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Les bamakois diplômés de Paris

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tel-00708235, version 1 - 14 Jun 2012<br />

La fête <strong>de</strong> Tabaski a un coût financier non négligeable pour les familles<br />

maliennes, coût dont les commerçants sont les premiers bénéficiaires : éleveurs,<br />

coiffeurs, tailleurs, bijoutiers, etc.. Mais se procurer un mouton et s’apprêter font<br />

partie intégrante <strong>de</strong> la fête. Si ces <strong>de</strong>ux « obligations » sont si importantes, c’est parce<br />

que la Tabaski n’est pas à proprement parler une fête privée. L’on est amené à<br />

recevoir <strong>de</strong>s visiteurs (mendiants, amis, voisins, famille) <strong>de</strong> même que l’on est amené<br />

à être reçu. Ainsi, les portes <strong>de</strong>s maisons sont-elles ouvertes « aux autres ». C’est là<br />

un accès privilégié au cadre <strong>de</strong> vie familial, une occasion <strong>de</strong> voir et d’être vu. Et il<br />

s’agit <strong>de</strong> bien se faire voir, à la mesure <strong>de</strong> sa condition sociale.<br />

<strong>Les</strong> « Maliens sont contraints <strong>de</strong> convertir une partie <strong>de</strong> leur fortune en prestige<br />

social ou religieux […]. L’accumulation <strong>de</strong> richesses, en effet, n’est pas répréhensible<br />

aux yeux <strong>de</strong>s habitants <strong>de</strong> ce pays ; ce qui l’est par contre c’est leur rétention. Si la<br />

redistribution entraîne les bénédictions <strong>de</strong> ceux qui la reçoivent, l’avarice provoque<br />

au contraire la malédiction. Quoi <strong>de</strong> plus important pour les Maliens, surtout les plus<br />

riches, que d’éviter les malédictions, alors qu’ils n’ont qu’un seul souci, celui d’assurer<br />

leur réputation au sein <strong>de</strong> leur milieu social 1 ».<br />

La famille D. a mis un point d’honneur à répondre aux nécessités <strong>de</strong> la fête. Le<br />

sacrifice <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux moutons avec une division précise <strong>de</strong>s tâches selon l’âge et le genre,<br />

la distribution <strong>de</strong> vian<strong>de</strong> « aux quatre coins <strong>de</strong> la ville » et l’ostentation <strong>de</strong>s richesses<br />

lors <strong>de</strong>s visites (les bazins <strong>de</strong> haute qualité et les bijoux <strong>de</strong>s femmes en particulier) en<br />

sont quelques exemples.<br />

Mais la Tabaski est une occasion particulière <strong>de</strong> faire valoir sa position sociale. À<br />

Bamako, les logiques <strong>de</strong> redistribution <strong>de</strong> nourriture et <strong>de</strong>s richesses dépassent<br />

largement le cadre <strong>de</strong> la fête pour venir s’inscrire dans les pratiques quotidiennes <strong>de</strong><br />

la relation sociale. Ainsi, la famille D. met-elle <strong>de</strong> côté, chaque jour, du riz blanc en<br />

vue <strong>de</strong> satisfaire la faim éventuelle <strong>de</strong> visiteurs imprévus. Alain Dumestre précise<br />

d’ailleurs que, « en ville, et chez les gens un peu aisés, l’ordinaire est plus riche (le riz<br />

remplace le mil, la bouillie est lactée ou sucrée) 2 ». Il en est <strong>de</strong> même pour ce que l’on<br />

nomme le « sacrifice » :<br />

1 Op.cit., Amselle, 1987, p. 72.<br />

2 Op.cit.,Dumestre, 1996, p.693.<br />

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