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Les bamakois diplômés de Paris

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tel-00708235, version 1 - 14 Jun 2012<br />

<strong>de</strong> sa famille » lui impose <strong>de</strong> nombreux sacrifices, notamment celui <strong>de</strong> calculer, à<br />

l’euro près, la moindre <strong>de</strong> ses dépenses en France. En dépit d’une gestion serrée <strong>de</strong><br />

son budget, les transferts financiers vers Bamako sont plus irréguliers et leurs<br />

montants plus incertains. Alors que les frères D. gèrent collectivement les transferts<br />

(palliant ainsi les difficultés financières éventuelles <strong>de</strong> l’un d’entre eux), Zoumana est<br />

individuellement responsable <strong>de</strong> cette charge économique. Soumis aux aléas du<br />

travail précaire, il ne réussit pas toujours à satisfaire les besoins <strong>de</strong> ses proches à<br />

Bamako.<br />

Mais la déclaration <strong>de</strong> Zoumana pose également la question <strong>de</strong>s attentes <strong>de</strong>s<br />

parents à l’égard <strong>de</strong> leurs enfants-migrants. Là encore, ces attentes divergent d’une<br />

famille à l’autre. Alors que les parents <strong>de</strong> Zoumana formulent nettement leurs<br />

exigences, jouant notamment sur le registre <strong>de</strong> la culpabilité, d’autres n’atten<strong>de</strong>nt<br />

pour ainsi dire rien <strong>de</strong> leurs fils. C’est ce dont témoigne par exemple Issa,<br />

commerçant à Bamako et ancien footballeur professionnel en France :<br />

« Oui, j’ai trois garçons en France…. Mais la <strong>de</strong>tte, on laisse nos enfants<br />

tranquille avec ça. On sait que les temps sont durs, que le contexte ne leur<br />

permet pas d’envoyer <strong>de</strong> l’argent. Qu’ils arrivent déjà à vivre pour eux,<br />

qu’ils soient heureux, c’est ça que sa mère et moi nous voulons. Et puis on est<br />

là. Tiens le mois <strong>de</strong>rnier, j’ai envoyé 300 € au plus petit. […] Comme nous on<br />

est pas dans le besoin.» Issa.<br />

Le contraste entre les propos <strong>de</strong> Zoumana et ceux d’Issa est saisissant. D’un<br />

côté, la plupart <strong>de</strong>s parents <strong>de</strong>s enquêtés supportent (souvent aisément) le coût <strong>de</strong> la<br />

vie <strong>bamakois</strong>e indépendamment <strong>de</strong>s transferts d’argent. Certains d’entre eux<br />

redéfinissent même les modalités <strong>de</strong> la <strong>de</strong>tte intergénérationnelle en fonction <strong>de</strong> la<br />

situation <strong>de</strong> leurs enfants à <strong>Paris</strong> 1 . Mais <strong>de</strong> l’autre côté, certaines familles comptent<br />

beaucoup sur les gains réalisés par leurs <strong>de</strong>scendants dans l’immigration. Comment<br />

expliquer cette différence d’attitu<strong>de</strong>s vis-à-vis <strong>de</strong>s immigrants alors que les conditions<br />

socioéconomiques <strong>de</strong> ces familles sont a priori similaires <br />

Quoi qu’il en soit, les exemples <strong>de</strong>s frères D. et <strong>de</strong> Zoumana montrent que<br />

certains enquêtés réussissent à répondre aux impératifs <strong>de</strong> la <strong>de</strong>tte et que d’autres<br />

éprouvent <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s difficultés à atteindre ce but. S’il existe une multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

1<br />

On se souvient, par exemple, du père <strong>de</strong> Papus qui finançait, à hauteur <strong>de</strong> 300 € par mois, la<br />

première année <strong>de</strong> vie en France <strong>de</strong> son fils.<br />

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