur signalait<br />

également que ces postes se transmettaient <strong>de</strong> génération en génération. À en croire<br />

Ousmane, ce système d’héritage <strong>de</strong>s positions professionnelles entre les générations<br />

perdure durant la première décennie <strong>de</strong>s années 2000 : les nouveaux arrivants<br />

continuent <strong>de</strong> bénéficier <strong>de</strong> la solidarité villageoise et donc <strong>de</strong>s entrées offertes par les<br />

réseaux soninkés selon la position occupée par leurs membres dans l’espace social<br />

parisien.<br />

Pour les Bamakois diplômés <strong>de</strong> cette enquête, situés en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s cercles<br />

pionniers <strong>de</strong> l’immigration africaine en France, cela signifie qu’ils mobilisent d’autres<br />

ressources, d’autres réseaux, pour intégrer le mon<strong>de</strong> du travail. D’ailleurs, la très<br />

gran<strong>de</strong> majorité d’entre eux n’a jamais cherché à utiliser la filière migratoire mise en<br />

place par les ruraux soninkés <strong>de</strong>puis cinquante ans.<br />

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