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Les bamakois diplômés de Paris

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tel-00708235, version 1 - 14 Jun 2012<br />

s’engage » – me chuchote Youssouf, ce qui advient quelques instants plus<br />

tard. Après quelques minutes <strong>de</strong> discussions en Bambara avec un inconnu,<br />

Yousouf revient vers moi et me dit : « Vient avec nous, on va où il y a <strong>de</strong>s<br />

Bamakois ». À nouveau dans la cour. Je suis un peu en retrait, distrait par<br />

l’ambiance du lieu. Il y a toujours du mon<strong>de</strong>, très peu <strong>de</strong> femmes, beaucoup<br />

d’hommes. Nous empruntons alors un escalier qui donne accès aux chambres<br />

du foyer. Comme au réfectoire, l’endroit est sombre et les lumières <strong>de</strong>s<br />

couloirs sont allumées. Nous nous arrêtons face à la porte <strong>de</strong> la chambre n° 9.<br />

Au sol, une théière fait son travail à l’ai<strong>de</strong> d’une plaque électrique.<br />

La chambre n°9 n’excè<strong>de</strong> pas 15 m². L’espace y est utilisé au maximum.<br />

Immédiatement à gauche <strong>de</strong> la porte, une armoire ainsi que le premier <strong>de</strong>s<br />

quatre lits superposés, fixé le long du mur. Une secon<strong>de</strong> armoire est calée sur<br />

le mur ouest à côté <strong>de</strong> laquelle se trouve <strong>de</strong>ux autres lits placés <strong>de</strong> manière<br />

perpendiculaire. L’unique fenêtre, au nord (face à la porte), surplombe le<br />

radiateur. Ce <strong>de</strong>rnier accueille quelques chaussettes. Le <strong>de</strong>rnier lit est<br />

positionné le long du mur est. Deux chaises, une télévision, une pendule, <strong>de</strong>s<br />

valises entassées au <strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux armoires et quelques vêtements<br />

accrochés ici ou là finissent <strong>de</strong> meubler la pièce. Ainsi, huit personnes vivent<br />

au quotidien dans cet espace exclusivement masculin.<br />

Un homme se lève <strong>de</strong> l’une <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux chaises et m’invite à prendre sa<br />

place, ce que je fais. Nous sommes dix dans la chambre n°9 […]. Ce que j’ai<br />

pris pour du thé est en fait du café. L’on m’en offre une tasse. J’accepte.<br />

Youssouf me présente à l’assemblée : « c’est un étudiant qui travaille<br />

sur les Bamakois qui vivent à <strong>Paris</strong> ». Un homme, nommé Hamidou, réagit :<br />

« Tu sais, il n’y a pas <strong>de</strong> Bamakois ici, il n’y a que <strong>de</strong>s gens qui<br />

viennent <strong>de</strong>s villages, surtout <strong>de</strong> Kayes 1 … ou alors, il faut que tu viennes le<br />

midi, à l’heure du repas ».<br />

La conversation suit son cours. Elle est rythmée par les cafés au goût <strong>de</strong><br />

thé. Nous parlons <strong>de</strong>s élections prési<strong>de</strong>ntielles maliennes, <strong>de</strong> la vie<br />

quotidienne au foyer, <strong>de</strong> l’image « misérabiliste » que les télévisions<br />

françaises donnent à voir <strong>de</strong> l’Afrique, <strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> la migration, <strong>de</strong>s<br />

conditions <strong>de</strong> travail <strong>de</strong> ceux qui rési<strong>de</strong>nt ici, rue Bara…<br />

Après <strong>de</strong>ux ou trois heures <strong>de</strong> discussion, Youssouf me fait signe qu’il<br />

est temps <strong>de</strong> partir. Il est près <strong>de</strong> 18 heures. Je me souviens alors<br />

qu’Hamidou m’avait signalé qu’à partir <strong>de</strong> cette heure, « le foyer n’accepte<br />

plus tout le mon<strong>de</strong>. C’est parce que <strong>de</strong>s jeunes étaient venus “ foutre le<br />

bor<strong>de</strong>l “. Et puis c’est l’heure où les femmes arrêtent <strong>de</strong> cuisiner ».<br />

Hamidou, Youssouf et moi quittons donc la chambre n°9. La cour du<br />

foyer est toujours aussi animée. Je prends le numéro <strong>de</strong> téléphone<br />

d’Hamidou en lui faisant part <strong>de</strong> mon souhait <strong>de</strong> revenir.<br />

1 Région du Mali située à l’ouest du pays.<br />

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