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Les bamakois diplômés de Paris

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présenter n’est pas sans rapport avec le modèle <strong>de</strong> société considéré, malien ou<br />

français. Il me reste à dire quelques mots sur le positionnement <strong>de</strong>s enquêtés à<br />

l’égard <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux modèles, sur la manière dont ils articulent le schème <strong>de</strong> la <strong>de</strong>tte<br />

(incorporé au Mali) et le schème <strong>de</strong> l’autonomie (impulsé par la France). L’extrait<br />

d’entretien suivant, réalisé avec Ladji, con<strong>de</strong>nse le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la plupart <strong>de</strong> mes<br />

interlocuteurs à ce propos :<br />

Ladji : « Ici, ce qui change fondamentalement, c’est l’idéologie. <strong>Les</strong><br />

Africains et les Français n’ont pas la même idéologie. C’est parce que vous,<br />

vous valorisez l’individu que beaucoup <strong>de</strong> jeunes Africains viennent ici…<br />

C’est pour ça que moi-même je suis parti…<br />

tel-00708235, version 1 - 14 Jun 2012<br />

David : Toi, comment tu t’y retrouves entre l’idéologie française et<br />

l’idéologie africaine <br />

Ladji : C’est clair, je suis africain à 100%, je me sens africain à 100%.<br />

Pourquoi j’envoie <strong>de</strong> l’argent à la famille C’est dire… Mais par contre je<br />

dois m’en sortir ici, je n’ai pas le choix, je dois m’occuper <strong>de</strong> moi-même<br />

aussi… En fait, moi, je me fie à un vieux proverbe africain qui dit : "quand<br />

vous arrivez quelque part et que vous trouvez les gens différents <strong>de</strong> chez<br />

vous, dansez comme eux, mais n'oubliez pas la danse <strong>de</strong> chez vous".»<br />

L’immigration est interprétée par Ladji comme un changement dans la façon<br />

d’exister comme individu et dans la façon <strong>de</strong> se protéger socialement et<br />

économiquement (« je dois m’occuper <strong>de</strong> moi-même »). C’est là une <strong>de</strong>s facettes<br />

essentielles du travail <strong>de</strong> secon<strong>de</strong> socialisation <strong>de</strong>s mes interlocuteurs. Et je rappelle<br />

une fois encore que cette appropriation <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’être <strong>de</strong> la société d’immigration<br />

est d’autant plus impérative qu’elle s’inscrit dans l’urgence du besoin, <strong>de</strong><br />

l’immédiateté.<br />

Mais dans la déclaration <strong>de</strong> Ladji, on comprend également que la quête<br />

d’autonomie poursuit un objectif parallèle : l’obligation morale d’honorer les termes<br />

originels du contrat familial (par le biais <strong>de</strong>s transferts financiers notamment).<br />

Installé en France <strong>de</strong>puis quatorze ans, Zoumana m’a récemment déclaré :<br />

« Je ne sais pas comment te dire, mais ai<strong>de</strong>r ses parents, envoyer <strong>de</strong> l’argent<br />

au pays, c’est obligatoire, je ne peux pas faire autrement, c’est en moi [me<br />

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