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Les bamakois diplômés de Paris

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tel-00708235, version 1 - 14 Jun 2012<br />

Mais surtout, le recours à la main d’œuvre étrangère se fait toujours selon une<br />

logique d’ « ouvriérisation <strong>de</strong> l’immigration ». Stéphane Castles et Godula Kosack,<br />

dans leur étu<strong>de</strong> comparée parue en 1973 sur l’immigration en Europe (Allemagne,<br />

France, Royaume-Uni et Suisse), ont ainsi dévoilé la généralisation d’un modèle type<br />

du travailleur migrant : le Gastarbeiter 1 . Pour la France, et jusqu’à la fin <strong>de</strong>s années<br />

70, le Gastarbeiter est un travailleur temporaire et d’origine rurale, <strong>de</strong> sexe masculin,<br />

célibataire, plutôt jeune (surreprésenté dans la classe d’âge <strong>de</strong>s 20-29 ans) et recruté<br />

« dans les secteurs d’activité refusés par les nationaux 2 » (l’industrie et le BTP 3 plus<br />

particulièrement).<br />

Ainsi, durant plus d’un siècle, et selon les besoins <strong>de</strong> main d’œuvre propres à<br />

chaque pério<strong>de</strong> historique, les immigrants ont toujours été surreprésentés dans<br />

l’agriculture (moisson, vendange, cueillette, etc.), dans les industries chimiques,<br />

textiles, alimentaires, automobiles, dans les fon<strong>de</strong>ries, les chantiers navals, les mines,<br />

ou le bâtiment 4 .<br />

La forte présence <strong>de</strong>s étrangers dans ces secteurs spécifiques du travail, en<br />

particulier ouvriers 5 , ne peut pas être pleinement comprise sans évoquer à nouveau<br />

les mesures <strong>de</strong> protection du marché <strong>de</strong> l’emploi national. Dès 1880, et jusqu’à nos<br />

2 169 000 en 1962, 2 621 000 en 1968, 3 442 000 en 1975 [Pierre Milza, 2005, p. 14]. Pour <strong>de</strong>s chiffres<br />

plus récents, on peut citer ceux <strong>de</strong> l’INSEE avec le recensement <strong>de</strong> 1999 qui estime à 4,2 millions le<br />

nombre d’immigrants installés en France, soit 7,4% <strong>de</strong> population totale. En 2008, toujours selon<br />

l’INSEE, le nombre d’immigrants en France est estimé à 5,3 millions, soit, 8,2% <strong>de</strong> la population<br />

totale.<br />

URL : http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.aspreg_id=0&ref_id=immigrespaysnais [consulté le<br />

4.01.2012].<br />

1 Stéphane Castles et Godula Kosack, Immigrant Workers and Class Structure in Western Europe,<br />

New York, Oxford University Press, 1973.<br />

2 Op. cit., Noiriel, 2006, p. 140<br />

3 Bâtiment et Travaux Publics.<br />

4 Gérard Noiriel ajoute un <strong>de</strong>rnier pôle d’activité du travailleur immigrant : celui <strong>de</strong> la domesticité.<br />

Secteur surtout féminin, l’auteur relève que « le tiers <strong>de</strong>s femmes salariées <strong>de</strong> nationalité étrangères<br />

sont domestiques entre 1901 et 1975 ». Op. cit., Noiriel, p. 142.<br />

5 Dans les années 60, et selon Maryse Tripier, le recrutement <strong>de</strong> la main-d’œuvre étrangère a pour<br />

« objectif <strong>de</strong> faire face à un nouvel essor <strong>de</strong> production au moindre coût <strong>de</strong>s salaires, en prestations<br />

sociales et en investissement technologique ». En 1975, l’auteure estime que 77,3% <strong>de</strong>s étrangers sont<br />

ouvriers. La part <strong>de</strong>s étrangers dans la PCS ouvrière (sans les salariés agricoles) est alors <strong>de</strong> 14,1%.<br />

[Tripier, 2008, p. 1.]. On voit d’ailleurs, toujours dans les années 60-70, émerger une nouvelle figure<br />

ouvrière : celle <strong>de</strong> l’O.S (Ouvrier Spécialisé). Liée à l’automatisation du travail - dont l’industrie<br />

automobile est un cas exemplaire – le statut d’O.S a longtemps été associé à celui d’immigré. Cette<br />

équation « immigré = O.S » a fait l’objet <strong>de</strong> nombreuses étu<strong>de</strong>s, notamment celle <strong>de</strong> Maryse Tripier,<br />

dans son ouvrage L’immigration dans la classe ouvrière en France, <strong>Paris</strong>, L’Harmattan, 1990 et celle<br />

d’Ab<strong>de</strong>lmalek Sayad, “L’immigré, OS à vie“, in Ab<strong>de</strong>lmalek Sayad, la Double absence, <strong>Paris</strong>, Seuil,<br />

Liber, 1999, pp. 233-253.<br />

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